Sur le « conclave » des retraites, cette réunion de la dernière chance semble mal engagée
ÉCONOMIE – Un dernier espoir. Pour éviter un échec cuisant après trois mois et demi de concertation, le « conclave » des retraites, qui devait s’achever mardi 17 juin, va finalement accueillir une ultime réunion le 23 juin. Certains partenaires sociaux hésitent toutefois à s’y rendre.
« On a surtout évité ce soir de dire qu’on a échoué », a expliqué Christelle Thieffinne, négociatrice de la CFE-CGC. « Et une dernière tentative, l’opération de la dernière chance a été tentée par l’animateur du conclave (Jean-Jacques Marette, médiateur dans les négociations entre patronat et syndicat) », a-t-elle poursuivi.
Certaines organisations syndicales n’ont cependant pas trancher sur leur participation. « J’irai devant nos instances (…) pour savoir si nous allons à la réunion qui a été proposée le 23 juin », a déclaré à la presse Diane Milleron-Deperrois, négociatrice du Medef, principale organisation patronale. « On n’a pas de bouclage financier ce soir » sur les mesures en discussion, « or le pays ne peut pas se permettre de dépenses supplémentaires », a-t-elle estimé.
Le Medef « très réservé »
Interrogé sur France 2 ce mercredi 18 juin, le patron du Medef Patric Martin s’est montré partiulièrement pessimiste, et « très réservé » concernant la présence de l’organisation patronale le 23 juin. « Nous n’étions pas demandeurs que cette réforme soit réexaminée. A bas bruit, certains sont en train de la détricoter. Or, notre pays a besoin de travailler plus et notre pays est en grande difficulté financière. Au rythme où vont les choses, rapidement nous ne pourrons plus payer les retraites », a-t-il estimé.
« On va réfléchir si on vient entièrement le 23, ou qu’au début, ou pas du tout », a pour sa part annoncé Pascale Coton, négociatrice de la CFTC, « en colère » devant la tournure prise par la concertation mardi.
Christelle Thieffinne, représentante CFE-CGC, doit elle aussi « en parler » à ses « instances, pour voir si nous venons lundi prochain ». « Mais le compte n’y est pas à mes yeux, car le but du conclave était d’équilibrer le système des retraites, et à mon avis, là, l’effort va reposer sur les retraités », a développé cette responsable.
« Lignes écarlates »
La CPME (patronat des petites et moyennes entreprises) devrait se poser lundi autour de la table des négociations, mais avec des « lignes rouges, voire écarlates », a nuancé Eric Chevée, son représentant.
« Dans la dernière ligne droite, tout ce qui a été impossible dans la journée – nous avons flirté avec l’échec – a été en partie ouvert », grâce à la médiation de l’animateur de la concertation Jean-Jacques Marette, a résumé Yvan Ricordeau, négociateur de la CFDT, pour revenir sur une journée de mardi longtemps bloquée avant le dénouement inattendu au cœur de la nuit.
Parmi toutes les propositions retenues par Jean-Jacques Marette pour dégager un accord, les mesures en faveur des femmes semblent les plus consensuelles, selon les participants. Les femmes qui ont eu des enfants verraient leur retraite calculée sur les 24 meilleures années (1 enfant), ou 23 meilleures années (2 enfants), d’après les indications fournies par les participants.
Sur la pénibilité, les termes de l’accord semblent plus confus. Pour répondre à une demande insistante de la CFDT, le patronat accepterait l’instauration d’un compte pénibilité – prenant en considération les manutentions manuelles de charge, les postures pénibles et les vibrations mécaniques – qui pourrait ouvrir, dans certains cas, à un départ anticipé en retraite.
Pour l’âge de départ sans décote, l’accord se ferait autour d’un âge abaissé à 66 ans et demi contre 67 ans et demi. L’âge de départ sans décote est l’âge auquel il est possible de partir sans pénalité, même si l’on n’a pas cotisé le nombre de trimestres exigés (172). Il semble acquis que le dispositif des carrières longues se voie alors restreint, et ne puisse plus bénéficier aux personnes ayant travaillé avant l’âge de 21 ans.
Instant de vérité
Pour parvenir à l’équilibre financier en 2030, la Contribution sociale généralisée (CSG) serait augmentée pour les retraités aux revenus moyens ou supérieurs, et les retraites pourraient être sous-indexées de 0,8 point par rapport à l’inflation en 2026, et 0,4 point en 2027. La prime sénior, évoquée en début de semaine par François Bayrou, serait quant à elle enterrée.
La réussite ou non de ce « conclave » est un instant de vérité pour François Bayrou, qui avait lancé ce nouveau format de discussions après un compromis noué avec les socialistes pour éviter une censure du gouvernement. L’idée de ce conclave était principalement de rendre moins impopulaire la réforme des retraites Borne de 2023, qui porte progressivement de 62 à 64 ans le départ à la retraite. Tout en visant l’équilibre financier, alors que le déficit du système est annoncé à 6,6 milliards d’euros en 2030.
Il ne reste plus que cinq partenaires sociaux encore présents : CFDT, CFTC, CFE-CGC côté syndical, Medef et CPME côté patronal. FO a claqué la porte dès la première réunion, la CGT et l’U2P (patronat des artisans) ont quitté le navire mi-mars.