Economia

« Si Musk s’en va, j’en reprends une » : en Europe, difficile d’être fan de Tesla

AUTOMOBILE – « Musk j’en avais une opinion positive… Je pense qu’il est devenu fou ». Et puis, nazi ou pas, le salut n’a rien fait pour arranger des choses qui n’allaient déjà pas très bien. En 2024, le constructeur américain de voitures électriques Tesla a vu ses ventes fondre en Europe. Le geste « maladroit » de son patron, Elon Musk, le soir de l’investiture de Donald Trump début 2025, n’y est bien sûr pour rien. Mais il cimente une tendance lourde : la marque souffre des frasques du milliardaire et de son engagement politique.

François, conducteur pourtant enthousiaste de la marque, le reconnaît. « Il faut dissocier le produit de l’homme, mais je sais que c’est difficile, il s’est tellement identifié à la marque » avoue l’homme qui ne tarit pas d’éloge sur sa Model 3. Une chose l’inquiète d’ailleurs : la voiture est de plus en plus mal perçue dans l’espace public. Pas encore au point de changer de véhicule (ce qui ne déplairait pas à sa femme) mais « si les gens se mettent à taguer les Tesla », il pourrait changer d’avis.

Chute de 15 % des ventes

Cette défiance est-elle un vrai boulet pour la marque ? Certes, la voiture électrique dans son ensemble a souffert sur le continent européen, C’est le cas, par exemple, en Allemagne, avec la fin des aides à l’achat de véhicules vert. Mais en France aussi où le 100 % électrique a perdu du terrain, notamment par rapport à l’hybride, jugé souvent à un meilleur rapport qualité/prix.

Et dans ce tableau, Tesla a perdu du terrain par rapport à ses concurrents. Comme le fait remarquer le site spécialisé insideevs.com, le nombre de véhicules électriques vendus en Europe a baissé de 1,4 %… quand, sur un an, Tesla a vu ses ventes baisser de 15 %. La fameuse marque a donc ses propres problèmes.

Et s’il s’agissait, tout simplement, de son catalogue vieillissant en face d’une concurrence qui rattrape son retard ? En partie sans doute. Une nouvelle version du modèle Y, le best-seller de la marque, doit sortir en mars 2025, et un nouveau spécimen baptisé « Q » serait également dans les starting-blocks. Mais la « Tesla shame », ou la honte d’avoir (ou de vouloir avoir) une Tesla, s’est aussi répandue.

« I bought this before we knew Elon was crazy »

Depuis des mois, on s’arrache ainsi un autocollant devenu fameux. À coller à l’arrière de sa Tesla, il y est écrit : « Je l’ai achetée avant qu’on sache qu’Elon était dingue ». Avant qu’il ne licencie toute l’équipe de modération de Twitter, avant qu’il ne retweete un suprémaciste, avant qu’il ne pivote entièrement en faveur de la campagne de Donald Trump… Et avant, bien sûr, qu’il ne soit encensé par des nazis pour un geste, au mieux, très ambigu. « Je le mettrais bien moi aussi, confie François, mais il n’y en a pas assez ! ».

Pour certains, afficher son désaccord ne suffit plus. Wolfgang, propriétaire allemand d’une Tesla depuis deux ans, avait pourtant bien réussi à acheter le fameux sticker. « Et quand je l’ai montré à ma femme, elle m’a dit : “je préfère qu’on la vende ! ». Méfiant dès le départ devant la personnalité du milliardaire, ces derniers mois le font hésiter à suivre cet avis. Si Elon Musk n’arrête pas ses frasques, « je ne reprendrai pas une Tesla, c’est sûr. » Un sentiment partagé ailleurs en Europe.

Fin janvier, un programme de la télévision publique néerlandaise, EenVandaag, effectuait un sondage auprès des possesseurs de Tesla du pays sur leur rapport à la marque. Un tiers d’entre eux ont fait savoir qu’ils envisageaient de se débarrasser de leur véhicule à cause des prises de position d’Elon Musk. Le chiffre est d’une importance particulière : en Europe, les Pays-Bas sont le premier marché du constructeur.

« Que les actionnaires le forcent à la démission »

Outre-Manche, où Musk s’est également rapproché de l’extrême droite, c’est le site de référence electrifying.com qui s’est livré à une étude du même genre, mais cette fois sur les acheteurs potentiels : 60 % des participants ont répondu que son comportement faisait se porter leur choix sur la concurrence.

Ailleurs sur le continent, l’image de celui qui fait désormais partie du cercle rapproché de Donald Trump tend aussi à se mélanger avec celle de sa société automobile. En Pologne, après une nouvelle démonstration d’amitié entre Elon Musk et l’extrême droite allemande, le Premier Ministre polonais a ainsi déclaré qu’il n’y avait « aucune raison pour un Polonais sain d’esprit d’acheter une Tesla ».

En France et en Allemagne, François Bayrou et Olaf Scholz ont dénoncé avec force les agissements du Sud-Africain, sans pour autant nommer la fameuse marque. Le vent ne souffle pas dans la direction d’Austin, Texas, où la marque à son siège… Mais les dégâts ne sont pas irréversibles.

Comme l’ont montré bien des marques souffrant d’un déficit d’image, le retour en grâce est possible. François, comme Wolfgang, ne veut d’ailleurs qu’une chose : ne plus avoir à penser à Elon Musk. Pour le Français, « il suffit que les autres actionnaires le forcent à la démission » pour que disparaisse la « Tesla shame ». Wolfgang ne demande rien d’autre : « Si Musk s’en va, j’en repends une ».

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