Politique

Le message de félicitations de Macron au nouveau président polonais ressemble aussi à une mise en garde

DIPLOMATIE – L’arc réactionnaire européen s’est réveillé à la fête ce lundi 2 juin avec l’élection, de justesse, de Karol Nawrocki à la présidence de la Pologne. Le candidat nationaliste l’a emporté sur son rival pro-européen, Rafal Trzaskowski.

De quoi susciter des messages de félicitations de Viktor Orbán et Marine Le Pen. Mais aussi de plusieurs chefs d’États européens, dont Emmanuel Macron et le président allemand Frank-Walter Steinmeier qui ont tous deux invité, eux, le nouveau président polonais à œuvrer dans le « respect l’État de droit ».

Karol Nawrocki avait mené sa campagne tambours battant, en partie contre l’Allemagne, qualifiant le Premier ministre avec qui il va devoir travailler de « valet de l’État allemand ». Même si les pouvoirs du nouveau chef d’État polonais sont limités, il exercera une influence, certes limitée, sur la politique étrangère et la défense, et dispose d’un pouvoir de veto législatif qu’il pourrait choisir de faire valoir sur l’avortement, les droits des personnes LGBT+, ou encore l’indépendance des médias. Des sujets sur lesquels, la commission européenne a entamé depuis plusieurs années un bras de fer contre la Hongrie de Viktor Orban en 2024.

Et de quoi rappeler au bon souvenir du nouveau dirigeant que le gouvernement précédant celui de Donald Tusk, issu également du PiS, s’était engagé pendant près de six ans dans une procédure similaire avec les institutions européennes, en raison d’atteintes à l’indépendance de la justice.

Admirateur de Donald Trump, dont il a repris le slogan « America first » pour son slogan, « La Pologne d’abord, les Polonais d’abord », Karol Nawrocki est aussi un pourfendeur de Bruxelles. Il s’est notamment illustré par des positions contre l’entrée de l’Ukraine dans l’Otan, même s’il est engagé à maintenir le soutien de son pays à Kiev.

Le traité de Nancy et le rapprochement franco-polonais

Un point diplomatique soulevé notamment par le président français, qui a enjoint son homologue nouvellement élu à renforcer « le lien qui unit la Pologne et la France, dans l’esprit du traité de Nancy ». Signé en mai, avec la présence en grande pompe de Donald Tusk en France, ce traité renforce surtout la coopération de défense entre les deux pays face à une Russie jugée de plus en plus menaçante.

Ce traité ouvre aussi la voie à plus de coopération en matière de dissuasion nucléaire puisqu’il inclut une clause de défense mutuelle. La séquence de mai était d’autant plus forte qu’elle intervenait quelques mois après l’ouverture d’une crise de confiance entre les Européens et les Américains en matière de défense et sur fond de rapprochement entre Donald Trump et Vladimir Poutine. Lors de la signature, Emmanuel Macron avait à nouveau rappelé que les « intérêts vitaux » de la France, à la base de sa stratégie de dissuasion nucléaire, intègrent aussi ceux de ses « principaux partenaires » en Europe. Et donc la Pologne.

Le message d’Emmanuel Macron ce lundi traduit-il les craintes de la part de Paris de voir le nouveau président polonais faire marche arrière ? Interrogé un peu plus tôt par des étudiants en sciences politiques de Lille sur un éventuel revirement de la Pologne, Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, semblait temporiser en soulignant que « la conduite du gouvernement est quand même assurée par le Premier ministre ».