Voici six livres pour comprendre et parler de la guerre avec les plus petits
GUERRE – À la radio, à la télévision, sur les kiosques, dans les conversations des adultes… La guerre est présente dans le quotidien des enfants, même ceux qui ne la vivent pas de plein fouet. Certains la vivent à distance, par proches interposés. D’autres attrapent des bribes d’informations au gré de l’actualité. Les enfants posent des questions ou bien les gardent pour eux. Mais elles existent dès le plus jeune âge.
Voici une sélection de livres réalisée par Stéphanie Khoury , bibliothécaire jeunesse en Gironde, pour aborder avec les enfants ces questions et ces concepts, compliqués à comprendre chez les tout petits.
• Petit-Bleu et Petit-Jaune, le « Roméo et Juliette des couleurs »
À partir de 2 ans.
Publié pour la première fois en France en 1970, Petit-Bleu et Petit-Jaune est un classique de la littérature pour enfants. Il raconte l’histoire d’une amitié entre une petite tâche bleue et une petite tâche jaune. Mais un jour, alors qu’ils sont heureux de se retrouver pour jouer, ils s’embrassent et deviennent verts. Ce qui ne va pas plaire à leurs parents.
« C’est vraiment pour les tout petits. C’est le Roméo et Juliette des couleurs ! Ce n’est pas sur la guerre à proprement parler – mais je ne pense pas que les bébés posent vraiment des questions sur la guerre. Il est souvent cité sur les questions de conflit et avait été beaucoup mis en avant au début de la guerre en Ukraine. Il est souvent utilisé en maternelle, car il est aussi très efficace sur le mélange des couleurs. »
• Flon-Flon et Musette, une haie d’épines entre deux amis
À partir de 4 ans.
Toute la journée, Flon-Flon joue avec Musette, tantôt d’un côté du ruisseau, tantôt de l’autre. Mais un soir, le papa de Flon-Flon dit : « Mauvaise nouvelle ! La guerre va bientôt arriver. » Le lendemain, à la place du ruisseau, il y a une haie d’épines.
« Lui, je pleure à chaque fois que je le lis. C’est une autrice polonaise qui a écrit l’histoire de deux animaux qui sont amis. Et un jour, un mur est érigé. Leur amitié est brisée. Elle a un dessin hyper simple, l’écriture est brillante. La guerre est vraiment dessinée. C’est dur pour les deux petits et à la fin, il y a un retour à un état de paix. »
• La guerre et la paix, de Brigitte Labbé et Michel Puech (2022, Milan)
À partir de 6 ans.
Les collections « Mes goûters philos » et « Mes P’tites questions », aux éditions Milan, proposent des ouvrages très pédagogiques et très concrets sur différentes notions.
« Parfois, la fiction ne répond pas exactement aux questions des enfants. Au moment des “pourquoi”, “comment ça marche” etc, certains ont des interrogations très précises et on peut être un peu pris au dépourvu en tant qu’adulte. La collection des “Petites questions” chez Milan est très bien faite. Il y a La guerre et la paix, Le bien et le mal, des trucs sur les méchants, la démocratie… Ça peut donner des outils aux parents pour savoir comment expliquer certains concepts. »
En matière d’actualité, la bibliothécaire recommande aussi la presse pour les enfants, « hyper qualitative » et « qui explique très bien les choses, sur plein de sujets ». Elle cite notamment Mon petit quotidien, ou bien 1 jour, 1 actu et la collection Mes P’tits Docs.
• Dans le coeur, le regard d’une fillette libanaise
À partir de 6 ans.
L’autrice et illustratice raconte sa propre expérience de la guerre civile au Liban à travers le quotidien d’une fillette. Elle nous décrit ses peurs, les privations, son isolement, la fin de l’école et des jeux… Mais sa résilience, sa capacité à voir le bon côté des choses et sa volonté de vivre sont autant de messages d’espoir à l’attention « des enfants de la guerre ».
« Cet album me touche particulièrement. C’est le témoignage d’une fillette pendant la guerre au Liban, dans les années 80. Les illustrations sont des aquarelles, elles sont très douces. C’est à la fois dans le vécu du présent et dans la projection de : “un jour, ça ira mieux”. C’est très poétique sans que ce soit nunuche. Il y a une solidarité entre les enfants, les grands-mères, les tantes, une transmission intergénératonnelle qui peut faire penser à la relation de la fillette avec sa grand-mère dans Persepolis de Marjane Satrapi. Ce livre montre que les enfants n’ont pas besoin de cours de géopolitique sur le Proche-Orient pour être touchés. »
• L’ennemi, un album sur de l’absurdité de la guerre
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À partir de 6 ans.
Élaboré en collaboration avec Amnesty International, ce livre raconte l’histoire d’un soldat, embourbé dans une guerre dont il souligne l’absurdité. Il s’interroge sur le silence de son commandement et surtout sur l’autre, l’ennemi, celui que son manuel décrit comme une « bête sauvage ».
« J’aime beaucoup les deux auteurs. Serge Bloch a écrit pas mal de Max et Lili, dont l’un traite d’ailleurs des migrants, Max et Lili ont des copains réfugiés. L’ennemi est un album assez saississant. Il ne laisse pas indifférent. Il peut mettre un peu mal à l’aise, mais dans un sens positif. »
• Otto, l’autobiographie d’un ours en peluche
À partir de 7-8 ans.
Ce livre du célèbre illustrateur et auteur alsacien Tomi Ungerer est l’autobiographie d’un ours en peluche. Celui de David, un petit enfant juif allemand. Au gré de son parcours on traverse durant plusieurs décennies la Seconde Guerre mondiale, en Europe, puis les États-Unis. L’ouvrage permet d’aborder avec les enfants la guerre, la déportation et la violence, mais aussi l’amitié, l’entraide et la tolérance.
« La guerre et la paix sont des thématiques qui traversent toute l’oeuvre d’Ungerer. On aurait pu citer aussi Le nuage bleu, qui raconte l’histoire d’un nuage qui se sacrifie pour que la paix arrive sur Terre. Otto est destiné à de plus grands enfants. C’est l’histoire d’une peluche qui vit toutes les guerres du XXe siècle. J’aime beaucoup cet album, car on voit vraiment des morts, c’est un peu gore. Même si la mort, les enfants, parfois, ça les fait un peu rire. »
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