Immobilier

À l’approche des JO, ces Parisiens font face à un marché locatif plus tendu que jamais

LOGEMENT – « C’est devenu une obsession. » Depuis cinq mois Melvyn, cadre de 24 ans, cherche désespérément un logement à Paris. Malgré son CDI et ses parents aisés qui se portent garants, il continue de camper chez le père d’une amie faute de trouver un appartement en solo ou une coloc.

Ils sont nombreux à subir cette situation à Paris, où le « marché locatif est très tendu depuis plusieurs années », selon Laetitia Caron, directrice générale de Particuliers à Particuliers, un site qui référence des annonces immobilières. D’autant plus qu’un nouveau facteur est venu accentuer ces difficultés : les Jeux Olympiques, qui se tiendront du 26 juillet au 11 août.

Alors que les prix des locations touristiques flambent pour cette période, la tentation est grande pour les propriétaires de récupérer leur logement pour le louer à des visiteurs. « Sur notre site, on observe une diminution de 28 % du volume de location sur cinq ans à Paris. Mais la baisse est particulièrement marquée entre 2022 et 2023, puisqu’elle est de 15 %. »

Un phénomène que l’on peut en partie imputer aux JO, selon la directrice générale de PAP, qui cite aussi la hausse globale des locations touristiques depuis plusieurs années, ainsi que la difficulté à acheter pour beaucoup de locataires qui ne libèrent donc plus leurs logements.

Alors qu’il était déjà très compliqué de trouver une location à Paris, cette conjoncture tend encore plus le marché locatif. Une situation difficile à vivre pour les personnes qui cherchent un appartement. Nous en avons interrogé trois.

« J’envoie au minimum dix messages par jour »

Ilham, quadragénaire habituée des recherches d’appartement, cherche à quitter son logement suite à un différend avec la personne qui lui sous-loue. Mais les recherches sont plus compliquées cette année. « N’importe qui vous demande deux ou trois mois de caution. On est un peu à la merci de pleins de choses », déplore celle qui enchaîne les mauvaises expériences lors des visites.

Face à la pénurie d’offres, la quadragénaire a eu affaire à des annonces pas toujours sérieuses. La dernière en date ? Un homme qui lui avoue que ses parents, propriétaires de l’appartement qu’il souhaite lui louer, sont en Afrique pour quelques mois et ne sont pas au courant de ses démarches… « J’ai l’impression qu’il y a de plus en plus d’annonces de ce type. » Suite à ces expériences, Ilham admet avoir développé une défiance et réduit ses critères de recherche, par peur de tomber sur « des gens farfelus ». Ce qui augmente ses difficultés.

Paul, 24 ans, a quitté son appartement du 15e arrondissement au début au mois de mars. Il avait commencé à chercher un nouveau logement il y a deux mois, sans succès. « J’envoie au minimum dix messages par jour. La plupart du temps, je n’ai pas de réponse. Je fais une ou deux visites par semaine en moyenne. Et quand j’envoie mon dossier, soit je n’ai jamais de réponse, soit on me dit que l’appartement est déjà pris », détaille le jeune homme, encore étudiant.

Une hausse des baux de mobilité

Melvyn vit peu ou prou la même situation, lui qui « envoie des demandes à la pelle ». « Quand on me répond, je ne sais même plus de quel appartement on me parle », constate celui qui se dit effaré par « la complexité pour trouver un appartement et des conditions qui sont mises en place ». Quid de l’impact des Jeux Olympiques ? Melvyn dit le soupçonner.

« Je pense que beaucoup de propriétaires souhaitent récupérer leur appartement pour le louer pendant les JO. Ce n’est pas explicite dans les annonces, mais ça se devine, explique-t-il. Les conditions sont parfois floues. La date de fin de certains beaux concorde plus ou moins avec le début des JO. »

Ilham, elle, peut confirmer cet impact puisque la personne qui lui sous-loue l’appartement lui a d’ores et déjà signifié qu’elle souhaitait le mettre sur Airbnb pendant les Jeux Olympiques…

De son côté, la directrice générale de Particuliers à Particuliers observe bien une augmentation des baux de mobilité, qui sont de courte durée, afin que les propriétaires « récupèrent leur logement au moment des JO ». « On est passé de 5 % à 11 % ces derniers mois sur l’ensemble de nos offres », détaille-t-elle.

La rentrée universitaire s’annonce difficile

Si bien que Melvyn ne prête plus vraiment attention aux détails des annonces : « Ça passe à la trappe. Je suis tellement désespéré que je ne regarde même plus la durée du bail. J’envoie tout de suite un message. »

Paul et Melvyn ont dû revoir leurs critères à la baisse. « Je cherche désormais dans tous les arrondissements, et même en collocation. Mon seul critère est d’être dans un peu plus de 16 m carrés. Je n’ai pas l’impression de demander la lune. Ne pas manger dans son lit est le minimum qu’on devrait garantir », nous glisse ce dernier.

Quant à Paul, il réfléchit à stopper ses recherches, et à reprendre une fois les Jeux Olympiques passés. « Mais si tout le monde fait comme moi, peut-être que ce sera tout aussi compliqué en septembre », hésite-t-il.

Laetitia Caron anticipe en effet une rentrée difficile avec « le goulot d’étranglement qu’est la rentrée universitaire, entre juin et septembre », une période où la plupart des appartements loués pour les JO ne seront pas encore de retour sur le marché.

À voir également sur Le HuffPost :