Avec des millions de boîtes achetées l’an dernier, voici le médicament favori des Français
SANTÉ – C’est de très loin le médicament le plus prescrit dans l’Hexagone. Dévoilés jeudi 14 novembre par l’Assurance-maladie, les nouveaux chiffres sur la prescription des médicaments en France confirment la place sans pareille du Doliprane dans les armoires à pharmacie, au moment où son producteur Sanofi est pris dans une polémique sur sa vente annoncée.
« Un médicament se dégage puisqu’on a vraiment le Doliprane (…) qui représente énormément de boîtes », résume auprès de l’AFP Sophie Kelley, responsable des produits de santé à l’Assurance-maladie. Ce bilan donne des montants d’ordre général sur l’ampleur des remboursements de médicaments en France : un peu plus de 25,5 milliards d’euros l’an dernier pour une moyenne de 41 boîtes et 410 euros pour chaque patient.
Surtout, il dresse un palmarès des médicaments les plus prescrits. Et, à ce titre, le Doliprane, produit par le géant pharmaceutique Sanofi, garde une avance écrasante. En un an, plus de 308 millions de boîtes de Doliprane ont été prescrites en France, selon des données arrêtées à juin 2024. Aucun autre traitement ne dépasse le seuil des 100 millions : le deuxième est le Dafalgan d’Upsa, avec 71,6 millions.
Bientôt sous giron américain
Doliprane comme Dafalgan sont des produits à base de paracétamol, l’un des antidouleurs les plus courants. C’est, en soi, la molécule la plus prescrite de très loin en France. Et face à ses concurrents, Doliprane se taille une place plus que dominante : il représente trois quarts des prescriptions de paracétamol. Quelque 36 millions de Français, soit plus de la moitié, y ont eu droit en un an.
Ces chiffres témoignent du caractère toujours emblématique de ce médicament, récemment au cœur d’une polémique alors que Sanofi compte vendre la majorité d’Opella, sa filiale produisant le Doliprane, à un fonds américain, CD&R. L’annonce a provoqué une vive opposition des syndicats et de responsables politiques de tous bords, sur fond d’inquiétudes concernant l’emploi et l’approvisionnement en médicaments, même si les usines françaises de Sanofi ne font à l’heure actuelle qu’assembler le Doliprane à partir de paracétamol importé de l’étranger.
L’État a imposé à Sanofi et CD&R de nombreuses garanties quant à l’emploi et la production du Doliprane sur le sol français, bien qu’elles soient jugées insuffisantes par les opposants à la vente.
Pourquoi une telle domination du Doliprane ? Comme le Dafalgan, il bénéficie d’une exception française : contrairement à ce qui est appliqué dans les autres pays européens, un pharmacien ne peut pas choisir de les remplacer par un générique du paracétamol. Cette situation, dénoncée au début des années 2010 par l’Autorité de la concurrence, profite de fait à ces traitements vedettes même si le coût pour la collectivité n’est pas plus élevé puisque les tarifs du Doliprane et du Dafalgan sont alignés sur les génériques.
Des médicaments peu efficaces aussi remboursés
Hors de ces traitements grand public, les chiffres dévoilés par l’Assurance-maladie posent d’autres questions, notamment les montants élevés qui sont consacrés au remboursement de médicaments n’ayant guère démontré d’avancée majeure par rapport à ce qui existe déjà.
Certes, une part élevée des remboursements concerne des médicaments très coûteux mais qui représentent vraiment un progrès : c’est le cas de plusieurs anticancéreux ou du Kaftrio de Vertex, qui a changé la donne pour de nombreux patients atteints de mucoviscidose.
Mais ce n’est pas tout le temps le cas. Près d’un tiers des montants remboursés s’applique à des médicaments pour lesquels la Haute autorité de Santé (HAS) n’a conclu qu’à une « amélioration du service médical rendu » (ASMR) faible ou inexistante. Un cas illustre cette situation : l’Eliquis, un anticoagulant commercialisé en commun par Bristol-Myers Squibb et Pfizer, est le traitement qui coûte le plus cher à la collectivité : plus de 750 millions d’euros remboursés. Pourtant son ASMR n’est que faible. Dans ce cas précis, la situation ne va pas durer, selon l’Assurance-maladie. L’institution prévient que l’arrivée de génériques va faire tomber l’Eliquis du piédestal.
Mais, plus largement, la place privilégiée de traitements peu innovants apparaît peu justifiable dans un contexte budgétaire tendu. « C’est un phénomène, un élément qui nous interroge en termes de soutenabilité », a admis Thomas Fatôme, directeur de l’Assurance-maladie, assurant de la « vigilance » de l’institution.
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