Ce que prévoit le texte approuvé par les députés en réponse à la crise agricole
POLITIQUE – Remanié après la crise agricole, le projet de loi d’orientation agricole, adopté mardi 28 mai en première lecture à l’Assemblée, est bâti autour de la notion de « souveraineté alimentaire », avec l’objectif affiché d’accélérer l’arrivée de nouvelles générations d’agriculteurs délestés de certaines contraintes environnementales.
C’est une « brique importante notamment pour l’orientation et l’installation » des agriculteurs, a salué le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, promettant que « d’autres viendront », sur la rémunération des paysans, la planification environnementale et la gestion de crise.
Le texte a été adopté avec le soutien d’une partie d’une vingtaine de députés Les Républicains, par 272 voix contre 232. Le RN et une grande partie de la gauche ont voté contre. Les communistes se sont partagés entre abstentions et votes contre, à l’instar des indépendants de Liot.
Il agrège des sujets très divers, tels que la formation, les haies ou le statut des chiens de protection des troupeaux. Salué par les syndicats agricoles majoritaires pour ses mesures de simplification et la facilitation promise de projets d’irrigation ou d’élevage, il est dénoncé par les oppositions en raison de l’absence de mesures sur les revenus, la fiscalité ou le foncier ; la gauche s’inquiétant aussi d’un recul environnemental.
L’agriculture, « intérêt général majeur »
L’article premier, comme l’exigeait le premier syndicat FNSEA, consacre « la protection, la valorisation et le développement de l’agriculture et de la pêche » au rang d’« intérêt général majeur », en tant qu’ils « garantissent la souveraineté agricole et alimentaire de la Nation ».
L’un des objectifs affichés est de nourrir la réflexion du juge administratif et faciliter le parcours des projets de structures de retenues d’eau ou de bâtiments d’élevage hors-sol, lorsqu’ils sont mis en balance avec un objectif de préservation de l’environnement.
Des élus et des juristes doutent de sa portée, la protection de l’environnement ayant une valeur constitutionnelle, alors que cet intérêt général majeur est inscrit dans une loi simple.
Le texte porte aussi l’agriculture dans le champ de protection des « intérêts fondamentaux de la Nation » définis dans le Code pénal et dont les atteintes sont durement sanctionnées.
Formation, installation et financement
Le projet de loi entend donner un cadre d’action au monde agricole pour relever deux défis majeurs : attirer des bras – il rappelle qu’un tiers des quelque 500 000 agriculteurs seront en âge de partir à la retraite d’ici dix ans – et adapter les systèmes de production au changement climatique.
À ce stade, il fixe comme objectif « 400 000 exploitations agricoles » d’ici 2035, et 500 000 paysans travaillant sur ces exploitations pour 2035. Il fixe l’objectif « d’ici au 1er juillet 2025, puis tous les dix ans d’une programmation pluriannuelle de l’agriculture ».
Un nouveau diplôme de niveau bac+3 serait également créé.
Il met en place un guichet unique départemental (France services agriculture) pour accompagner les agriculteurs voulant s’installer ou céder leur exploitation, mais qui constituera parfois une étape pour toucher certaines aides publiques.
Le texte prévoit aussi un « diagnostic modulaire » censé aider les jeunes agriculteurs à reprendre des fermes en leur fournissant des informations sur « la viabilité économique, environnementale et sociale » des exploitations.
Irrigation et élevage
Le texte accorde une présomption d’urgence en cas de contentieux autour de la construction d’une réserve d’eau pour l’irrigation. Objectif : réduire les délais de procédures et « purger le contentieux en moins de dix mois ». Cette présomption d’urgence concernera aussi des projets de bâtiments d’élevage, dont les permis de construire sont régulièrement l’objet de recours d’associations de défense de la nature.
Par ailleurs, les députés ont fait un pas vers un « droit à l’erreur » des agriculteurs, en approuvant le fait que « la bonne foi » d’un exploitant « est présumée » lors d’un contrôle administratif.
Atteintes à l’environnement
Un article révise l’échelle des peines en cas d’atteinte à l’environnement et « réserve la qualification de délit » aux atteintes « de manière intentionnelle ». Les députés de gauche y voient une inversion de la charge de la preuve, voire un permis d’atteinte à l’environnement, qui de surcroît ne concernerait pas uniquement les agriculteurs.
Il « délivre un permis de détruire la nature », a tancé l’écologiste Delphine Batho. « Si vous restez au statu quo, vous avez des gens qui, pour des délits non intentionnels, sont menacés de trois ans d’emprisonnement ou 150 000 euros d’amende », a justifié Marc Fesneau.
Réglementation « unique » sur les haies
La FNSEA estimait que le principal obstacle à la plantation de haies était le millefeuille administratif, avec « 14 réglementations différentes ». Les députés ont adopté un article qui simplifie leur régime juridique. Le texte réaffirme l’interdiction de la destruction d’une haie tout en prévoyant des conditions de dérogation (replantation par exemple).
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