Politique

Après sa lourde défaite, Laurent Wauquiez au défi de se trouver un rôle pour exister

POLITIQUE – Il est vite remonté en selle. Moins d’une heure après la déflagration ce dimanche 18 mai, Laurent Wauquiez apparaissait sur les hauteurs du Puy-en-Velay (Haute-Loire). La statue de Notre-Dame de France en arrière-plan, le patron des députés LR n’a rien laissé transparaître de la gifle qu’il venait de recevoir. Avec seulement 25 % des voix, il s’est nettement incliné face à son adversaire Bruno Retailleau, élu président du parti.

« Cette campagne a été digne, elle a été faite avec respect et engagement », a déclaré le candidat malheureux, comme pour sauver la face à une poignée de fidèles. Objectif : ne pas apparaître défait et se projeter (malgré tout) vers l’avenir. « Il y a un projet de rupture à porter et j’y prendrai toute ma part », a-t-il promis. À seulement 50 ans, Laurent Wauquiez semble pourtant avoir déjà tout vécu. Ministre, maire, président de région, président de groupe à l’Assemblée… Et même patron de parti. On l’oublie, mais il a été aux manettes de LR de 2017 à 2019. À l’époque, la bérézina aux européennes (8,48 %) l’avait conduit à démissionner. Des échecs, il en a connu d’autres. Alors, pourquoi celui-là serait-il pire ?

Peut-être car une autre question pose plus cruellement celle (vertigineuse) de son avenir : stoppé net dans sa course vers l’Élysée, que peut maintenant faire Laurent Wauquiez ? Celui qui se voyait succéder à Emmanuel Macron ne compte pas forcément lâcher le morceau. « Il ne pense qu’à la présidentielle : comment imaginer sérieusement qu’une défaite face à Bruno Retailleau suffise à réprimer ses ambitions ? », s’interrogeait au début du mois un ministre issu de la droite auprès du HuffPost. À l’Assemblée, certains redoutent qu’il profite de son très stratégique poste de président de groupe pour mener sa barque en concurrence avec l’appareil dirigé par le ministre de l’Intérieur. Ses soutiens le récusent. « Bien évidemment, il devra y avoir totale adéquation entre le parti et le groupe. On ne peut envisager une forme de dyarchie », confie un député LR à Libération. « Comme patron du groupe à l’Assemblée, Laurent Wauquiez a un rôle absolument primordial », temporise le député LR Philippe Juvin sur franceinfo.

Comme pour étouffer les critiques et jouer le jeu du bon perdant, Laurent Wauquiez a invité Bruno Retailleau à assister à la traditionnelle réunion des députés LR ce mardi 20 mai à l’Assemblée. Il n’est en revanche pas question que le perdant occupe la vice-présidence du parti : ni lui ni Retailleau n’en ont envie. Le souvenir de 2022 a laissé des traces ; à l’époque, Aurélien Pradié avait récupéré cette fonction (surtout honorifique) avant d’en être limogé quelques semaines plus tard, sur fonds de désaccords politiques.

Ni humiliation ni échec, selon lui

Tout à sa stratégie d’afficher sa sérénité, l’ancien président de la région Auvergne-Rhône-Alpes se refuse à parler d’humiliation ou d’échec. Une façon d’apparaître comme une alternative dans l’hypothèse où un chemin se dégagerait, à la faveur d’une situation qui apparaît à ce stade improbable. Ce dont certains, habitués des affres des batailles à droite, doutent à haute voix. « Qui peut imaginer qu’une personne balayée par trois adhérents sur quatre de son propre parti puisse être candidat de son parti à la présidentielle ? Le maintien de Laurent Wauquiez à la tête du groupe LR est intenable. Les militants ont tranché, il doit partir », flingue sur X l’ex-bras droit de Jean-François Copé, Jérôme Lavrilleux.

Mise-t-il sur un hypothétique essoufflement de Bruno Retailleau au ministère de l’Intérieur, incapable d’agir, les mains liées par un gouvernement contraint de survivre sans majorité absolue ? Sa « liberté de parole », tant vantée pendant ces trois mois de campagne, pourrait-elle réellement redevenir un argument valable ? L’un de ses soutiens, interrogé par Politico, se montre beaucoup plus lucide et reconnaît que sa « violente » défaite va l’affaiblir « durablement ». Une candidature en 2027 ? « Compliquée », lâche le même, quand la plupart des cadres LR jugent prématurée toute discussion sur la présidentielle. « Aborder la question de 2027 maintenant serait une erreur. Notre devoir est de renforcer la place de la droite dans le débat public », assure Annie Genevard, ministre de l’Agriculture et secrétaire générale de LR.

Une chose est sûre : peu de députés LR tiennent rigueur à Laurent Wauquiez de son échec, et tous assurent qu’il a la légitimité pour rester en poste. « Il n’y a aucune tête à faire tomber », insiste un élu auprès de Libé. Un autre : « Ce serait dommage de se priver de Laurent Wauquiez. Personne n’a intérêt à ce qu’il quitte la présidence du groupe et surtout pas Bruno [Retailleau], s’il veut que le parti soit audible et continue à peser ». Il va donc devoir se contenter de l’Assemblée nationale, là où il rêvait d’arpenter les couloirs du siège LR dans le but d’accéder à l’Élysée. Un plan de long terme qui s’est écroulé comme un château de cartes.

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