Politique

Droite et extrême droite font vriller l’Assemblée avec ce vote sur les énergies renouvelables

POLITIQUE – L’Assemblée nationale, aussi, est en surchauffe. Les députés ont voté jeudi 19 juin un moratoire immédiat sur les énergies renouvelables (éolien et solaire), sous l’impulsion de la droite, avec le concours de l’extrême droite, et au grand dam du reste de l’hémicycle.

C’est le député Les Républicains Jérôme Nury, pourtant membre de la coalition au pouvoir, qui a déposé cet amendement. Il a été adopté de justesse en fin d’après midi par les groupes LR et RN, face aux bancs dégarnis de la gauche et du bloc central (Renaissance, Horizons, MoDem). Concrètement, cette disposition imposera, si la loi est promulguée, la suspension de tout nouveau projet éolien ou photovoltaïque.

De quoi susciter la colère du gouvernement, défavorable à ce coup d’arrêt brutal. Et l’indignation de nombreux élus de gauche et des écologistes. « Je le dis avec gravité, avec solennité (ce moratoire) est parfaitement irresponsable », s’est notamment désolé le ministre de l’Industrie Marc Ferracci, déplorant, à l’unisson de la gauche et des écologistes, un « signal » « dévastateur » envoyé aux acteurs industriels.

« Un suicide collectif »

Très remontée, la députée de Paris Sandrine Rousseau a dénoncé « un suicide collectif », ce vendredi sur RMC. « Ce qui se passe depuis quelques jours est incroyablement dangereux », a ainsi expliqué la députée écologiste, fustigeant une représentation nationale qui « prend toutes les décisions absolument contraires » aux alertes des scientifiques sur le climat.

Alors qu’une grande partie de la France entre dans une période de canicule anormalement précoce, « dans l’hémicycle, on fait triompher le climatoscepticisme », a-t-elle résumé, en évoquant la ribambelle de reculs que la gauche et le centre n’a pas réussi à éviter ces derniers jours sur le climat, sur le ZAN (zéro artificialisation nette) ou désormais les énergies renouvelables.

Au Palais Bourbon, l’insoumis Matthias Tavel a lui aussi déploré un « naufrage énergétique, industriel et politique. » « Il n’y aura pas de l’électricité suffisante en France si ce moratoire sur les renouvelables est maintenu. Ce moratoire signifierait le plus grand plan social que notre pays connaîtrait », a-t-il dénoncé, en fustigeant aussi « le naufrage politique de la macronie », trop peu présente dans l’hémicycle pour empêcher les coups de boutoirs de l’extrême droite et des Républicains, ses alliés.

Un texte encore rejeté par le centre ?

Plus largement, le Rassemblement national, qui a mis la pression pour inscrire ce texte à l’ordre du jour de l’Assemblée en faisant d’un éventuel refus un motif de censure du gouvernement Bayrou, a engrangé les victoires. Un peu plus tôt, le groupe de Marine Le Pen avait déjà réussi à introduire dans le texte le redémarrage de la centrale nucléaire de Fessenheim, fermée en 2020, suscitant là aussi la colère des autres groupes.

« Alors qu’une loi de programmation, c’est fait pour donner de la stabilité, de la perspective, on ne fait que mettre de l’instabilité », a ainsi regretté le président du groupe des députés MoDem, Marc Fesneau tandis que les écologistes qualifient le texte de « menace grave pour le climat », œuvre d’une Assemblée ayant sombré « dans l’absurde ».

Dans ce contexte, le vote solennel prévu mardi prochain à l’Assemblée sur l’ensemble du texte promet de nouveau d’être houleux. La gauche appelle déjà les macronistes et le bloc central à procéder à son rejet, comme ils ont essayé de le faire (en vain) pour la loi « simplification », devenue elle aussi une loi anti-écologie. Après un tel fiasco, une autre option peut s’ouvrir pour l’exécutif : se passer du Parlement, et agir par décret. À ses risques et périls.