Politique

Après la réélection de Braun-Pivet, la gauche face au risque de tout perdre

POLITIQUE – Une défaite peut en cacher d’autres. Le Nouveau Front populaire n’a pas réussi à faire élire son candidat, jeudi 18 juillet, à la présidence de l’Assemblée nationale. Le communiste André Chassaigne a effectivement échoué à 13 voix de Yaël Braun-Pivet, la macroniste qui se réinstalle donc au Perchoir grâce aux voix de la droite.

C’est un revers incontestable pour la gauche qui, arrivée en tête au soir du second tour des élections législatives, espérait envoyer un signal positif quant à sa capacité à gouverner à l’heure où Emmanuel Macron ne leur a toujours rien demandé. C’est raté. Pire encore, la journée inaugurale à l’Assemblée, jeudi, pourrait marquer le point de départ d’une série de déconvenues assez cinglantes.

Pour cause : si Yaël Braun-Pivet a pu conserver son fauteuil, c’est donc au prix d’une alliance avec Les Républicains (canal historique) mené par Laurent Wauquiez au Palais Bourbon. Une alliance « dont nous découvrirons les contreparties », selon les mots résignés d’Olivier Faure… Et dont les contours dévoilés par la presse peuvent effectivement donner des sueurs froides au NFP.

Deux postes clefs en balance

Selon plusieurs médias, le groupe de 47 députés (le 5e au Palais Bourbon) a obtenu du camp présidentiel qu’il le soutienne pour glaner plusieurs postes clefs : entre autres, deux vice-présidences (dont la première, la plus prestigieuse), une questure et la présidence de la très convoitée commission des Finances. Des fonctions occupées par la gauche, pour tout ou partie, pendant la dernière législature. En l’occurrence, lors des premiers votes organisés vendredi soir, Xavier Breton et Annie Genevard ont bien été élus vice-présidents (aux dépens notamment des candidats RN), et Michèle Tabarot à la questure.

Pour Les Républicains, l’autre grand perdant des législatives avec une quinzaine de députés en moins, il s’agit d’un butin inespéré. Si le plan se passe comme prévu jusqu’au bout, ils retrouveront le niveau de représentation à l’Assemblée qui était le leur avec l’UMP, en 2012. Ils comptaient alors près de 200 députés, comme le fait remarquer un spécialiste du Parlement sur les réseaux sociaux. Et la partie semble plutôt bien engagée.

Car malgré sa manœuvre pour réinstaller Yaël Braun-Pivet au Perchoir, le groupe de Laurent Wauquiez s’est officiellement inscrit dans l’opposition. Ce qui lui permet de briguer des postes réservés, comme la première vice-présidence, détenue depuis 2022 par une socialiste, et la commission des Finances, présidée par l’insoumis Éric Coquerel pendant la dernière législature.

Le député de Seine-Saint-Denis explique ne pas croire à une alliance pour lui chiper la place, étant donné qu’il est d’usage, pour les députés inscrits dans la « majorité » (comme c’est le cas des élus du parti Renaissance, du MoDem et d’Horizons) de ne pas participer au vote. « La règle fait que le président de la commission des Finances est dans l’opposition. À partir de là, c’est dans l’opposition que ça se règle, sinon ça veut dire que c’est la majorité qui choisit l’opposition qu’elle souhaite », résume-t-il ce vendredi dans les couloirs du Palais Bourbon. Optimiste.

Le coup de main du camp présidentiel au clan Wauquiez

En réalité, le camp présidentiel pourrait rompre avec cette pratique lors du scrutin prévu samedi matin, comme le laissent entendre plusieurs sources. « Les LR sont dans l’opposition, nous, on va voter pour les LR », a par exemple expliqué sans ambages le député macroniste Denis Masséglia dans un live Twitch, jeudi soir, avant de confirmer : « On va voter, rien ne l’interdit. »

Dès lors, la gauche n’aurait que bien peu d’options pour empêcher la victoire d’un candidat Les Républicains à cette fonction stratégique, à l’image, déjà, du vote de jeudi soir pour le Perchoir.

Reste un motif de satisfaction toutefois : l’élection d’un bureau majoritairement à gauche, avec neuf secrétaires issus NFP sur les 12 élus – contre aucun LR, ni RN – soit 12 postes au total sur les 22.

Reste que dans ce contexte, la course à Matignon paraît plus incertaine que jamais pour le Nouveau Front populaire, par ailleurs toujours embourbé dans la désignation de son Premier ministre potentiel. Car s’il paraît difficile, pour le camp présidentiel et LR, de convertir une alliance de circonstances à l’Assemblée en véritable exercice du pouvoir au gouvernement, l’impasse dans laquelle semble se trouver la gauche ressemble fort à un solide barrage.

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