Avec « Norferville » Franck Thilliez a adoré vous donner (vraiment) froid
LIVRE – Enfilez votre parka rembourrée, vos gants et votre bonnet fourré, l’écrivain Franck Thilliez vous embarque pour un voyage glacial. Norferville, 24e roman policier de l’écrivain savoyard sorti ce jeudi 2 mai, emmène les lecteurs au bout du monde, dans une petite ville isolée de l’extrême Québec. Une jeune française est retrouvée sauvagement assassinée près d’une réserve autochtone. L’enquêtrice métisse chargée de l’enquête doit composer avec l’arrivée du père de la victime, détective privé bien décidé à élucider le meurtre.
Lecteurs fidèles de Franck Thilliez, oubliez momentanément Sharko et Hennebelle, cette fois-ci les deux protagonistes de l’histoire sont Teddy Schaffran et Léonie Rock. Dans ce roman indépendant, l’écrivain a imaginé deux nouvelles figures. Des êtres brisés, solitaires, qu’il a avec plaisir soumis aux températures les plus extrêmes du globe comme il l’a expliqué au HuffPost : « Je suis un grand lecteur de Jack London, de Croc-Blanc et des histoires qui se passent dans le grand nord. Quand je lisais ça quand j’avais 14 ans, je trouvais ça incroyable. Et je suis allé au Québec en Gaspésie il y a quelques années, ça m’a marqué ».
Le huis clos glacé de Franck Thilliez
Dans Norferville, tout est fait pour mettre les protagonistes dans une cage fictive. Franck Thilliez a pensé ce roman comme « un huis clos sans murs ». Le froid et la nature hostile les empêchent de quitter la ville, et les confrontent à des souvenirs qu’ils auraient préféré oublier.
À Norferville, il fait plusieurs dizaines de degrés en dessous de 0. Le froid est un personnage principal de l’intrigue, c’est ainsi que Franck Thilliez a imaginé son roman : « Je suis fasciné par le froid, par la manière de le décrire, parce que c’est vraiment une sensation particulière, d’autant plus quand il est omniprésent. C’est une façon d’emprisonner les personnages, et mes lecteurs avec, encore plus dans l’histoire, de leur faire ressentir les souffrances des protagonistes. Et cet environnement glacé, on peut tous s’y projeter. »
Dans le roman, cela passe par de nombreuses scènes descriptives de la nature soumise à la rudesse de l’hiver, comme ces chauves-souris qui tombent en plein vol, des cadavres congelés, des doigts et des pieds d’un héros mal préparé aux conditions météo qui s’engourdissent, ou encore une course-poursuite à travers un blizzard meurtrier « J’ai toujours eu le fantasme d’écrire une scène de blizzard. Je me suis dit ça des années avant d’écrire Norferville, je trouve ça génial. »
L’auteur mentionne même un phénomène scientifique méconnu mais tragique et bien réel chez les victimes d’hypothermie sévère, qui les conduit à retirer leurs vêtements et accélérer inconsciemment leur mort. « C’est le déshabillage paradoxal, c’est un médecin légiste qui m’avait expliqué ça. Par très grand froid, même en France c’est arrivé, on retrouve des gens morts qui se sont déshabillés. » Les nombreuses ressemblances avec la saison de 4 de True Detective sont purement fortuites, l’auteur avait déjà terminé le roman lorsqu’elle est sortie sur HBO. « Mais il faut vraiment que je m’y mette s’il y a des points communs à ce point », s’amuse Franck Thilliez.
Les problématiques sociales dans Norferville
Et si l’auteur a choisi le Québec comme décor pour son roman, ce n’est pas qu’en raison de son magnifique paysage. Il a également voulu mettre en avant plusieurs problématiques de société. « J’aime bien évidemment écrire des thrillers, des histoires à suspense, mais c’est encore mieux quand il y a un fond réel, que les gens connaissent sans le connaître », assure-t-il. « Les guerres entre les autochtones et les blancs, on visualise plus ou moins. Mais ce que c’est devenu, les gens le savent moins. Même dans nos sociétés très modernes, il y a encore des peuples qui subissent ces exploitations de leur territoire. Des peuples qu’on a abandonnés ensuite. »
Et en parallèle, ces histoires, « vieilles comme le monde et tragiques » entraînent en queue de comète d’autres problématiques et notamment celles des addictions, de la précarité, des violences sexuelles et des disparitions de femmes autochtones. « Il y a beaucoup à faire, je m’en suis rendu compte en traversant des réserves. Moi je l’ai appelée Norferville, je l’ai inventée, mais toutes les villes très isolées du Canada et d’Amérique du Nord connaissent ça. Le gouvernement du Canada ne peut plus fermer les yeux, c’est un vrai phénomène. On est obligé de l’affronter. »
Ce froid omniprésent et ces problématiques sociétales bien réelles ne sont pas que la toile de fond d’un polar bien construit. Elles en sont la colonne vertébrale et en imposent le tempo. Le résultat est un page-turner rythmé difficile à lâcher. On vous conseille d’embarquer sans hésiter à bord du train direction Norferville. Attention, option frissons dans tous les wagons.
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