Comment un « acte politique » socialiste sert le gouvernement sur la Nouvelle-Calédonie
POLITIQUE – « En déposant cette proposition de loi, je n’imaginais pas un seul instant qu’elle viendrait sauver la mise du gouvernement ». Patrick Kanner, le président du groupe socialiste, écologiste et républicain (SER) au Sénat, ne boude pas son plaisir. Ce mercredi 23 octobre, la Chambre haute se penche sur un texte déposé presque symboliquement par les socialistes… et qui in fine, aide le gouvernement à retirer le caillou calédonien de sa chaussure.
En Nouvelle-Calédonie, les élections provinciales permettent de renouveler les assemblées des trois provinces de l’archipel. De la composition de ces assemblées dépend ensuite celle du gouvernement local. Le scrutin devait initialement se tenir avant le 15 décembre 2024 et c’est dans cette perspective que le gouvernement Attal avait accéléré sur la réforme du dégel du corps électoral avec les conséquences que l’on sait : 13 morts, 2,2 milliards d’euros de dégâts et un tissu économique et social extrêmement dégradé.
Suspendu après la dissolution, le projet de réforme a ensuite été enterré par le Premier ministre Michel Barnier lors de sa déclaration de politique générale, début octobre. Il annonce en parallèle le report des élections au plus tard « fin 2025 ». Sauf que… Après le passage du Premier ministre dans l’hémicycle, le Conseil d’État alerte le gouvernement : pour que le report des élections soit effectif, la nouvelle loi doit être promulguée avant le 17 novembre. Or, les délais sont impossibles à tenir au vu des diverses vérifications nécessaires. C’est à ce moment que le Conseil d’État évoque la proposition « déposée le 16 septembre par l’individu Kanner », raconte au HuffPost l’intéressé.
« Instinct » socialiste
Septembre 2024, la France se trouve sans gouvernement et le calme n’est pas encore revenu en Nouvelle-Calédonie après le pic de violences du mois de mai. Les sénateurs socialistes s’interrogent : pourquoi ne pas déposer un texte pour repousser les élections provinciales ? « Nous avons arbitré en nous disant que c’était l’occasion, dans cette période de construction gouvernementale, de rappeler notre position qui a toujours été celle de donner du temps au dialogue », raconte Patrick Kanner qui portera le texte.
Dans leur proposition de loi organique, les sénateurs socialistes proposent de reporter les élections au plus tard au 30 novembre 2025 afin de favoriser le dialogue sur le dégel du corps électoral et plus largement sur l’avenir institutionnel de l’archipel. « A minima, c’était un acte politique. Mais je ne vous cache pas que quand je l’ai déposée le 16 septembre, je n’imaginais pas un seul instant qu’elle viendrait sauver la mise du gouvernement. »
Des échanges ont lieu entre le ministre des Outre-mer François-Noël Buffet et les sénateurs socialistes. C’est acté, le gouvernement soutiendra la proposition PS sans laquelle « il aurait été un petit peu dans la difficulté », souligne avec gourmandise Kanner, fier de « l’instinct » de son groupe.
« Tout le monde est d’accord pour donner du temps au temps »
Le 16 octobre, les sénateurs approuvent en commission le report des provinciales. Il devrait en être de même dans l’hémicycle ce mercredi car « tout le monde est d’accord pour donner du temps au temps », anticipe-t-on chez les socialistes, où, on évoque aussi le fort risque de recours et d’annulation des élections, si elles étaient maintenues fin 2024.
Quid de l’Assemblée nationale où le texte arrive le 6 novembre ? « Je pense qu’il y aura une majorité, c’est dans l’intérêt de tous », se veut confiant Patrick Kanner. Une source socialiste se montre un peu plus hésitante sur l’issue à l’Assemblée, mais veut croire qu’il en sera de même.
Mardi 22 octobre, à la veille de l’arrivée du texte en séance au Palais du Luxembourg, le Congrès calédonien a aussi voté en faveur du report, avec 47 voix pour, 1 contre et 2 abstentions, rapporte La 1re. Après des réticences, les indépendantistes – opposés au dégel du corps électoral pour rappel – ont finalement voté pour, « rassurés » par leurs échanges avec François-Noël Buffet lors de sa venue dans l’archipel quelques jours plus tôt. Les loyalistes, favorables à la réforme électorale, ont fait de même. De bon augure pour les débats qui s’ouvrent à Paris.
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