Comment François Ruffin compte rebondir, à l’écart de La France insoumise
POLITIQUE – Il respire, enfin. Depuis qu’il a quitté La France insoumise au début de l’été, François Ruffin se sent plus léger. « Il fallait que je coupe la corde », expose-t-il. Cette liberté de ton et d’action retrouvée le pousse à organiser sa première grande rentrée politique, chez lui à Flixecourt (Somme). Ce samedi 31 août, des personnalités de toute la gauche, accompagnées de figures associatives et syndicales, sont attendues, parmi lesquelles Clémentine Autain, Alexis Corbière, Stéphane Troussel, Damien Maudet, Marie-Charlotte Garin, Sébastien Peytavie ou encore Sophie Taillé-Polian.
L’ère mélenchoniste semble bien loin pour celui qui, désormais, entend incarner « la stabilité et la protection ». Au-delà donc de toute appartenance partisane. S’il a rejoint le groupe écologiste à l’Assemblée nationale, l’ancien reporter se veut un député « libre », à la confluence des différents courants progressistes. « Ma famille, c’est la gauche, clame-t-il dans Libération. Mais la vie, ce n’est pas les partis, c’est être auprès des gens. »
Un mantra qu’il appliquera ce samedi. L’initiative, sobrement intitulée « Le 31, je viens ! », devrait brasser des dizaines voire des centaines de militants venus de plusieurs coins du pays. Des bus ont été affrétés au départ Paris, et des covoiturages mis en place depuis plusieurs villes dont Lille, Amiens, Lens, Calais, Arras… « Cet événement est un moment de respiration politique et festif, à la fin de l’été, dans un contexte politique où on a besoin de force pour faire pression sur Macron », affirme l’ex-député communiste Sébastien Jumel auprès du HuffPost.
« Rallumer les flammes de l’espoir »
À partir de 14 heures, deux débats auront lieu simultanément : l’un sur les leçons à tirer des élections législatives, l’autre sur la façon pour « la gauche populaire » de « se faire aimer ». François Ruffin conclura la journée par un grand meeting aux alentours de 17 h 30. Karaoké, châteaux gonflables, baby-foot géant, stand de maquillage, distributeur de barbes à papa… l’idée est aussi d’assurer une ambiance festive. « C’est la marque de fabrique de François, indique Sébastien Jumel. Si on est tristes, on ne rallumera pas les flammes de l’espoir. » Le communiste considère « qu’il y a un enjeu à redonner de la dignité aux gens, et ça ne peut se faire que dans un cadre sympa ».
François Ruffin n’en est pas à sa première tentative de « casser les codes ». Lors de sa campagne législative de 2022, il avait invité les humoristes Shirley et Dino, aperçus dans Le plus grand cabaret du monde de Patrick Sébastien, et organisé un bal populaire, un carnaval dans les rues de sa circonscription et même… Un défilé de mode. L’un de ses événements de campagne s’appelait « Ruffête ».
Faire revenir la politique dans ce territoire historiquement communiste est, aux yeux du député, une nécessité. Il déplore souvent « la résignation » et « l’indifférence » qui a peu à peu gagné les habitants. À la manière d’un Arnaud Montebourg qui s’était taillé sur mesure sa Fête de la rose à Frangy-en-Bresse ou d’un Philippe Brun qui, seul député non RN de l’Eure, organise désormais chaque année sa Fête populaire, François Ruffin entend faire de cet événement de rentrée un moment fort de son mandat.
D’autant qu’il le sait : aux dernières élections, la victoire s’est jouée à un cheveu. Talonné par le Rassemblement national au premier tour, il a réussi à renverser la vapeur au second. Il attribue ce succès à une campagne de terrain, au plus près des revendications des habitants, loin des grands discours et des débats nationaux. « C’est objectivement énorme le retard qu’il a rattrapé, confiait un cadre Renaissance cet été au HuffPost. Même si Albane Branlant [la candidate macroniste] a fait le job en se désistant et en appelant clairement à voter pour lui, on n’y croyait pas trop. » Sébastien Jumel en Seine-Maritime, Fabien Roussel dans le Nord ou Caroline Fiat en Meurthe-et-Moselle se sont, eux, inclinés face à la vague lepéniste.
« Trait d’union à gauche »
De quoi donner à ce rendez-vous un parfum de résistance. « La gauche sera rassemblée dans sa diversité, ce sera large, dans un lieu qui n’est pas une métropole, dans une terre ouvrière », appuie Sébastien Jumel, pour qui ce 31 août servira aussi à montrer que « les digues pour empêcher le RN d’arriver au pouvoir existent et qu’il faut les renforcer ». La stratégie du député de la Somme est connue : « réconcilier la France des bourgs et celle des tours » pour élargir l’assise électorale de la gauche, actuellement puissante auprès de la jeunesse et dans les quartiers populaires mais plus faible dans les territoires désindustrialisés et dans l’ancien bassin minier.
« François est celui qui a réinventé le concept de Front populaire, en appelant à l’union dès 21 heures le 9 juin », rappelle un proche, qui voit l’ex-journaliste comme « un trait d’union à gauche, des socialistes aux Insoumis ». Le même évacue en revanche tout tremplin vers 2027. À moins de trois ans de l’élection présidentielle, sur laquelle lorgnerait François Ruffin, organiser des événements comme celui-là permet de poser des jalons. Et de montrer qu’une vie est possible en dehors de La France insoumise.
Les relations avec son ancien mouvement sont glaciales. Le contact est rompu avec Jean-Luc Mélenchon, qu’il avait traité de « boulet » pendant sa campagne des législatives. Sur l’un de ses tracts, le candidat à sa réélection avait écrit qu’il n’avait « rien à voir » avec le fondateur de LFI, préférant afficher le soutien de gens comme François Bayrou ou Raphaël Glucksmann. Quoi qu’il en soit, François Ruffin voit loin. À propos de ce samedi 31 août, il écrit sur son site : « Qui sait, ce sera peut-être le point de départ d’une histoire. »
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