Politique

Après Complément d’enquête, Rachida Dati fragilisée pour 2026 ?

POLITIQUE – Le « bulldozer politique » Rachida Dati atteint-il ses limites ? Ce jeudi 5 juin, France 2 a diffusé dans la soirée un numéro accablant de Complément d’enquête sur l’actuelle ministre de la Culture. Années Sarkozy, réseautage intensif, explosion médiatique… Le documentaire décortique les méthodes particulières de cette stratège politique, adepte de la castagne en coulisses comme en plateau.

La chaîne a réalisé avec ce numéro ses meilleures audiences de la saison. Une performance qui traduit la fascination qu’exerce la maire du VIIe arrondissement de Paris mais dont les pratiques interrogent, alors que l’étau judiciaire se resserre.

À cet égard, Complément d’enquête enfonce le clou et dévoile en partenariat avec Le Nouvel Obs des documents inédits qui ne sont pas encore entre les mains de la justice, mais qui devraient fortement l’intéresser.

L’affaire GDF, un soupçon de trop ?

Ils prouveraient que Rachida Dati aurait reçu 299 000 euros d’honoraires non déclarés du géant français GDF Suez en 2010-2011, quand elle était eurodéputée et avocate. Le tout, alors qu’elle apparaissait à Bruxelles comme un soutien du secteur énergétique. Elle réfute, tout comme elle s’oppose fermement à sa mise en examen pour corruption passive dans l’affaire Carlos Ghosn, en raison de 900 000 euros d’honoraires d’avocats qu’elle aurait perçus entre 2010 et 2012.

À ces déboires judiciaires, s’ajoute également une récente enquête de presse de Libération selon laquelle la ministre aurait oublié de déclarer à la HATVP plusieurs centaines de milliers d’euros de bijoux. Si à la mairie de Paris, la gauche ne manque jamais d’attaquer Rachida Dati à chaque révélation, comme Le HuffPost l’expliquait ici, cela commence à faire beaucoup.

La première secrétaire des Écologistes, Marine Tondelier a par exemple appelé ce vendredi la ministre à démissionner si tant est, selon elle, qu’elle ait « un peu de respect pour son ministère et les Parisiens ». « Une affaire de plus, une ! Il n’est aucun Ministre qui pourrait rester en poste avec autant d’accusations de malversations et de corruption », a martelé de son côté David Belliard, désigné tête de liste des écologistes pour la mairie de Paris en 2026. Même son de cloche chez Rémi Féraud, le candidat désigné par Anne Hidalgo pour lui succéder.

Procédure baillons et intimidations

D’autant que la défense de la ministre, qui ne s’explique que devant la justice, est souvent la même : l’intimidation et la mise en cause du travail journalistique. Outre les procédures bâillons qu’elle multiplie et qui ulcère le principal syndicat des journalistes, elle accuse notamment les reporters de Complément d’enquête d’être des « voyous » qui auraient monnayé une interview avec son cousin. Ce qu’ils démentent sans détour.

L’agacement a aussi gagné les sphères politiques. L’ancienne candidate de la macronie aux municipales de 2020, Agnès Buzyn, n’a guère digéré la tension durant la campagne. Face caméra, elle assure qu’après avoir refusé une alliance avec Rachida Dati, cette dernière lui aurait envoyé des messages au ton menaçant, lui promettant de « lâcher les chiens » contre elle.

Cette accumulation d’accusations a-t-elle de quoi lui porter préjudice dans la course à l’Hôtel de ville en 2026 ? Quoi qu’il en soit, Complément d’enquête révèle une conversation dans laquelle Rachida Dati confirme avoir monnayé avec Emmanuel Macron son entrée au gouvernement contre l’assurance d’un soutien présidentiel à sa candidature à la mairie de Paris. Ce que les deux intéressés ont toujours nié publiquement (avant que l’enregistrement révélé par France 2 ne vienne battre en brèche cette version).

Renaissance tenté de lâcher sa candidature ?

Depuis ce « deal » révélé par France 2, les liens entre le président de la République et Gabriel Attal, désormais patron de Renaissance, se sont plus que distendus. Ce jeudi, l’ancien Premier ministre a d’ailleurs confié à Franck Riester, chargé des élections à Renaissance, une « mission » visant à « proposer un choix » concernant les élections municipales à Paris. Comme si l’hypothèse désignant la cheffe de la droite parisienne n’allait pas de soi… Pour autant, Rachida Dati, qui a repris sa carte chez LR, reste aussi soutenue par certains cadres de Renaissance.

D’autres, qui gravitent également autour du « socle commun », sont en revanche déterminés à se coaliser contre elle. L’élu Horizons Pierre-Yves Bournazel a lancé cette semaine sa campagne pour la mairie de Paris avec le soutien appuyé d’Édouard Philippe. Mais aussi d’une certaine Agnès Buzyn, présente dans la salle lors de son meeting, tout comme l’ancien ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer. Quant à la réforme PLM modifiant les règles du scrutin à Paris, Lyon et Marseille, et sur laquelle mise la ministre de la Culture pour conquérir la capitale, son adoption est encore loin d’être garantie. Les élections municipales auront lieu dans moins d’un an.