« De l’appropriation culturelle » : Danny Boyle ne referait plus le film qui lui a valu deux Oscars
CINEMA – « On ne pourrait plus faire ça aujourd’hui. […] Et c’est normal ». C’est de manière lucide que Danny Boyle est revenu sur son immense succès, Slumdog Millionaire, dans une interview au journal The Guardian. Et notamment sur le fait d’être un réalisateur britannique sur un film se passant en Inde.
Le film, sorti en 2008, racontait l’histoire d’un jeune garçon orphelin et issu des bidonvilles de Mumbai, sur le point de remporter la version indienne de « Qui veut gagner des millions », mais rattrapé par son parcours et ses origines. Acclamé de façon quasi unanime par la critique, avec les Oscars de meilleur film et de meilleur réalisateur – parmi d’autres -, le film avait néanmoins fait débat en Inde et au sein des communautés indiennes, afin de savoir si le film aurait eu le même succès s’il avait été l’œuvre d’un réalisateur local et non occidental.
Une question à laquelle semble ouvert Danny Boyle, près de 17 ans après la sortie de son film. « Il est temps de réfléchir à tout cela. Nous devons examiner le bagage culturel que nous portons et l’empreinte que nous avons laissée sur le monde », explique le réalisateur dont le nouveau film, 28 ans plus tard, est en salles en France depuis ce mercredi 18 juin.
« Vous restez un étranger »
Lorsque The Guardian demande à Danny Boyle si Slumdog Millionaire était une forme de colonialisme, sa réponse va plutôt dans le même sens, tout en justifiant sa démarche de l’époque. « Non, non… Enfin, seulement dans le sens où tout l’est. À l’époque, cela semblait radical. Nous avions décidé que seule une poignée d’entre nous irait à Mumbai. Que nous travaillerions avec une grande équipe indienne et nous essaierions de faire un film au sein de la culture. Mais vous restez un étranger. C’est toujours une méthode imparfaite ».
Plus encore, Danny Boyle l’affirme : « Je suis fier du film, mais on n’envisagerait même pas de faire quelque chose comme ça aujourd’hui. Il ne serait même pas financé ». S’il explique « ce genre d’appropriation culturelle peut être considéré comme acceptable à certaines époques, mais pas à d’autres », cela ne l’empêche d’ajouter qu’aujourd’hui, même s’il était impliqué dans un tel projet, il « chercherait un jeune réalisateur indien pour le tourner ».