Comment l’hypothèse d’une censure sur Barnier remet le PS au centre de l’attention
POLITIQUE – Attablé dans un restaurant parisien, un sénateur socialiste savoure : « Nous sommes redevenus attractifs ». Proche d’Olivier Faure, l’élu regarde avec malice le nombre d’adhésions au PS grimper en flèche depuis la dissolution et la place centrale retrouvée, selon lui, par son parti à l’Assemblée nationale. Une place de choix que conforte la perspective d’une motion de censure adoptée contre le gouvernement de Michel Barnier dans les prochaines semaines.
« Nous sommes conscients de notre rôle pivot. De nous dépendent beaucoup de choses », affirme un cadre PS au HuffPost, non sans crainte de gonfler exagérément les muscles. Au gouvernement aussi, on se rend compte du poids que représentent les socialistes.
Dans une interview au Parisien publiée ce week-end, la porte-parole Maud Bregeon a tenté de lancer un appel aux députés PS, pour qu’ils « sortent de leur soumission à Jean-Luc Mélenchon » et qu’ils « viennent autour de la table ». En français : qu’ils renoncent à la censure. « Je sais que certains y sont prêts », tranche Maud Bregeon, qui croit savoir que les socialistes « ont une responsabilité immense » car ils se situent « à la croisée des chemins ».
Des mots qui claquent, destinés à accroître la pression sur les épaules des députés emmenés par Boris Vallaud et à les convaincre d’accorder un sursis au gouvernement Barnier. Au moins durant quelques mois. Sinon c’est « une France sans budget ni gouvernement » qui se profile, attaque la porte-parole du gouvernement (alors que le scénario d’un « shutdown » à l’américaine est institutionnellement impossible en France). Après le RN, accusé de vouloir installer le « chaos » en ouvrant la porte à un vote de la motion de censure, c’est désormais au tour du PS de prendre les claques.
« Brutalité antidémocratique »
« Le groupe PS, qui compte un ancien président de la République, est-il prêt à voter une motion de censure avec Mathilde Panot et Marine Le Pen pour faire tomber le gouvernement et provoquer une instabilité économique et institutionnelle ? », fustige un proche de Michel Barnier dans La Tribune dimanche. Les socialistes, eux, répètent qu’il n’y a pas d’autre chemin que celui de la censure. « Nous déposerons et voterons les motions de censure chaque fois que ce qui nous est présenté par le gouvernement est contraire à nos valeurs et aux intérêts du plus grand nombre. Le respect de nos électeurs passe par là », défend le Premier secrétaire du PS Olivier Faure. Le même juge que « la gauche doit être appelée à gouverner » en cas d’échec de l’actuel exécutif.
Avec les trois autres chefs du Nouveau Front populaire (NFP), il a signé le 21 novembre dans le Monde une tribune étrillant un budget qui « prolonge la casse sociale », n’agit pas suffisamment contre le dérèglement climatique et promeut « la brutalité antidémocratique ». Ce à quoi Olivier Faure, Manuel Bompard, Marine Tondelier et Fabien Roussel répondent par le dépôt d’une motion de censure. À ce titre, 73 % des sympathisants PS souhaitent que le gouvernement soit renversé, selon un sondage Ipsos pour La Tribune dimanche dévoilé le 24 novembre.
« Le PS cherche des alliés »
Reste qu’en cas de renversement du gouvernement, le plus dur commence. Les socialistes ne parviennent pas à se mettre d’accord sur la suite. Le maire de Saint-Ouen Karim Bouamrane plaide pour un « gouvernement technique ». « Paix des braves, chacun reprend ses billes, et on se prépare pour les prochaines élections », a défendu sur Sud Radio l’élu connu pour ses positions hostiles à La France insoumise. À l’inverse, le patron des députés roses Boris Vallaud a expliqué sur franceinfo vouloir entamer une discussion avec tous les groupes parlementaires, excepté le RN, afin de chercher des convergences et construire des passerelles. Une stratégie qui ressemble à celle édictée par le député Philippe Brun cet été. Il plaidait, un peu à contrecourant, pour « un accord de non-censure » avec les macronistes.
Ces louvoiements suscitent l’agacement de Jean-Luc Mélenchon, qui suspecte ses alliés de chercher à construire « un nouveau socle commun avec d’autres à la place du Nouveau Front populaire ». Le triple candidat à l’élection présidentielle tranche dans le vif : « Le PS cherche des alliés. Mais ce sera sans LFI ». La coalition du NFP semble battre de l’aile, avec ses deux extrémités – le PS et LFI – qui tirent chacune la couverture vers soi. Heureusement pour les partisans de l’union, à plus courte échéance, la gauche dans son ensemble votera en faveur de l’abrogation de la réforme des retraites, déposée par La France insoumise dans sa niche parlementaire de jeudi. Un bon moyen de ressouder les liens… Avant une période de troubles où le bateau NFP devrait se remettre à tanguer.
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