Economia

Les pirouettes du gouvernement pour évoquer des hausses d’impôts (mais sans le dire)

POLITIQUE – Le gouvernement va-t-il augmenter les impôts ? Non. Enfin… Sans qu’il soit exclu d’utiliser le levier fiscal. Ou du moins, de promouvoir un « effort partagé ». Mais ce, sans faire exploser le taux de prélèvement obligatoire. En tout cas, à ce stade et jusqu’à preuve du contraire, bien que rien ne soit encore arbitré. Obscurs, ces éléments de langage sont répétés à l’envi par l’exécutif dans l’optique de la préparation d’un budget 2026, aux allures de mission impossible.

Et pour cause. Alors qu’il est question de dégager 40 milliards d’économies afin de rattraper la trajectoire du déficit (ce qui donne régulièrement lieu à une cacophonie au sein du « socle commun » soutenant le gouvernement), l’option fiscale, pourtant taboue en Macronie, revient inéluctablement dans le débat. Dans la mesure où il n’est pas non plus question de faire reposer l’essentiel des efforts sur la baisse de dépenses, qui plus est dans un contexte de dégradation des services publics. Résultat : ce qui devait arriver, arrive. Dans la semaine, Le Monde a révélé que « Bercy prépare les esprits à une nouvelle hausse des impôts en 2026 ».

Selon le quotidien du soir, le ministère de l’Économie « assume ce changement de tonalité, au nom du réalisme », ce qui fait déjà tousser au sein du « socle commun », de Renaissance aux Républicains, où l’opposition à cette hypothèse persiste. Invité ce jeudi 5 juin sur France 2, le ministre de l’Économie, Éric Lombard, a tenu à temporiser. « L’idée n’est pas d’augmenter les impôts », a-t-il assuré. « Nous voulons la stabilité fiscale, nous voulons la stabilité des prélèvements obligatoires. Ce que nous avons en France, ce n’est pas un problème de prélèvements obligatoires, de niveau d’impôts. Il ne s’agit pas de les augmenter, c’est un problème de dépenses publiques », a-t-il insisté, avant d’ajouter une nuance lourde de sens.

« Plan d’ensemble »

« Il n’y aura pas de hausse d’impôt d’ensemble », a précisé Éric Lombard, indiquant donc implicitement que des mesures ciblées pourraient être prises, en parallèle de la réduction des dépenses. Ce que la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a également évoqué sur TF1 ce jeudi, indiquant que le levier fiscal faisait partie des outils que souhaite actionner François Bayrou. « Ça fait partie des sujets dont le Premier ministre a dit qu’il proposerait un plan global à la mi-juillet. On investigue. On a 58 % de nos richesses nationales qui sont consacrées à nos dépenses publiques. Il y a un vrai sujet, y compris dans la sphère sociale. On y travaille pour avoir un plan d’ensemble, pour montrer que l’effort est partagé par tous », a-t-elle répondu.

Dit autrement : l’exécutif ne renonce pas à l’idée de récupérer davantage de recettes. Ce qui pourrait passer par l’instauration d’une « TVA sociale ». Ce mécanisme visant à augmenter la TVA afin de faire baisser les cotisations patronales, augmentant ainsi le salaire net des salariés tout en renflouant les caisses de l’État. Selon les estimations des spécialistes, une hausse de 1 point permettrait de faire rentrer entre 11 et 13 milliards d’euros. Ainsi, c’est la consommation qui permettrait de couvrir les dépenses sociales.

« Il y a une anomalie française, le travail finance trop la protection sociale. Le travail doit financer les risques associés au travail : les retraites, l’assurance chômage, les accidents du travail. Mais le travail n’a pas vocation à financer des risques universels, qui ne concernent pas que les travailleurs », a expliqué Astrid Panosyan-Bouvet. Sauf que, même si l’exécutif s’en défend, il s’agit bien là d’une mesure fiscale « d’ensemble », puisque la TVA touche tout le monde, sans différenciation. Raison pour laquelle la gauche, et le Rassemblement national et les partenaires sociaux sont opposés à cette mesure prônée par le Medef.

Autre piste sur le plan des recettes : la suppression de certaines niches fiscales. Ce qui va, mécaniquement, conduire à l’augmentation des impôts de ceux qui ont recours aux dispositifs dans le viseur de Bercy. Ou comment envisager, dans les faits, des hausses d’impôts. Mais sans le dire.