Culture

Ces moments géniaux de la cérémonie que seuls les Français ont pu pleinement apprécier

JEUX OLYMPIQUES – Lady Gaga qui chante Zizi Jeanmaire, les danseurs du Moulin Rouge en plein cancan, un accordéon qui retentit en musique de fond… Un tel début de cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques, sur la Seine à Paris vendredi 26 juillet, aurait pu nous faire craindre un spectacle 100 % béret-baguette pour un public international en quête d’images dignes d’Emily in Paris. C’était mal connaître Thomas Jolly, maître de cérémonie, chantre du « théâtre populaire », qui a conçu une soirée singulièrement et fabuleusement française, au-delà des clichés.

Une plongée dans notre psyché, qui a pu laisser circonspects certains spectateurs étrangers. Ce Britannique s’amuse ainsi sur X : « Je prends soudainement conscience que lorsque je regardais la cérémonie d’ouverture de Londres en 2012, pleurant de fierté face à des millions de références ultra-précises, le reste du monde regardait sûrement tout ça en mode “wtf”. »

Tandis que cette journaliste française à Londres note une différence nette dans les réactions selon la nationalité : « Ma timeline est composée de Français qui disent “wow je pensais que ce serait nul mais c’est vraiment génial ! Fier de nous !” et de non-Français qui se demandent “c’est quoi ce bordel ?” »

Une cérémonie populaire et irrévérencieuse

La cérémonie s’est ouverte sur un premier clin d’œil : Jamel Debbouze qui crie son célèbre « ça fait plaisir », d’Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre, à Zinédine Zidane. Les références à la culture populaire française se sont poursuivies toute la soirée à travers une playlist 100 % salle des fêtes, peuplée de morceaux de France Gall, Claude François, Véronique Sanson, Mylène Farmer, Cassius, Cerrone ou encore Diam’s. Sans compter l’émouvant défilé des athlètes français sur Lettre à France, de Michel Polnareff.

Au-delà de cet univers made in France, c’est dans ses moments d’humour et d’irrévérence que la cérémonie s’est le plus éloignée du cliché pour touristes. Il faut avoir déjà connu une panne sur la ligne 13 pour pleinement apprécier la scène où Zizou se retrouve coincé entre deux stations avec la flamme. Et comment expliquer le brio d’un Philippe Katerine, peint en bleu dans son plus simple appareil, qui chante « plus de riches, plus de pauvres quand on est tout nu », à des spectateurs internationaux ?

Mais jamais notre goût pour le subversif ne s’est mieux illustré que dans l’apparition d’une Marie-Antoinette décapitée, chantant l’hymne révolutionnaire Ah ! Ça ira, à la fenêtre de la Conciergerie – lieu d’emprisonnement de l’ancienne reine, avant son exécution en 1793. La scène, suivie d’un morceau décapant du groupe de métal Gojira était « aussi un pied de nez à Londres, avec la reine d’Angleterre et James Bond », a expliqué le metteur en scène Damien Gabriac, l’un des organisateurs de la cérémonie, sur France Inter, en référence à l’ouverture des JO de Londres de 2012. Et après tout, quoi de plus typiquement français que de troller nos voisins britanniques ?

Symboles politiques

Au-delà des clins d’œil et des références, cette soirée a eu un message politique très clair de promotion de la diversité. Une parenthèse enchantée de quelques heures dans une année 2024 marquée par la percée de l’extrême droite en France et la violence des discours autour des questions identitaires. « Cette cérémonie m’est apparue comme une espèce de charivari grandiose, une claque envoyée à l’extrême droite et à la droite réactionnaire », s’enthousiasme l’historienne Mathilde Larrère auprès du Nouvel Obs.

Pour toute personne familière avec ce contexte, les symboles politiques de la cérémonie étaient clairs. Et ce, qu’il s’agisse de l’hommage aux femmes souvent effacées de l’Histoire de France ou de la reconstitution de la Cène avec, notamment, les drag-queens Nicky Doll, Paloma et Piche.

Et il fallait avoir suivi les débats délétères de ces derniers mois pour vraiment saisir toute la force d’un des moments les plus réjouissants de cette soirée : quand Aya Nakamura est sortie en reine de l’Institut de France, fief de l’Académie française, et a entonné son tube Pookie avant de reprendre ces quelques lignes du For me formidable d’Aznavour : « Je ferai mieux d’aller choisir mon vocabulaire, pour te plaire, dans la langue de Molière. » Le tout, accompagnée de la Garde républicaine. Un moment sûrement divertissant pour tous les spectateurs, mais d’autant plus émouvant pour ceux qui connaissent les attaques subies par la chanteuse de la part du RN et de l’extrême-droite. L’exemple parfait de ce que cette cérémonie a si bien réussi : créer un divertissement réjouissant tout en offrant une vision de la France riche et loin des clichés.

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