Pourquoi l’idée du 49-3 resurgit au sein de la Macronie ?
POLITIQUE – La remarque n’est pas venue de n’importe qui. Marc Fesneau, président du groupe MoDem à l’Assemblée nationale, et plusieurs fois ministre sous Emmanuel Macron, l’affirme désormais haut et fort : « J’ai dit que si on trouvait un outil permettant d’avoir un budget, sans recourir à l’article 49.3, je prenais. Mais je ne vois pas ».
Dans une interview accordée à Libération le 30 octobre, le député du Loir-et-Cher s’inquiète (comme d’autres) de l’impasse des débats budgétaires, et imagine un « 49-3 de compromis », qui pourrait permettre de débloquer la situation, et éviter le scénario noir d’un budget par ordonnances.
Car, pour rappel, Sébastien Lecornu s’était engagé dès sa nomination à renoncer à cette arme constitutionnelle, permettant à l’exécutif d’imposer un texte sans vote, dans le but d’arriver à un compromis à l’Assemblée nationale. Il s’agissait d’ailleurs de l’une des conditions posées par le Parti socialiste pour ne pas censurer le gouvernement.
Or, à mesure que les débats avancent, et qu’un compromis semble à ce stade plus que difficile à trouver, beaucoup jugent que le Premier ministre s’est piégé en se privant de cet outil, perçu comme facilitant l’adoption d’un budget incapable de réunir une majorité.
C’est notamment le cas du député Renaissance Guillaume Gouffier Valente, cité par Le Figaro : « Ce serait une erreur de se priver d’un 49.3 à la fin. Ça a au moins le mérite d’être clair devant le Parlement sur le budget final proposé et les amendements retenus à l’issue des débats ». Un avis que partage le rapporteur général du Budget, le député LR Philippe Juvin.
La « carte du consensus », mais…
« Le Premier ministre a dit “pas de 49-3” pour jouer la carte du consensus, mais je pense que c’était une erreur », a-t-il regretté sur LCI le 2 novembre, avant de pointer l’impasse qui est celle du chef du gouvernement : « est-ce que politiquement il peut revenir arrière ? Je ne sais pas ». L’élu de Hauts-de-Seine met ici le doigt sur quelque chose de capital : Sébastien Lecornu a-t-il les capacités de revenir sur cette promesse formulée devant les Français depuis le perron de Matignon ?
Les réactions outrées qu’une telle annonce provoquerait seront très loin d’arranger ses affaires, d’autant qu’il n’est pas à l’abri que celle-ci déclenche la censure des socialistes, synonyme de chute du gouvernement. Raison pour laquelle Matignon ne change pas d’un pouce son récit : l’idée est bien l’adoption d’un budget en bonne et due forme, prenant en compte les modifications apportées par le Parlement.
Ce qui nous ramène au problème de départ : une copie budgétaire possiblement incohérente, et surtout difficilement assumable, tant par la gauche, que par la droite, dans un contexte où le bloc central n’est pas assez fort pour assurer son adoption. En effet, qui peut dire avec certitude que le groupe LR présidé par Laurent Wauquiez votera un budget comprenant l’instauration d’une nouvelle forme d’ISF et la suspension de la réforme des retraites ?
Car pour le Parti socialiste et ses 69 députés, la question d’un vote « pour » ne se pose pas. Puisque, de facto, il se retrouverait parmi les soutiens de l’exécutif. Hors de question pour Olivier Faure et ses troupes. Ainsi, sur le plan purement arithmétique, il faudrait donc que l’exécutif fasse le plein au sein du bloc central et de la droite, sans offrir de prise à un éventuel vote « contre » du PS, tout en assurant l’abstention des groupes communiste et écologiste. Le tout en respectant les délais constitutionnels : 70 jours d’examen. Une équation quasi insoluble qui a, effectivement, de quoi réveiller les nostalgiques de l’article 49-3.



