Politique

Barnier veut s’inspirer des cahiers de doléances, cette association n’attend que ça

POLITIQUE – L’heure d’ouvrir les archives. Six ans après la crise des gilets jaunes, le Premier ministre Michel Barnier a remis sur la table un objet oublié : les fameux cahiers de doléances, dont il entend s’inspirer pour bâtir son programme en tant que chef du gouvernement.

Dans « quelques semaines », Michel Barnier veut présenter un « un plan d’action qui sera la suite du discours de politique générale » pour « faire des choses durables pour ce pays », selon des propos tenus au Parisien le 26 octobre. Le chef du gouvernement entend s’appuyer sur les propositions de ses ministres, mais il entend aussi s’inspirer des cahiers de doléances.

Fruits du Grand débat national initié par Emmanuel Macron, les cahiers de doléances ont réuni entre 200 000 et 400 000 contributions venues de la France entière. Le chef de l’État s’était engagé à les rendre publiques mais le 15 avril 2019, date prévue pour la restitution, l’incendie de Notre-Dame a bouleversé les plans. Et depuis, la promesse de restitution est restée lettre morte.

« Nous sommes tout à fait disposés à aider » Michel Barnier

« La promesse du président de la République était que toutes les doléances seraient rendues publiques, de façon accessible, facile et limpide. Sauf qu’aujourd’hui, pour consulter les doléances, il faut aller aux archives départementales ou à la Bibliothèque nationale de France », explique au HufffPost Rémy Goubert, président de l’association « Rendez les doléances » lancée en 2020. Pas vraiment la facilité d’accès promise au départ.

Les déclarations de Michel Barnier lui ont donc valu un tweet ironique de l’association : « La première chose à faire de ces cahiers de doléances, c’est de les mettre en ligne comme promis lors du Grand Débat National. La confiance, c’est d’abord la transparence ».

La pique mise à part, le président de « Rendez les doléances » tient à « saluer » les intentions de Michel Barnier, car « c’est la première fois » qu’un gouvernement manifeste sa volonté d’utiliser les cahiers de doléances. « Nous sommes tout à fait disposés à aider le Premier ministre. S’il lit cet article, nous attendons sa réponse avec plaisir ! », fait savoir Rémy Goubert. L’enthousiasme est de mise, mais le président de l’association prévient : « Par contre, il faut que ce soit sérieux ».

Les cahiers de doléances « pas confisqués » mais « ignorés »

Car outre la restitution publique, Rémy Goubert comme les chercheurs qui ont étudié, classé, numérisé et synthétisé les cahiers de doléances, déplorent que leur contenu n’ait jamais été exploité. « Les cahiers n’ont pas été confisqués. Ils ont tout bonnement été ignorés, d’où le fait qu’ils soient sous-exploités, y compris par les chercheurs », expliquait dans Le Monde en janvier Magali Della Sudda, chercheuse en science politique au CNRS et membre d’un collectif de recherche citoyen en Gironde.

Rémy Goubert évoque lui le sentiment de « mépris » ressenti par les Français qui se sont déplacés pour contribuer au débat. « J’ai vu des personnes âgées qui n’ont jamais voix au chapitre et qui ont sincèrement cru qu’en allant écrire dans ces cahiers, le président allait les lire. C’est une violence terrible d’avoir mis ça dans des salles obscures et de ne pas les avoir utilisés », insiste-t-il. Le sujet est aussi porté à l’échelle locale par des municipalités. Le 21 octobre, le maire PCF de Gennevilliers Patrice Leclerc a publié sur Mediapart un blog cosigné par une trentaine d’élus franciliens pour appeler les membres du Nouveau Front Populaire à « construire des solutions en partant des problèmes et espoirs exprimés à travers les cahiers de doléances des gilets jaunes ».

« Les cahiers de doléances sont une mine d’or. Et les sujets qui étaient d’actualité en 2019 le sont toujours aujourd’hui », assure en parallèle Rémy Goubert. Il cite à titre d’exemple le thème de la « justice fiscale » et d’une taxation des plus riches, déjà mentionnés par les Français. Figuraient aussi la disparition des services publics, la désertification médicale ou encore le scrutin à la proportionnelle. Autant de thèmes évoqués par Michel Barnier lors de son arrivée à Matignon et qui font dire à Rémy Goubert qu’« il n’y a pas besoin de faire de programme, il est déjà écrit dans ces cahiers. » Et d’enfoncer le clou : « Tous les politiques devraient s’en réclamer et regarder ce que les Français ont écrit. Il faut faire cet effort ».

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