« Petites mains » s’inspire du mouvement des femmes de chambre du Park Hyatt Vendôme
CINÉMA – Dans l’univers opulent d’un palace parisien, le film Petites Mains qui sort en salle ce mercredi 1er mai, offre un point de vue différent sur la réalité des femmes de chambre dans l’Hexagone. Au cœur de cette trame, Eva, interprétée par l’actrice Lucie Charles-Alfred, se retrouve propulsée – sans le savoir – en figure de proue d’un mouvement social aussi inattendu que révolutionnaire.
Lorsqu’elle intègre l’équipe du Aston Palace, elle fait la rencontre d’autres femmes de chambre, des personnages hauts en couleur. Elle fait ainsi la connaissance de Safietou (Marie-Sohna Condé), Aissata (Maïmouna Gueye), Violette (Salimata Kamate) et Simone (Corinne Masiero), la plus expérimentée mais aussi la plus usée par les dures années de labeur. À travers les péripéties d’Eva et ses acolytes, se dessine le calvaire quotidien des femmes de chambre. Fatiguées d’être reléguées au simple statut de « petites mains », elles décident de faire grève pour faire entendre leur voix.
Découvrez ci-dessous la bande-annonce :
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Comme nous l’explique le réalisateur Nessim Chikhaoui, Petites Mains est une fiction ancrée dans une réalité poignante : celle des multiples mouvements de grève des femmes de chambre en France. « Les luttes sociales des femmes de chambre du Park Hyatt Vendôme en 2018 et de l’Ibis Clichy-Batignolles à partir de 2019 ont été mes principales sources d’inspiration. Mon objectif était de mixer les anecdotes, car chacun de ces deux mouvements comportait des actions que je jugeais pertinent de raconter. »
Petites Mains relate un vrai mouvement social
En 2018, un vent de révolte souffle parmi les femmes de chambre du palace parisien Park Hyatt Paris-Vendôme. Face aux conditions de travail imposées par l’hôtel et son sous-traitant de nettoyage, elles décident de se mettre en grève pour revendiquer entre autres un treizième mois, la rémunération des heures supplémentaires et des conditions de travail plus dignes. Au cours de cette grève, elles organisent leur propre défilé de mode en pleine Fashion Week de Paris. Une initiative audacieuse que Nessim Chikhaoui a immortalisée dans son film.
« Souvent quand on parle de grève, on pense au mauvais côté avec le bruit, les cris, les grévistes en colère. Et là c’était tout le contraire. Leur défilé était solaire, jovial, lumineux. Leur idée était de montrer qu’elles existaient mais dans la gaîté. Elles s’étaient apprêtées pour l’occasion et elles étaient tout sourire. Forcément ça change de l’image habituelle du gréviste lugubre et râleur. Ce défilé était si beau à voir qu’il fallait absolument qu’il figure dans le film. »
Après 87 jours de grève, marqués par des négociations parfois tumultueuses et une mobilisation quotidienne ponctuée d’incidents avec les forces de l’ordre, la persévérance des femmes de chambre du Park Hyatt Paris-Vendôme a finalement porté ses fruits. Le vendredi 21 décembre, un accord a été signé, marquant une étape cruciale dans la lutte des femmes de chambre, inspirant d’autres travailleuses. Notamment celles de l’hôtel Ibis Clichy-Batignolles à Paris.
Rachel Kéké a beaucoup inspiré le réalisateur
En juin 2019, Rachel Kéké officie en tant que gouvernante à l’hôtel Ibis Clichy-Batignolles, ignorant alors qu’elle deviendrait députée quelques mois plus tard. Elle rejoint le mouvement avec ses collègues pour dénoncer des conditions similaires. Et, vingt-deux mois de grève plus tard, elles obtiennent gain de cause avec une réduction de la charge de travail, le paiement des heures supplémentaires et une augmentation de salaire.
« Nous avons gagné contre le patronat ! Moi qui n’ai jamais fait grève, la première fois que je la fais, je gagne », confiait Rachel Kéké à Franceinfo en 2021. La détermination de Rachel Kéké a marqué Nessim Chikhaoui et lui a inspiré le personnage de Safietou. « C’est vraiment Rachel (Kéké) qui m’a guidée dans les revendications portées par le personnage de Safietou, interprétée par Marie-Sohna Condé. Sa force de caractère et son franc-parler m’ont beaucoup inspiré. »
Le dimanche 28 avril au micro de RTL, la députée LFI a témoigné des réalités brutales du métier de femme de chambre. Elle a raconté son propre vécu : « Dans ce métier, il y a du viol, il y a des attouchements […] Moi, j’ai été victime d’un attouchement. Il y a un client qui m’a touché les seins. Moi je le dis : dans ce métier, souvent quand tu arrives et que tu frappes à la porte, le client, quand il t’ouvre la porte, il te montre son sexe ! »
Plus généralement, depuis la fin de la mobilisation des femmes de chambre, Rachel Kéké pointe du doigt l’invisibilité des femmes noires dans la société française, un parallèle que le réalisateur souligne également dans le monde du cinéma. « Les femmes de ménage sont les petites mains des grands hôtels, tout comme les actrices noires sont, à l’heure actuelle, les petites mains du cinéma, du moins en France. »
La sortie en salles du film le 1er mai n’est pas anodine, puisque cette date correspond à la journée internationale des droits des travailleurs, thème central du long-métrage.
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