Culture

On a parlé avec Leïla Bekhti d’éducation pour la sortie de ce film sur Maria Montessori

CINÉMA – Des écoles Montessori, beaucoup connaissent (vaguement) la méthode d’apprentissage. Sa fondatrice, moins. Ce mercredi 13 mars, la réalisatrice Léa Todorov, connue surtout pour ses documentaires (dont un sur l’éducation dans l’entre-deux-guerres), tente d’y remédier avec la sortie au cinéma d’un film réussi sur le destin hors-norme de l’Italienne : La nouvelle femme.

L’histoire nous cueille en 1900, à Paris. Lily d’Alengy, une courtisane de la capitale jouée par Leïla Bekhti, est au sommet de sa gloire auprès des hommes. Mais un beau jour, son passé refait surface : Tina, une enfant avec un handicap né en catimini d’une ancienne liaison, lui revient après la mort d’un proche, qui s’en occupait jusque-là.

Que faire d’elle ? Personne ne doit savoir qu’elle a eu un enfant en secret. Et encore moins un enfant « déficient » aux yeux de la société. Lily ne doit courir aucun risque. Elle décide de quitter Paris pour Rome, où un logement l’attend. Là-bas, elle fait la rencontre de Maria Montessori (Jasmine Trinca, dans le film).

Découvrez ci-dessous la bande-annonce :

La chirurgienne – l’une des premières femmes à être diplômée de médecine en Italie – œuvre depuis plusieurs années à l’élaboration d’une approche éducative précurseure pour enfants présentant une déficience mentale ou physique. « Je ne savais pas qu’elle avait commencé comme ça », nous souffle Leïla Bekhti, que nous avons rencontrée.

Aux origines de la « méthode Montessori »

Si la fiction de Léa Todorov raconte d’abord l’histoire vraie d’une femme indépendante et ambitieuse qui s’est battue pour accéder aux hautes sphères d’un monde scientifique et intellectuel dominé par les hommes, La nouvelle femme dépeint aussi avec délicatesse les débuts de la fameuse « méthode Montessori ».

L’idée ? Laisser les enfants apprendre « seuls » grâce à des objets pédagogiques avant-gardistes mis à leur disposition pour qu’ils expérimentent concrètement certains concepts, comme la lecture, l’écriture ou les mathématiques. Le but in fine étant de leur permettre d’intégrer la vie civile plus tard comme tout le monde.

« C’est important d’inclure les personnes en situation de handicap dans la société, estime Leïla Bekhti, pour qui la mixité sociale dans laquelle elle a été éduquée en banlieue parisienne a été essentielle dans sa construction personnelle. Je n’ai pas envie que mes enfants vivent dans une forme de bulle. C’est une chance de pouvoir grandir dans la différence. »

Un succès à relativiser

Dans les faits comme dans le film, les démarches de Maria Montessori auprès des élèves dits « déficients » ont été concluantes et l’ont poussée à élargir son champ d’études à tous les enfants. En 1907, elle ouvre la première Maison des enfants (Casa dei Bambini) à Rome, dans le quartier populaire de San Lorenzo. Et très vite, son succès dépasse les frontières du pays. Elle est notamment accueillie en vedette lors d’un congrès aux États-Unis, en 1913.

Aujourd’hui, le pays de l’Oncle Sam compte plusieurs milliers d’écoles à son nom. Le signe d’un engouement pour sa méthode qui ne démord pas (y compris en Europe), mais qui ne séduisent pas forcément tous les parents. « Il y a des choses à prendre, d’autres moins », concède Leïla Bekhti.

Avant de préciser : « Parfois, on est un peu dans le cliché, en pensant que cette pédagogie se résume à ne pas dire ’non’ à un enfant. Je ne pense pas que ça consiste en ça. En tout cas, moi, cette pédagogie où il ne faut jamais leur dire ’non’, ce n’est pas chez moi. » Au fond, continue-t-elle, c’est comme partout : « Il m’est arrivé d’entendre parler d’écoles privées très chères, mais qui n’étaient pas forcément bien. »

Leïla Bekhti : « La jeunesse, l’avenir d’un pays »

La méthode Montessori mise en lumière dans La Nouvelle femme repose sur des fonctionnements bienveillants, basés sur l’observation et la coopération, pas la compétition. Des principes « qu’on devrait mettre en place davantage dans l’enseignement, pas seulement pour ceux qui peuvent payer des écoles privées à leurs enfants », abonde Leïla Bekhti.

Elle juge nécessaire que toutes les écoles bénéficient des mêmes moyens, de bonnes infrastructures et d’un enseignement de qualité : « L’éducation est un sujet tellement important. La jeunesse, c’est l’avenir d’un pays. Il faut penser et essayer de trouver des solutions de sorte qu’un enfant, quel que soit le niveau de vie de ses parents, puisse avoir les mêmes chances que les autres. »

À l’heure des débats sur les disparités entre enseignement publique et privé en France, les mots de Leïla Bekhti résonnent. La comédienne n’entend en revanche pas faire de la politique, mais elle conclut « qu’à partir du moment où on veut pour les enfants des autres ce qu’on veut pour nos enfants, on aura déjà fait un pas en avant ».

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