Politique

Ces élues françaises nous expliquent pourquoi elles seront à la Pride interdite de Budapest

POLITIQUE – Aux alentours de 14 heures ce samedi, la capitale française s’animera comme chaque dernier week-end de juin, pour célébrer les fiertés LGBT+ avec comme mot d’ordre « la lutte contre l’international réactionnaire ». Au même moment, c’est non sans crainte que d’autres en feront de même à Budapest, en Hongrie, alors que le gouvernement de Viktor Orban a interdit la marche des fiertés au nom de la protection des enfants et d’une loi homophobe votée cette année.

Ursula von der Leyen, la présidente de la commission européenne a beau avoir appelé le Premier ministre hongrois à autoriser la marche, il l’a accusée de traiter la Hongrie comme « un vassal ». « C’est trop mou et trop tard de toute façon, alors que ça fait des mois qu’on alerte », fustige à cet égard auprès du HuffPost l’eurodéputée écologiste Mélissa Camara.

Comme elle, une soixantaine d’eurodéputés, issues de la gauche et du centre seront dans la capitale hongroise. Parmi le contingent français, Raphaël Glucksmann, Emma Rafowicz, Fabienne Keller, ou encore la sénatrice française Mélanie Vogel. Pour l’insoumise Manon Aubry, co-présidente du groupe The Left au Parlement européen, l’enjeu du déplacement « est de donner de la visibilité, mais aussi de protéger les militants sur place par une présence politique massive ».

Faire pression sur les instances européennes

Tous entendent aussi alerter sur l’extrême droite, à laquelle « il ne faut pas laisser une once de terrain. Après la Hongrie, ça sera peut-être l’Italie ? », pointe Manon Aubry. « Quand on voit l’ambiance pesante au Parlement… Les trois groupes d’extrême droite sont complètement décomplexés, un député polonais m’a récemment demandé si je comptais venir au Parlement en muselière. Mais on est où ? », s’alarme Mélissa Camara. Toutes deux pointent le double discours du Rassemblement national, allié de Viktor Orban au sein des Patriotes, sur les questions LGBT+.

« En interdisant cette marche, Viktor Orban légitime quelque part l’usage de la violence à l’égard des personnes LGBT+. Nous, nous allons marcher avec bienveillance, et pour envoyer un message de soutien à toutes les personnes LGBT+ en Hongrie, et en Europe », abonde l’eurodéputée et présidente du groupe libéral Renew, Valérie Hayer, jointe par téléphone.

Et après ? Pour la tête de liste macroniste aux européennes de 2024, il s’agit de faire aussi pression sur les États membres pour accentuer les sanctions. « Avec l’article 7 du traité de l’UE, on peut suspendre les droits de vote d’un État membre. Nous voulons réenclencher cette procédure qui nécessite l’unanimité des 26 autres. La dernière fois la Pologne s’y était opposée », détaille Valérie Hayer. La Hongrie a par ailleurs déjà été visée par plusieurs procédures de fonds européens. « Ce sera une journée historique, prédit même l’eurodéputée socialiste Chloé Ridel. Il s’agit vraiment de réaffirmer les valeurs européennes face à l’extrême droite et à Viktor Orban ».

Des questions de sécurité ?

La France enverra par ailleurs sur place son ambassadeur aux droits des personnes LGBT Jean-Marc Berthon. Une décision annoncée notamment par Aurore Bergé. La Commissaire européenne chargée de l’Égalité, la Belge Hadja Lahbib, est également attendue dans la journée à Budapest. Elle tiendra une conférence aux côtés du maire de la capitale.

La manifestation étant interdite, ses participants s’exposent à une amende voire à une peine de prison. Une situation risquée pour les parlementaires européens ? Toutes les élues politiques contactées pointent un « coût » politique important, voire « désastreux » si les autorités hongroises devaient s’en prendre à des élus de Bruxelles. Le dirigeant hongrois a pour l’instant écarté toute intervention des forces de l’ordre mais il a mis en garde les participants contre les conséquences légales.

Quant à la question de l’immunité parlementaire, elle n’est pas sans poser un certain casse-tête. Si Manon Aubry rappelle qu’« elle ne s’applique pas en cas de flagrant délit et si les faits contreviennent aux lois nationales », on pointe du côté de Chloé Ridel qu’il est en réalité très difficile de casser cette immunité. Il n’empêche que la marche et la présence des élus, n’est pas sans susciter quelques inquiétudes au sein des instances administratives européennes, en matière sécuritaire. Plusieurs contre-manifestations d’extrême droite ont été autorisées, laissant craindre des échauffourées.