Culture

Pourquoi le procès de Bastien Vivès n’est finalement pas allé à son terme ce mardi

JUSTICE – Ce n’est pas la fin de l’affaire, mais les associations de défense des droits de l’enfant regrettent une perte de temps. Mis en cause par la défense, le tribunal correctionnel de Nanterre s’est déclaré ce mardi 27 mai « territorialement incompétent » pour juger l’auteur de bande dessinée Bastien Vivès, accusé d’avoir réalisé des dessins à caractère pornographique de mineurs dans deux de ses albums.

Bastien Vivès, 41 ans, devait comparaître à Nanterre mardi et mercredi pour « fixation et transmission en vue de la diffusion d’images à caractère pédopornographique », un délit passible de cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. Les éditions Les Requins Marteaux et Glénat, qui ont publié les deux albums incriminés, comparaissaient, elles, pour diffusion de l’image d’un mineur présentant un caractère pornographique.

Mais la défense a mis en cause la capacité juridique du tribunal de Nanterre à se saisir de cette affaire et a fini par convaincre.

Affaire renvoyée au parquet

« Aucune pièce du dossier ne permet de dire » que les faits poursuivis « se sont tenus dans les Hauts-de-Seine », a relevé la présidente Céline Ballerini. Le tribunal de Nanterre, qui était saisi d’une demande en ce sens de la défense, se déclare donc « incompétent » et « renvoie l’affaire au parquet », a ajouté la magistrate.

« C’est la fin provisoire d’un procès en sorcellerie », s’est félicité devant la presse l’avocat du dessinateur, Me Richard Malka, se disant « extrêmement satisfait de cette décision ».

Lors de l’audience, Richard Malka a longuement insisté sur « le vide abyssal » de ce dossier, dans lequel « aucune pièce » ne permettait « de caractériser l’infraction dans les Hauts-de-Seine », qu’il s’agisse de Bastien Vivès ou de ses maisons d’édition. « Aujourd’hui, il n’y a plus aucune affaire Vivès », a-t-il même soutenu.

D’après lui, c’est la 17e chambre du tribunal judiciaire de Paris, spécialisée dans les affaires de presse, qui aurait dû traiter ce dossier. C’est notamment là que sont jugées les affaires de diffamation.

En janvier 2023, une enquête avait été ouverte à la suite d’une plainte de plusieurs associations de protection de l’enfance. Elle visait trois ouvrages de Bastien Vivès : Les Melons de la colère (paru en 2011), La Décharge mentale (2018) et Petit Paul (2018). Ce sont ces deux derniers albums qui devaient être au cœur des débats.

Petit Paul, objet déjà de deux signalements en 2018 et 2020 classés sans suite par le parquet de Nanterre, met en scène un enfant au pénis démesuré ayant des relations sexuelles avec des femmes majeures. La Décharge mentale évoque un homme ayant des relations sexuelles avec de jeunes filles mineures.

Dans sa plainte, l’association Fondation pour l’enfance dénonçait des « représentations de mineurs dans des situations sexuellement explicites, présentant indubitablement un caractère pornographique », ce que la défense n’a cessé de démentir.

Pas « d’incitation » ou « d’apologie

Resté silencieux avant l’audience, Bastien Vivès s’est finalement exprimé devant la presse à la sortie, réaffirmant n’avoir jamais, dans ses ouvrages, fait « d’incitation » ou « d’apologie » de la pédocriminalité, mais avoir rédigé des albums inscrits « dans la tradition de la BD humoristique ». « Je suis un artiste. Je suis là pour interroger des zones grises, donner à réfléchir, je ne suis pas militant », a-t-il ajouté, très ému.

Lors de l’audience, Me Cécile Astolfe, qui défend la Fondation pour l’enfance, avait insisté sur l’importance de la préservation de la liberté d’expression avec « un contrôle de proportionnalité », estimant que les images peuvent constituer « des tremplins au passage à l’acte ». « L’art n’est pas au-dessus des lois », avait-elle également rappelé.

Trois autres associations, L’enfant bleu, Innocence en danger et Face à l’inceste, s’étaient également constituées partie civile dans l’affaire.

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