Est-ce vraiment une bonne idée de mordre sa médaille ? Des dentistes nous répondent
SANTÉ – Croquer la vie à pleines dents, mais avec modération ! Alors que les Jeux olympiques de Paris 2024 battent leur plein, plusieurs dizaines de médailles ont déjà été distribuées. L’occasion pour les athlètes victorieux de mordre fièrement leur prix devant les caméras, comme l’ont fait Simone Biles et ses coéquipières. Mais si ce geste est symbolique, il n’est pas sans danger, alertent les dentistes.
C’est ce que prouve la mésaventure du lugeur allemand David Möller (qui porte bien son nom), médaillé d’argent aux JO de Vancouver de 2010. Celui-ci s’était cassé un morceau de dent en tenant sa médaille avec la bouche pour les photographes, rappelle le site officiel des Jeux Olympiques.
Un accident qui peut sembler incongru, mais qui est tout à fait possible, confirme Alain Vallory, chirurgien-dentiste et secrétaire général de l’association des Chirurgiens-Dentistes de France. « Tout est une question de la dureté de l’objet dans lequel on mord », précise-t-il. Les médailles faites d’argent et de bronze étant plus dures que l’émail (couche protectrice des dents), les mordre risque d’abîmer les dents « qui ont beau être solides, ne sont pas faites pour ça ». Au contraire, les médailles plaquées or sont plus molles, et les dents peuvent même y laisser une trace. Une autre bonne raison pour les athlètes d’arriver en première place du podium.
Attention aux prémolaires
Si le risque est bien réel, Alain Vallory explique que les réflexes naturels du corps devraient empêcher ce genre d’accidents. « Notre mâchoire lâche instinctivement si l’on mord dans quelque chose de trop dur. » Mais cette réaction peut parfois être altérée et conduire à des accidents, notamment dans le cas des athlètes qui connaissent probablement une décharge d’adrénaline après une performance sportive réussie.
« C’est aussi une question de fragilité de la dent », continue le dentiste, notant que les athlètes ont tendance à mordre leur médaille sur le côté en utilisant leurs prémolaires, « pour donner l’impression d’avoir plus de mordant ». Or, les champions utilisent ainsi des dents extrêmement fragiles, et qui sont souvent celles qui cassent le plus, affirme Alain Vallory. « Les prémolaires sont faites pour mastiquer, et non pour mordre. Elles sont donc beaucoup moins sensibles à la pression, et il est plus difficile de se rendre compte que l’on a mordu dans quelque chose de trop dur. »
Un accident bénin qui reste rare
La chirurgienne-dentiste Marianne Franchi, cadre du Syndicat des Femmes Chirurgiens-Dentistes, relativise la dangerosité du geste « à condition de ne pas mordre trop fort » et que la dent ne soit pas déjà fragilisée (ce qui peut certes être le cas chez certains athlètes olympiques, notamment au rugby, au hockey ou dans les sports de combat). Mais une vraie dent en bonne santé est très solide, et « il faut vraiment y aller très fort pour la briser » plaisante la dentiste.
Et même en cas d’accident, une dent qui se casse, « ce n’est pas forcément grave, c’est un accident bénin qui se répare facilement », rassure Alain Vallory. Les choses peuvent par contre se compliquer dans certains cas : si un tiers de la dent se casse, par exemple, et que cela touche éventuellement le nerf. Pire encore, une cassure complète de la dent oblige les dentistes à la retirer complètement et la remplacer. « Mais c’est un cas de figure assez improbable pour une médaille, car le cerveau de l’athlète est tout de même conscient qu’il s’apprête à mordre dans quelque chose de très dur. »
La précaution est donc le mot d’ordre pour les deux dentistes, et le conseil est suivi à la lettre par les gymnastes américaines qui ont remporté l’or ce mardi 30 juillet. Sur TikTok, la star de la discipline Simone Biles a partagé une vidéo d’elle et ses coéquipières faisant mine de croquer leur médaille.
Une célébration de la victoire que devrait apprécier la dentiste Marianne Franchi, pour qui « il vaut mieux manger de l’or que la poussière ! ».
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