Politique

Cette visite de Macron au Groenland dit beaucoup de sa posture face à Trump

POLITIQUE – Une bravade lancée au gendarme américain ? En se rendant au Groenland, pays en apparence tranquille et éloigné du tumulte géopolitique actuel, Emmanuel Macron cherche à montrer les muscles. Il sera en déplacement sur l’île le dimanche 15 juin pour, explique son entourage, « renforcer la coopération » avec ce territoire autonome du Danemark. Mais à travers cette visite, c’est en réalité à Donald Trump et à la communauté internationale que cherche à s’adresser le Président français.

Depuis son retour à la Maison Blanche, le successeur de Joe Biden n’a eu de cesse de faire part de ses envies expansionnistes. « Les États-Unis se considéreront à nouveau comme un pays qui étend son territoire et porte son drapeau vers de nouveaux et magnifiques horizons », clamait-il lors de son discours d’investiture en janvier, sans toutefois mentionner explicitement le Groenland. Le 30 mars, sur NBC, il se montre beaucoup plus clair : « Nous finirons par avoir le Groenland. J’en suis sûr à 100 % », déclarait-il alors. Ajoutant : « Il y a de bonnes chances pour que [cette annexion] se fasse sans usage de la force militaire », mais « toutes les options sont sur la table ».

Des propos qui avaient scandalisé des chefs d’État du monde entier. Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot avait alors assuré que l’envoi de troupes européennes n’était plus à exclure pour venir en aide au Danemark, si besoin était. De fait, le Groenland est un territoire appartenant à un État membre de l’Union européenne. Une telle confrontation, entre l’Europe et les États-Unis serait non seulement inédite, mais signerait en plus la fin de l’OTAN.

Emmanuel Macron, qui sera le premier chef d’État étranger à se rendre au Groenland depuis les menaces d’annexion, ne manquera pas de réaffirmer son soutien aux 56 000 personnes qui y vivent, inquiètes de l’avenir de leur pays. Officiellement, il s’y rend « à l’invitation » du Premier ministre du Groenland Jens-Frederik Nielsen et de la Première ministre danoise Mette Frederiksen pour parler de « sécurité en Atlantique Nord et dans l’Arctique » mais aussi de « sujets liés au changement climatique, à la transition énergétique et à la sécurité d’approvisionnement en minerais critique ».

Macron en porte-voix d’une UE qui se rêve plus forte ?

Le Groenland est un territoire très riche en ressources naturelles, recouvert à 85 % de glace, et dispose de nombreuses terres rares et de zones pétrolières inexploitées. Le réchauffement climatique et la fonte des glaces accélèrent ces perspectives, ce qui n’a pas échappé à Donald Trump.

Mais à n’en pas douter, le Président français se posera lors de son déplacement comme l’anti-Trump, porte-voix d’une Union européenne qui joue sa crédibilité (et même sa survie) sur le sujet, alors qu’elle est impuissante à mettre un terme à la guerre en Ukraine, qui s’enlise depuis plus de trois ans.

Depuis la réélection de Donald Trump, Emmanuel Macron a retrouvé voix au chapitre sur la scène internationale. À l’inverse d’un Président américain qui met en place des droits de douane totalement démesurés, puis revient dessus, qui annonce vouloir faire de Gaza la « Riviera du Moyen-Orient » en déportant des milliers de personnes ou qui gèle les subventions à des dizaines d’organismes d’aide humanitaire, le locataire de l’Élysée entend se poser comme un facteur de stabilité et une voix medium de compromis. Même s’il ne dit pas son nom, le bras de fer sur le dossier du Groenland ne fait que commencer.