Gabriel Attal va-t-il davantage plomber la campagne de Valérie Hayer aux Européennes ?
POLITIQUE – « Je ne sais pas ce que (Gabriel Attal) fera. (…) Il y a un débat cette semaine, c’est ça qui compte le plus, entre notre tête de liste et monsieur Bardella ». Mardi 30 avril sur LCI, le porte-parole de la campagne du camp présidentiel pour les élections européennes Clément Beaune aurait bien aimé que les questions portent davantage sur le débat de sa candidate avec la tête de liste du RN prévu deux jours plus tard. Las, c’est encore de Gabriel Attal dont il est question, le Premier ministre jamais très loin de la campagne de Renaissance et ses alliés.
Le face-à-face de ce jeudi 2 mai sur BFMTV entre Jordan Bardella, en tête dans les sondages, et Valérie Hayer, numéro 2 (de plus en plus) loin derrière lui, est le tout premier du genre. Jordan Bardella a déjà débattu en tête à tête avec Raphaël Glucksmann, mais jamais avec la cheffe de file du camp présidentiel. Le rendez-vous est donc loin d’être anecdotique.
Pourtant, c’est un autre face-à-face, encore hypothétique, qui concentre l’attention : Gabriel Attal contre Jordan Bardella. Est-il confirmé? Quand ? Sur quelle chaîne ? À ce jour, rien n’est fixé. Et aucun des deux intéressés n’a réagi à ces confidences émanant de sources gouvernementales. Mais après deux refus catégoriques de Gabriel Attal de débattre avec Jordan Bardella, la volte-face du Premier ministre interpelle. Et brouille le signal.
Un débat qui en éclipse un(e) autre
Au début de la campagne, Gabriel Attal s’est investi. C’est lui qui a lancé Valérie Hayer lors de son premier meeting à Lille le 9 mars. Lui aussi qui l’a accompagné dans l’un de ses premiers porte-à-porte, dans sa circonscription des Hauts-de-Seine. Il s’est ensuite mis en retrait. L’objectif était alors d’accroître la notoriété de la candidate, peu connue au national. Force est de constater que cela n’a pas marché.
Or, deux mois plus tard, ni les déplacements, ni les premiers débats n’ont pas permis à ce stade d’insuffler une dynamique positive à la liste Hayer. À moins de cinquante jours du scrutin, loin d’atteindre le seuil des 20 % espérés au début, le camp présidentiel baisse lentement mais sûrement semaine après semaine. La liste est à 17 % des intentions de vote fin avril dans l’enquête électorale Ipsos avec le Cevipof, l’Institut Montaigne, la Fondation Jean Jaurès et Le Monde. Soit 15 points de moins que le RN et seulement trois points d’avance sur la liste PS/Publique. Alerte rouge.
Dans ces conditions, la majorité veut remobiliser les troupes et compte pour cela sur les « poids lourds » du gouvernement. À commencer par le numéro 1, Gabriel Attal lui-même – un temps présenté en Macronie comme « l’arme anti-Bardella », même s’il s’en est défendu sur BFMTV le 18 avril.
Le Premier ministre a pour lui d’être habitué aux plateaux télévisés, de ne pas retenir ses coups (et punchlines) sur le Rassemblement national et surtout d’avoir déjà affronté Jordan Bardella lors de l’entre-deux-tours de la présidentielle 2022. De vrais atouts face à au président du RN. Mais aussi une pression supplémentaire sur Valérie Hayer qui reconnaissait début mars être « en plein rodage médiatique » et en déficit de notoriété nationale. À l’opposé du Premier ministre qui jouit d’une cote de popularité supérieure à celle du président de la République.
Stratégies contre-productives ?
En parallèle, le timing des fuites dans la presse, deux jours avant le débat Hayer-Bardella interroge, tant les risques sont nombreux pour Valérie Hayer. Il y a d’abord celui de reléguer au second plan son face-à-face avec Bardella. Ensuite, l’image de Valérie Hayer, cheffe de file secourue par le chef du gouvernement, en prend un coup. Tandis que s’installe l’interrogation suivante : la majorité anticipe-t-elle une contre-performance au point de déjà préparer le match retour avec le Premier ministre ?
Résultat : le contexte ne joue pas en faveur de Valérie Hayer. D’autant que la candidate du camp présidentiel doit aussi composer avec un Premier ministre qui défend une ligne politique penchant à droite, avec des annonces sur l’autorité, la jeunesse et la sécurité. Ce, alors qu’elle-même multipliait au début de la campagne les éléments de langage pour retenir l’électorat de centre gauche, tenté de basculer vers Raphaël Glucksmann. Là encore, le signal n’est pas clair.
Et à nouveau, alors que la campagne entre dans son dernier mois et que les courbes ne s’envolent pas, c’est la stratégie du camp présidentiel qui est remise en question. Ce 30 avril, Nathalie Loiseau, eurodéputée sortante et porte-parole, a redit son regret que son groupe ait « beaucoup trop parlé de nos adversaires et pas du tout assez de ce que nous avons fait depuis 5 ans ». Avant de se fendre d’un « conseil » à sa collègue à Strasbourg et cheffe de file : « Ne pas aller chercher Bardella mais plutôt d’imposer son récit à elle, qui elle est, ce qu’elle a fait, ce qu’on veut faire ». Clément Beaune appelle, lui, à dépasser le « casting » de la liste pour se concentrer sur « la vision qu’on porte pour l’Europe ». Plus facile à dire qu’à faire quand un Premier ministre, chef de la majorité et personnalité la plus populaire du gouvernement, décide d’entrer dans l’arène.
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