Politique

Comment Jean-Luc Mélenchon tente d’enflammer les rentrées politique et sociale

POLITIQUE – Jean-Luc Mélenchon remonte sur le ring. Après un été de relative discrétion, au cours duquel il s’est notamment promené sur les routes du Mexique, le leader de La France insoumise fait son retour au premier plan ce vendredi 22 août lors des « Amfis », la rentrée organisée par La France insoumise à Châteauneuf-sur-Isère (Drôme). À partir de 17h30, il prononcera un discours calibré pour donner le ton de la rentrée.

Sans surprise, plusieurs ingrédients devraient y figurer : la censure du gouvernement de François Bayrou, le rejet du budget annoncé pour 2026 et le soutien aux mouvements sociaux. Dans La Tribune dimanche le 17 août, Jean-Luc Mélenchon promettait une mobilisation « tous azimuts ». Occuper le terrain, ne laisser aucune prise à l’adversaire, se déployer sur tous les fronts. À l’aube d’une rentrée agitée, la stratégie de l’ancien député des Bouches-du-Rhône demeure inchangée.

Il aura été le premier responsable politique national à soutenir officiellement l’initiative encore floue du 10 septembre. Ce jour-là, des citoyens qui s’organisent sur des boucles de messagerie en ligne ambitionnent de « bloquer » le pays. Qu’importe que les mots d’ordre soient parfois contradictoires et les modes d’action pas encore clairement définis, Jean-Luc Mélenchon dit se retrouver dans la volonté de riposter par le bas à la politique d’Emmanuel Macron.

L’ancien socialiste n’a pas oublié qu’à la fin de l’année 2018, une partie de la gauche avait accusé un retard à l’allumage dans son soutien aux Gilets jaunes, surprise par sa forme désorganisée et éloignée des circuits traditionnels. Lui avait, dès le départ, « souhaité la réussite » du mouvement né en opposition à la hausse du prix de l’essence. Cette fois encore, malgré les nombreuses inconnues qui planent sur la journée du 10 septembre, Jean-Luc Mélenchon veut mettre son mouvement « au service » de la mobilisation. Difficile d’agir autrement pour celui qui a bâti son offre politique sur le concept de « révolution citoyenne », hérité de l’ancien président équatorien Rafael Correa.

Installer le match face au RN

En se rangeant derrière l’initiative citoyenne et apartisane du 10 septembre, l’ex-candidat à la présidentielle a surtout coupé l’herbe sous le pied de ses partenaires de gauche, immédiatement obligés de se positionner. La preuve étant que trois jours après sa sortie, les Écologistes et le Parti communiste ont annoncé leur ralliement, quand le Parti socialiste se cherche encore une position claire.

Manière habile de replacer La France insoumise au centre du jeu politique, au moins à gauche, et de mettre par la même occasion le Rassemblement national au pied du mur. « L’extrême droite ne se retrouve pas dans la mobilisation du 10 septembre et ce n’est pas un hasard : le RN a été la béquille du pouvoir jusqu’à présent », accuse l’eurodéputée Manon Aubry. Si la formation de Marine Le Pen et Jordan Bardella a pu se reconnaître dans les prémices du mouvement (avec des revendications de baisse d’impôts ou de lutte contre l’immigration), elle s’en démarque par tous les moyens aujourd’hui, dénonçant, comme la députée RN Edwige Diaz, « la récupération de l’extrême gauche » et la participation supposée « de hordes de casseurs, de black blocs et de militants pro-Hamas ».

Provoquer le départ d’Emmanuel Macron

Pour Jean-Luc Mélenchon, qui considère tout de même que « l’indépendance et l’autonomie » du mouvement sont « la condition de son succès », l’appui apporté à la contestation sert surtout à faire ressortir l’absence manifeste du RN… et à installer le match en vue de 2027. « À la fin, ça se jouera entre eux et nous », prophétisait-il déjà en 2012. Aujourd’hui, de nombreux cadres LFI se disent persuadés que le second tour de l’élection présidentielle prévu dans deux ans se jouera face à l’extrême droite.

Une rentrée agitée ? Voilà le rêve que formule Jean-Luc Mélenchon à peu près chaque année, dont la stratégie a toujours consisté en « un pied dans la rue, un pied dans les institutions ». Ainsi espère-t-il que la pression populaire force les députés à voter la censure contre le gouvernement et fasse chuter François Bayrou. Une motion sera déposée dès le premier jour de la rentrée parlementaire, a promis ce jeudi Manuel Bompard.

Par effet domino, c’est le départ d’Emmanuel Macron qu’attend impatiemment le leader de La France insoumise, prêt à renfiler les gants pour une quatrième aventure présidentielle. Malgré ce qu’indiquent tous les instituts de sondage, qui le donnent systématiquement perdant face à Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon est convaincu d’avoir face à lui un trou de souris qui lui permettrait d’entrer à l’Élysée. L’âge avançant, le plus tôt serait le mieux.

En attendant, ses adversaires l’accusent de souffler sur les braises et de chercher à tirer profit de toutes les colères, même celles a priori les plus éloignées de son logiciel. Un vieil adage de gauche résumait bien son état d’esprit : « Tout ce qui bouge est rouge ». Il y croit dur comme fer.