Politique

État d’urgence, aide à court et long terme, ce que les Mahorais attendent de Macron

POLITIQUE – Cinq jours après le passage du cyclone Chido qui a ravagé Mayotte, le président de la République Emmanuel Macron arrive ce jeudi 19 décembre dans l’archipel des Comores. Alors que la situation sur place reste catastrophique et le bilan encore provisoire, les annonces du président de la République sont très attendues, avec un double enjeu : parer au plus pressé sans négliger le long terme.

Selon des chiffres officiels provisoires, le cyclone a fait au moins 31 morts et 1 373 blessés, et les dégâts matériels sont considérables. « À son arrivée, le président de la République effectuera une reconnaissance aérienne du territoire sinistré, avant de se rendre dans un hôpital où il fera un point de situation avec l’ensemble des acteurs engagés », a fait savoir son entourage. Il se rendra ensuite dans « un quartier détruit » pour échanger avec les secours, avant un point sur la situation de l’île avec les élus, ajoute-t-on de même source.

Outre le préfet, les quatre parlementaires mahorais sont aussi présents sur place : les députées Estelle Youssouffa (LIOT) et Anchya Bamana (RN), ainsi que les sénateurs (RDPI) Saïd Omar Oili et Salama Ramia. Et ils ont, comme les élus locaux mahorais, des attentes bien identifiées.

· Déclarer l’état d’urgence et l’état de catastrophe naturelle

La demande d’instauration de l’état d’urgence émane de la députée Youssouffa ainsi que du président du conseil départemental Ben Issa Ousséni. « Le déclenchement rapide de l’état d’urgence (permettra) de garantir la sécurité des personnes et des biens et de renforcer les moyens des secours locaux et ceux dépêchés sur place, et d’assurer la coordination des interventions », écrit Ben Issa Ousséni dans un courrier adressé au Premier ministre François Bayrou le 18 décembre.

Les autorités redoutent notamment des pillages, dans les commerces ou habitations désertées. « Il est possible de déclencher l’état d’urgence à la suite d’une catastrophe naturelle ou climatique », indique à franceinfo le juriste Nicolas Hervieu, « mais à condition qu’il existe des troubles à l’ordre public, et que cette mesure puisse y répondre. » Pour l’instant, seul le couvre-feu a été décrété de 22h à 4h du matin. Quelque 2 000 membres des forces de l’ordre sont ou vont être mobilisées.

Deuxième demande sur le court terme du président du Conseil départemental : reconnaître l’état de catastrophe naturelle. Cette reconnaissance permet d’accélérer les procédures administratives et plus particulièrement de faire fonctionner les assurances. Le Premier ministre François Bayrou a déjà fait savoir qu’il serait enclenché. Toutefois, sa portée réelle s’annonce limitée au vu du peu de ménages assurés sur l’archipel.

Avant l’arrivée d’Emmanuel Macron, le gouvernement a en tout cas déclenché l’état de « calamité naturelle exceptionnelle » à Mayotte, une première depuis la création de cet outil juridique en 2022. Il permet notamment d’alléger les formalités pour assurer des réparations urgentes et répondre aux besoins en matière de gestion des déchets, de rétablissement des réseaux d’électricité et ceux d’assainissement, ou encore de travaux pour les infrastructures endommagées comme les routes.

· Apporter une aide immédiate en eau et alimentation

C’est la priorité numéro 1 : assurer les besoins vitaux en eau et en nourriture, alors que « les réserves faites vendredi commencent à s’épuiser », selon Estelle Youssouffa jointe par franceinfo. Selon le ministre démissionnaire des Outre-mer François-Noël Buffet le 18 décembre, l’alimentation en eau « fonctionne à 50 % » mais elle présente un risque de « mauvaise qualité ». L’électricité, elle, n’est que « partiellement remise en route ». Un « pont maritime civil » a été mis en place depuis la Réunion pour acheminer quelque 200 conteneurs, avec l’équivalent de « millions de litres d’eau ». Des distributions ont aussi été organisées mais elles demeurent insuffisantes.

Contactée par CNews, la députée RN Anchya Bamana estime que « ça ne va pas assez vite ». « Le minimum aujourd’hui c’est l’eau. Et au niveau des travaux, ça n’avance pas. Les gens n’ont pas d’eau, dans les maisons ou pour boire tout simplement », a-t-elle insisté en duplex depuis Petite-Terre, une des deux îles de l’archipel. Le sénateur Saïd Omar Oili livre le même constat d’urgence : « Depuis samedi, les survivants n’ont pas mangé. Aujourd’hui seulement on a commencé à distribuer de l’eau. Les gens ont droit à deux bouteilles, une boîte de sardines et une boîte de corned-beef par personne », alerte-t-il dans une interview le 18 décembre au Monde. Emmanuel Macron arrivera avec quatre tonnes de fret alimentaire et sanitaire, a fait savoir l’Élysée, avant d’autres annonces.

· (Re)construire sur le long terme

À ce stade, les demandes des élus visent surtout à assurer le minimum vital pour la population. Mais certains pensent déjà à la suite : la reconstruction de l’archipel. « Cette tragédie est pour Mayotte la tragique opportunité de pouvoir se construire », a déclaré sur franceinfo Estelle Youssouffa le 17 décembre. « On ne peut que se reconstruire mais mieux, de manière cohérente, durable, ambitieuse, qui soit à la hauteur de nos besoins », fait-elle valoir, en réclamant un « plan Marshall ». Le président du Conseil départemental en appelle de son côté à une mobilisation similaire à celle de Notre-Dame, estimant que la reconstruction « va se chiffrer en milliards » d’euros.

Bruno Retailleau a annoncé la nomination d’un délégué interministériel pour « anticiper la phase de reconstruction ». Le sénateur Saïd Omar Oili réclame, lui, une commission d’enquête sur la gestion de la crise, « en colère » face à l’absence de dispositifs d’urgence et de prévention en dépit des nombreux rapports rendus ces dernières années.

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