Culture

Si vous allez à Orsay, vous pourrez suivre en direct la restauration de ce chef-d’œuvre

ART – 7 mètres de longueur, 3 mètres de large, pour une œuvre qui a profondément transformé l’histoire de l’art. « Un enterrement à Ornans » (1850) est une peinture unique dans l’œuvre de Gustave Courbet. Mais ces près de 21 m2 de couleurs et de détails présentent un défi immense : celui de la restauration d’un tel tableau, qui ne peut être qu’un chantier colossal.

Or, si l’œuvre de Courbet n’avait fait l’objet « d’aucune intervention importante depuis au moins un demi-siècle », son état de présentation n’était plus « jugé satisfaisant » par le Musée d’Orsay, où il est exposé depuis son ouverture en 1986. Ainsi, l’établissement a décidé de faire de sa restauration un événement à lui seul, rarissime dans le monde de l’art : l’ouverture de ce chantier au grand public.

En 2014, le Musée d’Orsay avait déjà lancé la rénovation publique d’un autre chef-d’œuvre de Gustave Courbet, « L’Atelier du Peintre ». Cette initiative visait à sensibiliser aux enjeux d’une restauration artistique – et à solliciter des fonds pour une campagne de financement participatif. L’établissement réitère l’expérience, avec encore une fois un protocole très précis et strict.

Cette rénovation, qui doit durer entre 12 et 18 mois, se déroulera ainsi au sein d’un espace clos spécialement aménagé au rez-de-chaussée, où le tableau est habituellement accroché. Le chantier a été isolé par une palissade dotée de baies vitrées, qui permettra au public de suivre en direct le travail des restaurateurs.

Surtout, des visites commentées de cette restauration seront proposées gratuitement au public à partir du 5 juin prochain. Et ce, chaque jeudi matin, à 9 h 45, 10 h 30 et 11 h 15, annonce le musée dans son communiqué.

Rendre à la toile sa taille d’origine

Ces visites seront l’occasion de redécouvrir l’une des plus belles œuvres de Gustave Courbet. « Un enterrement à Ornans » est un « tableau majeur des collections du musée d’Orsay », explique Sylvain Amic, président de l’établissement. Il « n’a jamais fait l’objet d’une restauration fondamentale et n’est aujourd’hui plus lisible à la hauteur du choc qu’il a suscité » lorsque le public du XIXe siècle l’a découvert.

Plus en détail, les couches successives de vernis ont opacifié les couleurs, selon les restaurateurs, nécessitant donc un travail d’orfèvre afin de retrouver les nuances d’origine. Le support de la peinture, le châssis, a également été déformé par le poids de l’œuvre, ce qui a pour conséquence un relâchement de la toile.

Mais ce projet doit également permettre d’étudier un autre point : rendre à l’œuvre de Courbet sa taille d’origine. En effet, les multiples expositions et déplacements de la peinture ont eu pour conséquence d’abîmer l’œuvre sur ses bords. « C’est quelque chose qu’on va examiner effectivement. On sait que le format de l’œuvre a été modifié puisque quand on la voit décadrée, on voit que la composition se prolonge sur au moins trois des bords de l’œuvre », explique Anne Robbins, conservatrice peinture au Musée d’Orsay, auprès de France Culture.

Une œuvre qui avait fait scandale

Cette restauration ouverte sera l’occasion pour le grand public de revisiter une œuvre qui avait fait profondément polémique lors de sa première exposition, en 1850. « Elle a fait scandale par son sujet et son format, parce que c’est la première fois qu’une scène aussi banale, aussi ordinaire, très anecdotique – un enterrement à la campagne – est traitée sur un format aussi monumental, qui à l’époque était réservé aux grands genres (scènes historiques, scènes mythologiques) » , poursuit Anne Robbins.

Gustave Courbet avait ainsi refusé d’idéaliser les personnages de son œuvre, qualifiés « d’ignobles » par certains critiques qui se déchaînent sur les « trognes » de deux bedeaux « aussi rouges que leurs vêtements », raconte la spécialiste. Les prémices d’un courant artistique qui marquera la seconde partie du XIXe siècle : le réalisme, que l’artiste voulait voir comme « la mise à mort du romantisme ».

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