Economia

Bayrou, Sénat, Société générale… on vous explique le scandale fiscal Cumcum

ÉCONOMIE – « Cum » un soupçon de fraude fiscale dans l’air. Lors de la séance de questions au gouvernement ce mardi 24 juin, le Premier ministre François Bayrou a été interpellé par plusieurs députés, dont Charles de Courson (Liot), particulièrement en pointe sur les sujets économiques et financiers, notamment cette affaire « CumCum ».

Hasard du calendrier, c’était également ce mardi que les bureaux parisiens et luxembourgeois de la Société Générale ont été perquisitionnés dans le cadre d’une enquête du Parquet national financier, pour des soupçons de blanchiment présumé de fraude fiscale. Or, la banque française s’est justement retrouvée en mars 2023 autour d’une enquête du PNF sur le montage « Cumcum ». Explications.

Un système d’optimisation fiscal mondialisé

Dans le budget 2025 préparé par François Bayrou et adopté au forceps en janvier dernier, les sénateurs ont adopté un dispositif anti-fraude qui permet de lutter contre un mécanisme d’optimisation fiscale appelé « Cumcum ». Concrètement, ce dispositif permet à des actionnaires étrangers d’entreprises françaises de confier temporairement des actions à un tiers, comme au hasard une banque, et en échange d’une commission, pour échapper à l’impôt sur les dividendes. Ces derniers sont tout simplement les bénéfices que les entreprises reversent à leurs actionnaires chaque année.

Le nom de « cumcum » vient lui de la racine latine « cum » qui veut dire « avec ». On parle aussi parfois de scandale « CumEx » suivant les modalités du système d’optimisation, mais le principe reste dans tous les cas le même : que le fisc ne puisse pas vraiment identifier le détenteur d’une action afin de l’imposer.

Une enquête baptisée « CumEx Files » menée par plusieurs médias européens dont Le Monde en 2018, avait montré que plusieurs pays européens, dont la France, l’Allemagne ou la Belgique, ont perdu 55 milliards d’euros entre 2001 et 2017 à cause de stratégies d’optimisation fiscale et de fraudes avec la complicité de banques, d’avocats et de traders.

Les sénateurs s’estiment trompés

Revenons au budget 2025. Les sénateurs ont fait adopter un dispositif permettant de combler en partie cette « zone grise », en imposant que la retenue à la source s’applique aux « bénéficiaires effectifs » des produits distribués. Sauf que, visiblement le texte d’application émis par le gouvernement ne répond pas exactement aux enjeux de ce qui a été voté.

« Le gouvernement a prévu des textes d’application de la loi qui ouvrent une brèche dans laquelle les banques peuvent s’engouffrer pour continuer à frauder l’impôt », déplore ainsi depuis plusieurs mois le sénateur LR de Meurthe-et-Moselle, Jean-François Husson. Il accuse Bercy et le ministre de l’Économie, Éric Lombard, d’avoir cédé aux « lobbys bancaires » en prévoyant des cas de non implication de l’impôt. Selon le sénateur, les sommes en jeu sont considérables puisqu’« il y aurait désormais pour plus de 4,5 milliards d’euros de redressements en cours, avec des redressements qui datent du mois dernier et qui attestent que la fraude massive des banques continue ».

À l’inverse, Bercy estime que le texte publié « n’introduit aucune brèche dans le texte voté par le Parlement » et « apparaît au contraire nécessaire pour assurer la bonne application des dispositions législatives dans un cadre juridiquement sécurisé », au vu des « nombreuses interrogations reçues des contribuables ».

Face aux députés mardi, et dans un contexte où son gouvernement s’est engagé à faire 40 milliards d’euros d’économies l’année prochaine, François Bayrou n’a pu que promettre qu’il se pencherait lui-même sur les alertes du sénateur Husson.