Immobilier

Encadrement des loyers: ce qu’il faut savoir pour obtenir le bon prix

IMMOBILIER – Il s’agissait de l’engagement n°22 du programme de campagne de François Hollande. Son objectif est d’apporter une solution aux loyers jugés trop importants dans les zones de tensions. Même avec des ambitions réduites – elle est annoncée comme un test -, cette loi est un événement. Le dernier exemple de contrôle des loyers en France remonte à 1948.

À partir du 1er août, les loyers parisiens seront encadrés selon des barèmes déterminés par l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne (Olap). A partir de 23.000 références de prix sur les 400.000 logements que compte la capitale, il a établi un prix moyen, dit de référence, pour 80 zones administratives. Ce dernier a ensuite été modulé en fonction du nombre de pièces du logement, de son année de construction et de son contrat de location (meublé ou non).

Les loyers des nouveaux baux pourront être majorés de 20% maximum par rapport à ce prix de référence, et ils ne pourront pas être minorés de plus de 30%. Les prix du marché feront sans doute l’objet d’une réévaluation annuelle.

Ces barèmes permettent déjà de définir quelques prix plafonds (hors charges) pour la capitale à garder en tête:

Tous les loyers qui ne rentrent pas dans les clous tombent sous le coup de la loi. D’après l’Olap, cela représente 20% des logements parisiens. En supposant que les bailleurs n’en retirent pas trop du marché, refroidis par la chute de rentabilité de leur bien…

Ces baisses devraient se répartir en trois grandes catégories: 1/3 de moins de 50 euros, 1/3 de plus de 50 euros et 1/3 de plus de 100 euros. « Typiquement, cela concernera les toutes petites surfaces ou les très grandes », estime Geneviève Prandi, directrice de l’Olap.

En clair, les biens les plus recherchés sur le marché. Les studios et les très grands appartement familiaux de 200, 300 mètres carrés et plus, avec une localisation irréprochable, peuvent voir leur loyer au mètre carré baisser à toute vitesse. Comme ce meublé de 20 m² dans le très chic 8e arrondissement à 1680 euros par mois (84 euros/m²), ou ce 500 mètres carrés près des Invalides à 46 euros du mètre carré.

Mais tout ce qui ne relève pas d’une location de particulier dans un but d’habitation principale sort de l’encadrement. Locations professionnelles et temporaires sont exclues du dispositif. Pas de souci pour Airbnb.

Seuls les baux signés après le 1er août doivent appliquer le nouveau barème. Beaucoup de propriétaires l’ont d’ailleurs anticipé. En juillet, les professionnels de l’immobilier ont constaté une multiplication des signatures de baux pour une entrée dans les murs différées après cette date fatidique.

En théorie, l’application du bon prix est simple. La loi oblige les propriétaires parisiens à appliquer le loyer de référence. Si le locataire veut en avoir le coeur net, il peut le comparer avec les données disponibles sur les sites de la Préfecture d’Ile-de-France ou celui de l’Olap, toujours en fonction de son emplacement, du nombre de pièce, et de l’ancienneté de l’immeuble.

Attention, il faut réaliser le calcul sur le loyer hors charges. Si elles ne sont pas précisées dans l’annonce, partez sur environ 10% du loyer, souvent plus dans les immeubles mal isolés des années 60 et 70. Ou regardez le montant du dépôt de garantie exigée. Il est normalement égal à un mois de loyer net.

Prenons par exemple ce deux pièces meublé de 40 mètres carrés « secteur Gare de Lyon-Aligre », qui affiche un loyer de 1450 euros charges comprises. D’après les photos, il s’agit d’un bâtiment ancien (poutre apparente), son loyer de référence majoré est donc de 30 euros le mètre carré. Soit 1200 euros par mois, plus les charges. A priori, il devra donc baisser de 100 à 150 euros.

Pour les locataires en place, c’est plus compliqué. Les bons payeurs peuvent toujours proposer un compromis à leur bailleur. S’ils quittaient le logement, celui-ci serait de toute façon obligé de le remettre sur le marché, à un prix encadré inférieur.

La loi prévoit la possibilité d’un complément de loyer, au-delà de la limite majorée, pour les appartements présentant des caractéristiques exceptionnelles. Le hic, c’est que les critères ne sont pas clairement définis. « Il n’y a ni jurisprudence, ni doctrine. C’est défini de manière succincte, confirme un juriste de l’Adil75. On peut penser qu’un emplacement de parking, une terrasse, une maison, ou un immeuble équipé en domotique peuvent remplir ces critères. » Quant à la limite de cette majoration, elle n’est pas précisée. L’Adil75 estime qu’il s’agira de l’un des principaux point de litige.

Ainsi, cet appartement de 170 mètres carrés situé place des Vosges, la plus ancienne de Paris, véritable monument architectural, sera peut-être encore autorisé à pratiquer un loyer proche de 60 euros le mètre carré.

C’est un risque. « Certains propriétaires ne se cachent pas, ils nous disent qu’ils n’appliqueront pas la loi », confie un juriste du service de renseignement de l’Adil75.

Dans ce cas, le locataire peut toujours accepter un loyer de marché et le dénoncer par la suite. Pour cela, il faut demander sa diminution devant la Commission départementale de conciliation (CDC) ou directement devant le Tribunal d’instance dans les 3 ans à compter de la signature du bail.

A Paris, la décision du tribunal d’instance tombe en général au bout de deux à six mois. Le loyer résultant de la conciliation ou de la décision du tribunal sera appliqué de manière rétroactive. Le trop perçu sera donc remboursé par le propriétaire.