Comment Dolce & Gabbana s’est refait une beauté, 8 ans après les controverses racistes
MODE – Des podiums milanais aux musées parisiens, il n’y a qu’un pas. Lieu privilégié des grandes maisons françaises pour leurs défilés, dont Schiaparelli, le Grand Palais accueille, à partir de ce vendredi 10 janvier, une vaste rétrospective en l’honneur d’une marque – cette fois italienne – que le grand public connaît bien : Dolce & Gabbana.
De la dentelle et de la soie, mêlant extravagance et sensualité… L’exposition Du cœur à la main promet de revenir sur les 40 ans de carrière du duo formé par les stylistes Domenico Dolce et Stefano Gabbana. Lettre d’amour à la culture italienne, elle scelle le retour en grâce de la griffe dans l’opinion publique, huit ans après les controverses racistes.
Nous sommes en novembre 2018, et Dolce & Gabbana s’apprête à donner un show spectaculaire à Shanghai. Plus de 1 400 personnes sont invitées, pour un budget estimé à plusieurs millions d’euros.
Pour promouvoir son évènement, la marque diffuse plusieurs courtes vidéos « humoristiques » sur ses réseaux sociaux. On y voit à chaque fois une jeune femme d’origine asiatique tentant, tant bien que mal, de manger des plats traditionnels italiens (pizzas, cannolis, spaghettis)… avec des baguettes.
Flop total. Les clips au ton moqueur, dénoncés dans le monde par plusieurs comptes influents comme Diet Prada, font scandale. L’appel au boycott en Chine est tel qu’il conduit à l’annulation du défilé, quelques heures avant sa tenue. Mais tout ne s’arrête pas là.
En pleine polémique, une conversation sur Instagram entre Stefano Gabbana et la mannequin Michaela Phuong Thanh Tranova fuite. On peut y lire le créateur parler des Chinois comme des « mangeurs de chiens », et traiter le pays de « mafia chinoise ignorante et puante ». Nouveau couac. La marque rétropédale, plaide le piratage.
Stefano Gabbana et Domenico Dolce s’excusent
Il est déjà trop tard. Dehors, la gronde pousse les autorités à protéger les boutiques de la marque implantées en Chine par crainte de répercussions. Plusieurs revendeurs importants dans le pays, comme Alibaba, JD. com, Kaola, et Yangmatou, retirent de leur plateforme d’e-commerce plusieurs dizaines de milliers de produits D & G.
Sur Weibo, la jeunesse chinoise déverse sa colère. Stefano Gabbana et Domenico Dolce leur répondent dans une courte vidéo. Le visage grave, ils présentent leurs excuses et clament leur amour pour le pays asiatique. Place au silence.
Il faut dire que cette polémique n’est que la dernière d’une longue série de controverses, alimentées au fil des ans par des propos misogynes (comme contre Selena Gomez, en 2018), grossophobes ou homophobes, à l’instar de leurs commentaires à l’égard des enfants nés de couples homosexuels en 2015.
Alors que la maison italienne connaît un ralentissement économique en Asie du Pacifique (qui représentait encore 25 % du chiffre d’affaires global en 2018, avant de passer à 22 % en 2019), ses défilés continuent avec plus de discrétion à Milan, où le marché est resté stable. Le moment est venu pour elle de prendre des mesures stratégiques.
En 2019, Dolce & Gabbana s’ouvre et étend sa gamme de tailles jusqu’au 50, devenant ainsi l’une des rares maisons de luxe à s’engager pour une mode plus « inclusive ». Un an avant que les premiers mannequins toutes morphologies n’arrivent sur les podiums de la Fashion Week de Paris grâce à la marque d’Ester Manas.
Le mariage de Kourtney Kardashian
En 2021, nouveau lifting. Loin d’être de grands défenseurs des droits LGBT+, Stefano Gabbana et Domenico Dolce s’associent à Harris Reed pour habiller la top model Iman au Met gala. Connu entre autres pour avoir fait porter une robe en crinoline à Harry Styles en Une de Vogue, l’actuel directeur artistique au style « genderfluid » de Nina Ricci est jeune, flamboyant et surtout, ouvertement homosexuel.
Dolce & Gabbana marque des points, et transforme l’essai en 2022. En février, elle annonce bannir de ses collections la fourrure animale. Deux mois plus tard, elle s’associe à un évènement médiatique d’envergure : le mariage de Kourtney Kardashian et Travis Baker.
De la robe de mariée à la tenue des invités, en passant par celles des employés du port de Portofino où la cérémonie a été fêtée en grande pompe : tout le monde portait du Dolce & Gabbana. Impossible de connaître la somme exacte de ce juteux partenariat (le Daily Mail table sur plusieurs millions de dollars).
La publicité pour la marque, elle, est plus mesurable. Pendant plusieurs jours, le logo D & G – niché jusque dans des coussins et serviettes de ce week-end fastueux – s’est déversé sur les réseaux sociaux et dans la presse, aux quatre coins du monde. Une revanche pour le clan Kardashian, traité de « famille la plus cheap du monde » par les deux Italiens en 2018.
Kim Kardashian et Madonna rejoignent le navire
Un beau coup de com pour eux, qui renouvellent l’expérience la même année en collaborant avec l’aînée des cinq sœurs autour d’une collection baptisée « Ciao Kim ». Les pièces ont été choisies par la star de la téléréalité, suivie par 358 millions d’utilisateurs sur Instagram, dans les archives de la maison des années 1987 à 2007.
Les retrouvailles avec la star signent aussi celles avec le monde des people. En 2024, Katy Perry, Christina Aguilera, Maluma étaient à la grande fête en Sardaigne des dix ans de l’Alta Moda, version italienne de la Haute Couture selon Dolce & Gabbana. Cher, Demi Moore, Naomi Campbell, Anitta et Lupita Nyong’o, au lancement à Milan de la rétrospective dédiée à la marque, la même qui est arrivée au Grand Palais ce jeudi.
Clou du spectacle l’an passé, quand Dolce & Gabbana décroche le Saint-Graal : Madonna. Ennemie de longue date des deux hommes, la star est apparue provocatrice et sexy sous un voile dans une tenue en dentelle noire au premier rang d’un défilé qui lui était dédié, en septembre.
Une affaire écrite dans la durée ? Un bref coup d’œil à Colin Farrell, Dwayne Johnson, Amy Adams, Dakota et Elle Fanning sur le tapis rouge des derniers Golden Globes (ou à leur after party), en ce mois de janvier, nous laissent en tout cas penser que Dolce & Gabbana s’est bien refait une beauté.
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