Ce qui se cache derrière le refus des insoumis d’aller voir Macron
POLITIQUE – Ils n’entreront pas dans la danse. Conviés à l’Élysée par le président de la République lundi, les élus de la France insoumise ont annoncé vendredi 6 décembre leur refus de s’y rendre. Les mélenchonistes ne veulent pas participer aux consultations larges entamées par Emmanuel Macron pour trouver le futur locataire de Matignon.
Une question de cohérence, selon le coordinateur national du mouvement Manuel Bompard, et de « fidélité » à l’alliance du NFP. « Aucune discussion autre que la nomination d’un gouvernement du Nouveau Front populaire ne saurait avoir lieu avec le chef de l’État », explique-t-il dans un communiqué publié vendredi en fin de soirée, fustigeant à nouveau le « coup de force » d’Emmanuel Macron à travers son refus de « reconnaître le résultat des dernières législatives. »
En clair : la formation de gauche radicale continue de plaider pour « tout le programme rien que le programme », avec un gouvernement mené par Lucie Castets qui se chargerait ensuite de trouver des majorités texte par texte au Parlement. Une position qui tranche avec celles de leurs partenaires, prompts, eux, à nouer des compromis pour installer une personnalité de gauche à Matignon. Qu’elle soit membre de leur alliance, ou non.
Enjamber Matignon pour la présidentielle
Dès lors, comment comprendre ces différences qui tendent à isoler la France insoumise des autres partis de gauche ? Pour les mélenchonistes, la stratégie est claire : garder les mains propres, cultiver le statut d’opposant farouche à la macronie et au « système capitaliste financiarisé », quitte à ce que le blocage vers Matignon perdure, pour mieux pointer la responsabilité d’Emmanuel Macron et demander son départ.
En ce sens, la réaction de Jean-Luc Mélenchon à l’adoption de la motion de censure contre Michel Barnier est limpide. Invité du 20 heures sur TF1 jeudi, le patriarche insoumis a effectivement attendu une question et moins de 40 secondes pour pointer la responsabilité du chef de l’État dans cette histoire.
« Ce n’est pas Monsieur Barnier qui a été censuré. C’est Monsieur Macron qui a été censuré », a ainsi plaidé le triple candidat à la présidentielle, pour qui « l’esprit (de la Constitution), c’est qu’(Emmanuel Macron) doit s’en aller ». De fait, la sentence, déjà claironnée par les insoumis l’été dernier, qui verraient bien leur champion concourir à une présidentielle anticipée, reprend de la vigueur cet automne avec la chute du gouvernement.
La petite musique monte dans la sphère politique, avec l’appui de personnalités modérées comme Charles de Courson ou Jean-François Copé, mais également dans l’opinion, avec plus de 6 Français sur 10 favorable au départ anticipé du locataire de l’Élysée. Pour les insoumis, il s’agit de la seule solution pour sortir de l’impasse, comme le répète Manuel Bompard dans son communiqué refusant l’invitation présidentielle. Et la meilleure option pour que Jean-Luc Mélenchon participe à une quatrième élection présidentielle ?
Ménager son espace politique
Dans le contexte, difficile également de ne pas lier l’intransigeance des insoumis à l’égard d’Emmanuel Macron et de ses consultations à la bataille d’influence qui se joue à gauche. Face aux socialistes et leur partition de la négociation, les insoumis jouent leur propre morceau, celui de la radicalité.
Ainsi, il n’est pas anodin de voir les élus LFI redoubler de critiques à l’égard de leurs partenaires enclins à réclamer la bienveillance des macronistes pour gouverner. Outre le PS, les écologistes et les communistes – qui seront reçus lundi à l’Elysée – ne posent plus la nomination de Lucie Castets à Matignon comme préalable aux discussions et à la négociation. Objectif : un Premier ministre de gauche, qui compte sur la non-censure du centre, et pourquoi pas de la droite.
Impensable pour les mélenchonistes. « Aucun accord entre un parti du Nouveau Front populaire et les partis présidentiels ne nous engagerait », martèle Manuel Bompard dans son communiqué, en critiquant nommément les socialistes pour leur ouverture sur la réforme des retraites. Olivier Faure propose effectivement un « gel » plus qu’une abrogation, en guise de main tendue aux macronistes.
Pour la France insoumise, il s’agit de défendre mordicus la feuille de route du NFP et de parier sur une gauche au programme chimiquement pur. Le tout en faisant planer le spectre de la « trahison » du Parti socialiste, antienne de la gauche radicale. Ce spectre « plane toujours au-dessus du PS », résume le professeur de sciences politiques Rémy Lefèvre dans les colonnes du Monde. Pour lui, si les socialistes « donnaient l’impression de vouloir composer une alliance avec les macronistes, ils ouvriraient un espace politique à Jean-Luc Mélenchon, qui n’attend que ça ». Quitte à bouder une invitation à l’Élysée.
À voir également sur Le HuffPost :
La lecture de ce contenu est susceptible d’entraîner un dépôt de cookies de la part de l’opérateur tiers qui l’héberge. Compte-tenu des choix que vous avez exprimés en matière de dépôt de cookies, nous avons bloqué l’affichage de ce contenu. Si vous souhaitez y accéder, vous devez accepter la catégorie de cookies “Contenus tiers” en cliquant sur le bouton ci-dessous.