La précaution que Darmanin veut garder en cas d’extension du plaider-coupable en matière criminelle
TRIBUNAL – Une révolution du fonctionnement judiciaire oui, mais à n’importe quel prix. En adressant un courrier aux magistrats le 11 mai, Gérald Darmanin sait qu’il en a braqué une partie. Son idée d’étendre le plaider-coupable à la matière criminelle, c’est-à-dire de juger des affaires simples sans procès quand la personne reconnaît les faits, ne fait pas l’unanimité.
Ce 13 mai sur France 2, le ministre de la Justice a donc tenté de justifier son idée, qui devrait faire l’objet d’une proposition de loi d’ici la fin de l’année. Il a notamment posé trois conditions « indispensables » pour que la procédure de plaider-coupable puisse être menée à son terme : « la victime doit être d’accord à toutes les phases », « l’auteur des faits doit les reconnaître » et « le parquet, donc le procureur de la République et l’État, doivent être d’accord ».
Une précaution qui installe donc l’idée que si l’une des trois conditions n’est pas remplie, si le mis en cause change de version ou si la victime change d’avis, un procès classique doit se tenir. Dans la tête du ministre, l’idée est donc que tous les acteurs « se mettent d’accord sur une peine que va subir l’auteur des faits » ce qui peut permettre aussi aux victimes, affirme-t-il de tourner la page plus rapidement.
Comme pour répondre à ceux qui craignent un saut dans l’inconnu, Gérald Darmanin rappelle que « cela existe en matière financière ». La procédure de plaider-coupable est aussi possible dans le cas de certains autres délits (exceptions faites des agressions sexuelles et des atteintes physiques faisant encourir plus de cinq ans de prison).
Comment faire gagner du temps à la justice ?
La proposition, qui s’appuie sur une volonté de désengorger les tribunaux et de faire gagner du temps aux magistrats, figurait dans le rapport commandé par l’ancien ministre Didier Migaud, débarqué après la chute du gouvernement de Michel Barnier. « Ça nous fera gagner beaucoup de temps, mais la victime doit absolument être d’accord à tout moment », insiste Gérald Darmanin, pour qui « entre 40 et 50 % des faits criminels sont reconnus par leurs auteurs ».
Sans que cela ne convainque totalement les professionnels. Vouloir créer des plaider-coupables pour les infractions les plus graves « indique une méconnaissance complète de la justice criminelle, du temps dont on a besoin pour juger une affaire, quelle qu’elle soit. Même une affaire “simple” nécessite de prendre du temps », s’agace la secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature, Manon Lefebvre, interrogée par Libération.
Concrètement, un plaider-coupable prendrait la forme d’une « réunion de conciliation » afin de jauger la façon dont la personne « exprime sa culpabilité ». Se tiendrait ensuite « une sorte de négociation autour de la peine », au cours de laquelle la victime aurait son mot à dire. Reste à trancher la question des moyens et du manque de personnel, mise en avant par tous les professionnels de la justice.
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