Comme Ruffin, tous ces candidats rêvent d’une primaire qui n’existe pas (encore)
POLITIQUE – La guigne de départ. Le député de la Somme François Ruffin passe la seconde en vue de l’élection présidentielle. Il lance ce samedi 28 juin « France debout » la déclinaison nationale de son mouvement « Picardie Debout » pour peser dans la course à l’Élysée.
Comme lui, ils sont nombreux à se presser (plus ou moins hâtivement) sur cette ligne de départ à gauche en espérant un processus de départage commun à plusieurs partis. Récemment, la députée de Seine-Saint-Denis Clémentine Autain et le socialiste de l’Essonne Jérôme Guedj ont fait un pas supplémentaire en ce sens.
La première s’est déclarée mi-juin « candidate à la candidature » quand le deuxième se voit bien en « candidat » pour réveiller la gauche laïque et engagée contre l’antisémitisme, à savoir dans son esprit la gauche hors-LFI. Problème : si les prétendants (officiels ou putatifs) se multiplient, l’espace politique qui leur est promis est pour l’heure inexistant, ou presque.
La gauche de deuxième division ?
De fait, les partisans de la primaire sont pour l’heure écrasés par deux pôles puissants, la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon, sur une ligne dite de « rupture » et la social-démocratie sauce Raphaël Glucksmann censée incarner un projet de « gouvernement », donc plus modéré.
À deux ans du scrutin, le duo contraire plie le match dans les sondages. L’eurodéputé est crédité de 11 % d’intentions de vote, l’Insoumis 14, loin devant les autres potentiels candidats. Parmi eux, seul François Ruffin semble tirer une petite épingle du jeu en atteignant la barre des 5 % (selon les configurations). Bien sûr, les sondages n’ont pas valeur de prédiction. Mais ils offrent une photographie des rapports de force à l’instant T, et, par conséquent, des arguments faciles à ceux qui les dominent.
Ainsi, Raphaël Glucksmann, comme Jean-Luc Mélenchon, a déjà entériné les candidatures concurrentes de ces deux pôles, sans passer par la case primaire. La France insoumise est historiquement opposée à ce genre de course interne qui oblige, forcément, à des compromis. Quand le leader de Place Publique, qui a fondé son parti en 2018 pour faire le rassemblement des gauches, plaide désormais pour une aventure solitaire, loin des « trucs d’appareils qui produisent une synthèse molle. »
Dès lors, les prétendants unionistes semblent comment bloqués en deuxième division. Difficile, surtout, de voir leur leitmotiv, bien que plébiscité par l’électorat de gauche, déboucher sur quelque chose de concret. Illustration encore avec l’initiative lancée de longue date par Lucie Castets, candidate éphémère du NFP pour Matignon, pour ce début juillet.
À chacun sa primaire
Avec Marine Tondelier, la secrétaire nationale des écologistes, elle aussi partisane d’une grande primaire pour éventuellement y participer, l’ancienne cadre à la mairie de Paris convie l’ensemble des forces de gauche, le 2 juillet, pour discuter départage interne avant 2027. La France insoumise et Place publique ont déjà annoncé qu’ils n’iraient pas.
Quant aux personnalités présentes, elles ne plaident pas toutes pour le même mode de désignation. Ainsi, la cheffe des écologistes – qui ne fait pas l’unanimité dans son propre parti – veut une primaire des « territoires » avant de choisir un candidat commun (du PS à LFI), mais si possible, sans vote des militants. Olivier Faure, lui aussi de la partie, plaide pour une « plateforme commune allant de Glucksmann à Ruffin » quand le député de la Somme veut lui une « primaire geyser de Hollande à Poutou. » Pas simple.
Dans ce contexte, quel levier reste-t-il aux partisans de l’union ? Celui de l’opinion, et de la pression populaire, sans doute. Selon les sondages, les Français de gauche sont favorables à une candidature véritablement commune à tous les partis situés à bâbord du spectre politique. Avec un risque majeur, celui dit de la « primaire populaire » et d’une candidature de seconde zone.
En 2022, des militants s’étaient déjà appuyés sur la volonté des électeurs pour tenter d’imposer une course interne aux différents candidats en lice. Résultat : l’ancienne ministre Christiane Taubira désignée, avant un renoncement façon accident industriel. Mission : faites mieux.