Si vous avez une pile à lire, vous êtes peut-être atteint de « tsundoku » comme Thomas VDB
LECTURE – Soyez honnête : si l’on vous demande de contempler les livres trônant dans votre bibliothèque, combien en avez-vous lu ? Pas seulement l’incipit, le prologue ou le premier chapitre, mais l’ouvrage dans son intégralité. Et, au contraire, combien attendent sagement, parfois depuis des mois, voire des années, d’être ouverts pour devenir votre prochaine lecture ?
Si le chiffre de cette dernière réponse dépasse celui de la première, alors vous êtes sans doute atteint de « tsundoku ». Ce terme japonais, traduit en français au XIXe siècle par « syndrome de la pile à lire », désigne une manie qui touche de très nombreux lecteurs : celle d’accumuler chez soi des livres sans jamais les lire.
Les personnes souffrant de tsundoku ont trouvé un représentant en la personne de Thomas VDB. Invité mercredi 15 octobre sur le plateau de La Grande Librairie pour parler de Fiascorama (éd. Buchet-Chastel), l’humoriste et chroniqueur radio a révélé qu’il était, lui aussi, submergé de livres qu’il n’ouvrait jamais.
S’entourer de livres pour être sécurisé
Ce n’est pourtant pas faute de vouloir les lire, assure Thomas VDB, qui confie être très sensible aux recommandations de libraires. « Je me dis : “Ça, faut que je l’achète”. Et après, je rentre chez moi, et souvent je le pose, et c’est vrai que je peux mettre parfois plusieurs mois avant de me mettre dans un livre », explique le comédien, avant de reconnaître avoir eu toutes les peines du monde à venir à bout des livres des cinq autres invités sur le plateau.
Thomas VDB tente ensuite de trouver une explication à sa bibliophilie (l’autre nom donné à cette accumulation compulsive de livres) : « C’est comme si on avait besoin de se sentir sécurisés entourés de livres. »
De quoi laisser perplexe Augustin Trapenard, qui ne souffre a priori pas de tsundoku. « C’est très inquiétant, je vois beaucoup de gens hocher la tête dans le public et en plateau », lance-t-il, avant de demander qui, parmi l’assistance, partage cette toquade d’accumulation de livres.
C’est le cas de l’écrivaine Camille Bordas, pour qui cette manie est une manière de « prévoir le futur, l’apocalypse, la retraite ». « Mais j’ai fait le calcul, sur tous les livres que j’ai chez moi, j’en ai lu les deux tiers », poursuit-elle, estimant que c’est un bon ratio.
« Il faut considérer ça comme une thésaurisation dans une banque, avance de son côté l’écrivain Alain Mabanckou. Les livres vont rester là, après vous allez les lire, mais ça augmente avec les intérêts. Le jour où vous revenez, les personnages ont grandi, et puis, vous n’écoutez pas les discours : vous lisez selon votre agenda. » « C’est le pire discours que j’ai entendu sur la littérature depuis que j’ai repris La Grande Librairie il y a trois ans ! », s’amuse alors Augustin Trapenard.
Pourtant, pas de quoi culpabiliser si vous êtes atteint de tsundoku, quand on regarde de plus près les éminentes personnalités qui sont aussi touchées : Karl Lagerfeld, George Lucas et même l’écrivain italien Umberto Eco. Possédant plus de 30 000 livres dans sa bibliothèque, ce dernier s’était même confié en 2009 sur sa fâcheuse tendance à l’accumulation dans N’espérez pas vous débarrasser des livres : « Nous avons tous chez nous des dizaines, ou des centaines, voire des milliers (si notre bibliothèque est imposante) de livres que nous n’avons pas lus. »



