La première superstar de l’histoire était française, et cette comédie le lui rend bien
CINÉMA – On la surnommait « l’Unique », mais aussi « l’Enchanteresse » et même « la Monstrueuse ». Ce mercredi 18 décembre, ce sera Sarah Bernhardt, la Divine, d’après le titre du très amusant biopic de Guillaume Nicloux dédié à la célèbre comédienne française, considérée par beaucoup comme la première superstar mondiale de notre histoire.
Dans le rôle-titre ? Sandrine Kiberlain. La Sarah Bernhardt qu’elle campe a le melon, certes. Mais c’est une femme libre, parfois révoltée, drôle et exubérante le plus souvent. Son point fort : les punchlines. « Je suis tellement fatiguée que je pourrais bailler en dormant », ironise-t-elle, entre deux moqueries.
Pas question, dans ce film, de revenir sur la genèse du personnage, disparu il y a un peu plus de cent ans. Ni sur ses pièces fétiches, comme La Dame aux camélias d’Alexandre Dumas ou Ruy Blas de Victor Hugo. Ce serait trop long. Pendant ses soixante ans de carrière, Sarah Bernhardt a endossé plus de 140 rôles, faisant d’elle la reine du drame.
À la place, Sarah Bernhardt, la Divine nous renvoie à plusieurs éléments marquants de sa vie : sa liaison avec Lucien Guitry, son amputation de la jambe (qui ne l’empêchera pas de jouer, mais désormais elle le fera assise) et la « Journée Sarah Bernhardt ». Organisé par une poignée d’amis en 1896 à la gloire de l’actrice, cet évènement fastueux digne d’un couronnement, a rassemblé le Tout-Paris.
Découvrez ci-dessous la bande-annonce :
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La diva n’a jamais fait les choses à moitié. Excentrique jusqu’au bout des doigts, elle est aperçue dans le biopic avec ses animaux de compagnie, des aspics. Une scène plus tard, elle demande qu’on lui greffe une queue de panthère. On ne sait pas si c’est vrai, mais l’idée colle à l’image de cette femme, qui a toujours cultivé sa différence.
Sarah Bernhardt, l’originale
Même chevelure rousse, même allure filiforme… Sandrine Kiberlain est restée fidèle à l’apparence de Sarah Bernhardt, qui – loin des canons de beauté de l’époque (un « beau brin de fil », selon Alexandre Dumas) – s’est toujours couverte de bijoux et fourrures, refusant toute sa vie d’enfiler une crinoline, vêtement le plus tendance de son temps.
Digne d’Isabelle Huppert dans Dix pour cent, Sarah Bernhardt débordait d’énergie. Elle était avide d’aventures inédites, soucieuse de repousser sans cesse les frontières de son expérience de comédienne. Elle avait une soif insatiable d’originalité, aimait innover et se détacher des vieilles traditions.
Ce qui pouvait parfois surprendre. « Maintenant, laissez-moi. Il faut que je me quitte », lance-t-elle à son entourage dans la bande-annonce du film pour entrer dans son personnage avant de monter sur scène. Une intransigeance qui n’a pas été pas sans conséquence. Comme dans le biopic, on raconte qu’elle pouvait être odieuse, voire tyrannique, y compris avec ses amis.
Edmond Rostand, Victor Hugo (qu’elle considérait comme un père), la peintre Louise Abbéma… Sarah Bernhardt a baigné dans le star-système, entourée des people les plus bankables. Sa vie sentimentale, elle, était digne d’un mélodrame. Si le film fait abstraction de son mariage avec l’acteur grec Aristides Damala, il n’omet pas de décrire la cour de la comédienne où se croisaient ses admirateurs et courtisans.
Sarah Bernhardt, la révoltée
Elle avait la célébrité hégémonique. Même si elles ont existé, ses rivales ont été éclipsées, raconte l’historienne des arts du spectacle Claudette Joannis dans une biographie de l’artiste. En pleine rue, on lui demandait un autographe. C’était inédit. On l’aimait, autant qu’on la détestait. De quoi la convaincre d’engager un garde du corps.
La star de jadis et celles de notre époque ont plus d’un point commun. On a vu les grands couturiers se presser pour l’habiller, comme Louis Vuitton, derrière la conception des 200 malles avec lesquelles elle est partie pour sa première tournée mondiale. La Française était adoubée à l’étranger, et notamment aux États-Unis, pays qu’elle a traversé à bord d’un train privatisé. Rien que ça.
Derrière ces goûts de luxe se cachait pourtant une femme révoltée. Le biopic de Guillaume Nicloux ne revient pas sur son coup de gueule contre la Comédie Française ni sur celui qu’elle a poussé dans un paquebot américain pour en dénoncer les conditions sociales. Il met toutefois en lumière son soutien indéfectible à Dreyfus, au risque de déplaire ou de se mettre le show-business et la société à dos. Un engagement dont ne peuvent passe vanter tous nos people d’aujourd’hui.
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