Comment la CMP, cette commission qui se réunit à huis clos, est devenue le nouveau lieu central du Parlement
POLITIQUE – C’est (presque) devenu un passage obligé. Dans une Assemblée nationale sans majorité, qui fait face à un Sénat très droitier, la commission mixte paritaire apparaît comme une échappatoire de plus en plus utile au bloc central. Et une instance de plus en plus décriée par l’opposition, notamment à gauche.
Du nouveau mode de scrutin pour les municipales jusqu’au chantier de l’A69, en passant par la loi agricole Duplomb, la fin de la session parlementaire – ainsi que la session extraordinaire de juillet – est marquée par plusieurs CMP, qui doivent permettre de trouver un compromis entre le Sénat et l’Assemblée nationale sur des sujets qui divisent. On vous explique.
Recourir à la CMP n’a rien d’inédit dans le parcours législatif. Pensée comme un outil de conciliation quand les deux chambres sont en désaccord sur un texte, la commission mixte paritaire réunit à chaque fois sept députés et sept sénateurs à huis clos. Objectif : accoucher d’un texte de compromis qui doit ensuite obtenir être validés par le Sénat et l’Assemblée nationale.
Pas plus de CMP mais des CMP plus stratégiques… et décriées
Définie par l’article 45 de la Constitution, elle peut être convoquée par le Premier ministre ou sur décision conjointe de la présidence de l’Assemblée nationale et du Sénat lorsqu’elle concerne une proposition de loi, c’est-à-dire un texte d’initiative parlementaire. Les membres, issus des commissions chargées d’examiner le texte, doivent représenter fidèlement l’équilibre politique des deux chambres, comme nous le rappelions dans cette vidéo tournée avant la dissolution.
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Face à la composition fragmentée de la chambre basse, l’attribution de l’un des sièges est soumise à un mécanisme de « tourniquet ». À l’Assemblée, chaque CMP dispose d’un « siège tournant », que se partagent à tour de rôle le MoDem, Horizons et les écologistes. Selon son attribution, il peut donc faire basculer l’équilibre politique de la commission, ainsi que l’avenir législatif du texte en question.
Comme le rappelle LCP, la configuration actuelle du Palais Bourbon n’a pas eu d’incidence sur le nombre de commissions convoquées. Près de 28 CMP ont été convoquées en onze mois sous cette législature, quand la précédente en a compté en moyenne 36 sur une année.
En revanche, elle est devenue bien plus centrale dans le jeu politique et dans la stratégie de certains groupes politiques. Si bien que l’arrivée d’un texte en CMP ne suit pas toujours le circuit habituel, et permet parfois aux parlementaires de trouver une porte de sortie pour un texte à l’avenir compromis en séance publique.
La gauche dénonce un passage en force
C’est le cas de la loi Duplomb, issue du Sénat, qui a immédiatement fait l’objet d’une motion de rejet préalable à son arrivée dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale. Une décision contre-intuitive, prise par le rapporteur du texte lui-même, Julien Dive, pour contourner les milliers d’amendements de la gauche. Ainsi rejeté, le texte sera envoyé en commission mixte paritaire lundi 30 juin où les défenseurs du texte peuvent espérer un équilibre plus avantageux, notamment parce que le Sénat y est majoritairement favorable.
Même destin pour la proposition de loi relative à la validation de l’autoroute entre Castres et Toulouse. Frontalement opposée au texte, La France insoumise a déposé une motion de rejet préalable… votée par le socle gouvernemental, pourtant partisan de la proposition de loi.
Une stratégie délibérée pour éviter les centaines d’amendement de la gauche, et préférer la commission mixte parlementaire au débat dans l’hémicycle. Ulcérée par le procédé, La France insoumise a qualifié la manœuvre de « détournement de procédure », et de « 49.3 parlementaire ». La méthode pourrait pourtant bien s’implanter durablement.