Malgré ses qualités, le premier blockbuster chinois du jeu vidéo n’échappe pas au bad buzz
JEUX VIDÉO – Des dessous peu reluisants. Événement vidéoludique de la rentrée, le jeu chinois Black Myth : Wukong met presque tout le monde d’accord depuis son arrivée sur le marché, le 20 août dernier.
Graphismes époustouflants, gameplay réjouissant, inspiration d’un mythe fondateur de la culture chinoise… : les critiques de la presse spécialisée et des joueurs sont très bonnes, sans être unanimes, sur les qualités de ce blockbuster conçu par le développeur indépendant chinois Game Science, presque inconnu jusqu’alors.
Considéré comme le premier « AAA » (un terme désignant les superproductions du jeu vidéo comme Assassin’s Creed ou GTA) de l’industrie chinoise, cette proposition offre au passage une concurrence non négligeable à l’un des derniers chefs-d’œuvre du jeu vidéo Elden Ring.
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Toutefois, le concert de louanges dont profite actuellement ce jeu, où l’on incarne le Roi Singe Sun Wukong (personnage issu du classique de la littérature chinoise La Pérégrination vers l’Ouest ou Le Voyage en Occident selon les traductions) amené à combattre une tripotée d’ennemis plus puissants les uns que les autres, se heurte à une polémique surprenante.
« N’incluez pas de propagande féministe »
Dans l’industrie du jeu vidéo, il est de coutume d’offrir aux streamers et autres influenceurs spécialisés un accès anticipé afin de tester le jeu avant sa sortie, assurant ainsi une promotion à bas coût pour une visibilité décuplée. Sauf qu’il y a un hic, comme le souligne The Guardian dans un article publié ce mercredi 28 août.
Dans les consignes envoyées aux influenceurs, plusieurs demandes ont particulièrement surpris ces derniers : « N’incluez PAS de politique, de violence, de nudité, de propagande féministe, de fétichisation et d’autres contenus qui incitent à un discours négatif. N’utilisez PAS de mots déclencheurs tels que “quarantaine”, “isolement” ou “Covid-19”. N’évoquez PAS de contenu lié aux politiques, opinions, actualités, etc. de l’industrie du jeu en Chine. »
En France, le streamer ExServ a été l’un de ceux qui ont publiquement parlé de ces sujets érigés au rang de tabou. Au point de refuser de parler plus en détail de Black Myth : Wukong en raison de la « censure » imposée à demi-mot par le studio, et donc indirectement par les autorités de régulation chinoises.
Le créateur de contenu aux 200 000 abonnés sur YouTube explique avoir vu sa demande d’accès anticipé au jeu refusé, avant de finalement recevoir une clé de test soumise à « l’acceptation d’un document de conditions, de choses à faire et ne pas faire ». Et même s’il ne s’agit pas d’un contrat qui engage légalement le youtubeur, celui-ci refuse de céder à cette pratique « honteuse ».
« En 15 ans de métier je n’ai jamais vu ça […]. Quel scandale de dire des trucs pareils… Depuis quand c’est de la propagande de parler de féminisme et des droits des gens ? », ironise-t-il, tout en reconnaissant que des consignes envoyées aux joueurs testeurs sont courantes.
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Dérive inquiétante
Alors que Black Myth : Wukong a réalisé 10 millions de ventes sur PC et PS5 trois jours après sa sortie, selon son éditeur, des créateurs de contenu comme ExServ s’inquiètent que le premier blockbuster chinois de l’industrie ne soit que la première pierre d’une pratique amenée à se généraliser à l’avenir. Sachant que la presse et les critiques traditionnels du secteur du jeu vidéo ne semblent pas avoir été soumis à ces consignes, comme le mentionne The Guardian. Ce que confirme le site spécialisé PC Gamer.
Concernant les restrictions sur « la propagande féministe », le journal britannique et Le Monde soulèvent un détail important expliquant, sans doute, la volonté du studio de faire taire toute critique. Sur les réseaux sociaux circulent en effet des déclarations sexistes de cadres du studio Game Science, ainsi que des affiches de recrutement problématiques publiées par l’entreprise en 2015. Des accusations répertoriées en novembre dernier par le site IGN, évoquant « des images et des titres qui pointaient du doigt une culture de sexisme enracinée » dans l’entreprise.
En Chine, le régime n’a pas manqué de réagir à ces critiques écorchant la « success story » de ce studio habitué aux jeux mobiles avant de parvenir à réaliser un titre de l’ampleur de Black Myth : Wukong. Après avoir défendu corps et âme la réussite du jeu, les autorités et médias d’État chinois s’en sont pris aux médias occidentaux, accusés d’instrumentalisation pour critiquer Pékin.
« Leur stratégie d’attaque contre le jeu n’est rien d’autre que la même vieille tactique occidentale : politiser chaque réussite chinoise, même dans le domaine du jeu », lâche par exemple le Global Times. Le Monde signale également la suspension de 138 comptes ouvertement critiques sur le réseau social Weibo, l’équivalent chinois de X/Twitter. Preuve qu’il vaut mieux apprécier le jeu… ou passer son tour et se taire à jamais.
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