L’Assemblée va enquêter sur les comptes publics, mauvaise nouvelle pour Macron et Le Maire
POLITIQUE – Le colonel Moutarde, à Bercy, à cause de sa surdité ? Ou le professeur Violet, à l’Élysée, avec le « quoiquilencoute » ? L’Assemblée nationale va se pencher sur les comptes publics et le dérapage du déficit français (à 6,1 % du PIB cette année, contre 4,4 % prévus par l’équipe précédente). Avec une question centrale : qui faut-il tenir pour responsable de cette trajectoire inquiétante ?
La conférence des présidents de l’Assemblée a effectivement validé, ce mardi 15 octobre, la procédure qui permet à la commission des Finances du palais Bourbon de récupérer certaines prérogatives pour se transformer en commission d’enquête. Concrètement, les députés membres de cette instance vont pouvoir auditionner et interroger les acteurs qu’ils souhaitent pour leur demander des explications, comme le réclamaient plusieurs élus ces derniers jours.
Une sorte de Cluedo parlementaire qui risque de ne pas être à l’avantage des gouvernements précédents. Depuis qu’il est arrivé à Matignon, Michel Barnier pointe sans cesse l’héritage des macronistes pour alerter sur une situation « extrêmement grave » et justifier ses décisions impopulaires. Bruno Le Maire, mais également Emmanuel Macron, se retrouvent donc sur le banc des accusés.
« Dissimulation » des comptes ?
L’ancien ministre de l’Économie est pointé du doigt par de nombreux parlementaires et dirigeants de l’opposition qui l’accusent d’avoir cherché à dissimuler l’état réel des comptes publics, ceci jusqu’au dernier moment et son pot de départ géant à Bercy. « Il y a eu de la part de la macronie a minima de l’amateurisme, et au pire, de la dissimulation et des mensonges dans la gestion des comptes publics », a par exemple estimé le président du Rassemblement national Jordan Bardella, lundi 14 octobre sur BFMTV.
Au-delà de ces attaques politiques, plusieurs enquêtes journalistiques montrent que Bruno Le Maire a au minimum tardé pour prendre en compte les alertes exprimées par ses propres services. Le 10 octobre dernier, par exemple, le journal de 20 heures de France 2 rappelait que plusieurs notes confidentielles (inquiètes) émises par Bercy ont été ignorées à partir l’automne 2023.
Pire, l’ancien ministre – qui a passé sept ans dans ses fonctions – n’a jamais accordé beaucoup de crédit aux parlementaires qui s’inquiétaient d’une feuille de route « insincère » à peu près au même moment. Nombre d’élus avaient effectivement fait remarquer que la trajectoire envisagée à l’époque par le gouvernement ne reposait que sur une série d’hypothèses toutes très favorables. Avec des « planètes qui s’aligneraient comme par enchantement », grinçait notamment Jean-François Husson, le rapporteur général (LR) de la commission des finances au Sénat, en octobre 2023. En vain. Car d’alignement, il n’y a pas eu.
Barnier espère « la vérité »
En réponse aux critiques récentes sur son bilan, l’entourage de Bruno Le Maire fait valoir au contraire que l’ancien ministre de l’Économie a réagi vite, en imposant 10 milliards d’euros d’économie dès le mois de janvier dernier, quand l’heure était encore au « quoi qu’il en coûte » présidentiel. De ce côté-là, on pointe plutôt la responsabilité de Gabriel Attal et d’Emmanuel Macron, lesquels ont refusé une loi de finances rectificative au printemps, un texte (aux propositions forcément impopulaires) mal vu à l’époque, à quelques encablures des élections européennes.
Voilà, en tout cas, une partie des enjeux qui seront au cœur de la commission d’enquête à l’Assemblée nationale. Ses travaux doivent encore être validés par un vote en commission des finances, ce mercredi matin. Une formalité (sauf surprise) vu les rapports de force en présence.
Interrogé sur le sujet ce mardi lors des « Questions au gouvernement », le Premier ministre Michel Barnier a dit espérer « la vérité » sur le dérapage budgétaire. « On a mal maîtrisé la sortie de crise » du Covid et de l’inflation, « et la réalité est aujourd’hui celle-là », a-t-il lancé devant les députés, en enjoignant les futurs enquêteurs à « déterminer les chiffres, les faits, la vérité et la dire aux Français. » Décidément, l’automne sera chaud en macronie.
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