Politique

« Brutalisation », « coup de force » : le possible recours au 49-3 suscite la colère des oppositions

POLITIQUE – L’impression d’un jour sans fin. Le recours au 49-3 est devenu un classique de la vie politique, rythmant chaque automne budgétaire. En expliquant que le Premier ministre se réservait « la possibilité » de recourir à l’article tant décrié de la Constitution, et qu’il en demanderait la permission au Conseil des ministres ce 23 octobre, la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a ouvert la voie aux critiques et aux procès en mise au pas du Parlement.

« Michel Barnier nous avait promis de gouverner autrement. Au deuxième jour de l’étude du premier texte qu’il propose au Parlement, son gouvernement nous prépare un retour aux bonnes vieilles méthodes », s’agace la députée ex-LFI Clémentine Autain sur le réseau social X. Selon elle, un éventuel recours au 49-3 serait une nouvelle preuve de « brutalisation » et de « mise sous silence de la vie parlementaire ». « Un coup de force permis par la Ve République », tranche-t-elle. « Un gouvernement minoritaire n’a aucune légitimité à un passage en force », dénonce lui le Premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui estime que « le 49-3 ne se justifie pas ».

Pour pouvoir l’utiliser, le gouvernement doit obtenir l’assentiment du Conseil des ministres. Une fois cette étape franchie, il est libre d’y avoir recours quand il le souhaite. Un 49-3 pourra donc être dégainé dans les prochaines heures… comme dans les prochains jours. D’ailleurs, personne ne surjoue l’étonnement. Tel un fantôme qui plane au-dessus des débats depuis lundi, l’article constitutionnel n’est une surprise pour personne.

« Une autre méthode »

Surtout au vu de la composition actuelle de l’Assemblée, avec un « socle commun » qui enchaîne les revers. « Le chemin va être compliqué avec la nouvelle Assemblée », a concédé l’ex-Première ministre Élisabeth Borne sur France Inter. Parfois surnommée « Madame 49-3 » (elle y a eu recours à vingt-trois reprises au cours de son année et demie passée à Matignon), la députée du Calvados a rappelé « que s’il n’y a pas de budget, les fonctionnaires ne sont pas payés et les cartes vitales ne fonctionnent plus ». Manière de défendre Michel Barnier et son inextricable chemin pour faire adopter un texte au forceps.

« Michel Barnier nous rappelle les pires heures des gouvernements Macron », fustige de son côté le vice-président du RN Sébastien Chenu. Il ne « considère pas que le 49-3 soit inutile » mais rappelle qu’en l’espèce, le Premier ministre « nous avait promis une autre méthode ». « C’est en contradiction avec tout ce que nous ont annoncé les ministres, à commencer par celui du Budget », explique le député d’extrême droite sur BFMTV.

À l’ouverture des discussions le 21 octobre, Laurent Saint-Martin a en effet déclaré que « refuser le débat serait une faute morale et politique ». « J’ai été parlementaire, j’ai siégé sur ces bancs en tant que rapporteur du budget. Je tiens à ce que vous puissiez évidemment enrichir et améliorer ce texte », avait-il expliqué aux députés. « On ne veut pas que le Parlement soit brutalisé », conclut Chenu.

En théorie, les discussions doivent se poursuivre jusqu’au vote solennel, prévu le 29 octobre. Mais le gouvernement laissera-t-il les députés travailler jusqu’à cette date ? Le couperet du 49-3 pourrait tomber avant.

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