Politique

Gabriel Attal va confirmer à l’Assemblée sa stratégie de l’omniprésence

POLITIQUE – Seul en scène. Gabriel Attal va se présenter sans ses ministres, ce mercredi 3 avril, pour répondre aux traditionnelles « questions au gouvernement » à l’Assemblée nationale. Le locataire de Matignon expérimente une nouvelle formule inédite jusqu’à fin mai : 45 minutes de face-à-face avec les députés.

L’exercice, relativement proche de celui du « Prime Minister’s Questions » le mercredi midi à la Chambre des communes britannique, a été proposé par Yaël Braun-Pivet, la présidente de l’Assemblée, à Élisabeth Borne en son temps. Si la Première ministre n’a pas donné suite, son successeur Gabriel Attal a lui accepté le principe.

« Je ne me dérobe jamais », s’est-il justifié le 28 mars dernier aux 20 heures de TF1, et à nouveau ce 2 avril.

Super porte-parole

L’exercice est en tout cas une aubaine, ou presque, pour Gabriel Attal, chef de gouvernement rompu aux joutes verbales et qui a fait de l’omniprésence médiatique sa méthode politique. C’est au cours de l’interview sur TF1 le 28 mars que le locataire de Matignon a par exemple confirmé son intention de réformer l’assurance chômage, après avoir disserté sur la dette ou sur le dérapage du déficit public l’année dernière. De quoi reléguer au second plan Bruno Le Maire et Catherine Vautrin, les titulaires des portefeuilles des Finances et du Travail, pourtant qualifiés de poids lourds de l’équipe.

Car en réalité, ce capitaine, qui a « emmené la cause de l’école » avec lui à Matignon, essaie d’être sur tous les ballons. Camper le rôle de ministre de l’Éducation nationale pour confirmer les groupes de niveaux. S’inviter à Science Po pour évoquer la dernière polémique en date. Désormais, le mercredi, il sera amené à répondre, seul, sur tous les périmètres de ses ministres… De l’agriculture, aux affaires étrangères en passant par les sports ou la transition écologique.

Telle est la méthode. « Gabriel Attal est quelqu’un de très volontaire et ambitieux. Il a envie d’occuper le terrain, quitte à être partout et à la place des uns et des autres », résume la spécialiste en communication politique Émilie Zapalski auprès du HuffPost en pointant une stratégie d’omniprésence « impressionnante », « à un point jamais vu depuis le début des quinquennats Macron. »

Ceci, au risque de crisper jusque dans sa propre majorité. « Pour moi un gouvernement c’est une équipe. Là, on incarne vraiment la verticalité », regrette ainsi le président des députés Modem Jean-Paul Mattei, à propos de la nouvelle formule des QAG. Le parti centriste, comme celui d’Édouard Philippe Horizons, a d’ailleurs voté contre le seul en scène du Premier ministre.

« Trop de com’ tue le fond »

Il faut dire que cette stratégie de « communication poussée à l’extrême », selon les mots d’Émilie Zapalski, comporte son lot de risques. Outre le fait d’invisibiliser les autres membres du gouvernement, elle peut dévaluer le crédit accordé à la parole politique tout en favorisant une forme de déception chez les Français.

« Gabriel Attal poursuit sa stratégie construite sur beaucoup de communication et des points qui font mouche au sein de la société française, comme l’abaya, l’uniforme, le harcèlement scolaire », estime ainsi la spécialiste.

Problème : cette méthode, appliquée de la rue de Grenelle à Matignon, « ne traite pas les questions de fond. » Pire, elle offre à l’auditoire un décalage entre « les informations qui font l’actualité », comme le déficit public ou les menaces dans les établissements scolaires, « et la communication maîtrisée du Premier ministre. » En résumé, « trop de com’ tue le fond », estime Émilie Zapalski et masque mal « l’impuissance législative » de l’exécutif par temps de majorité relative.

Dans ce contexte, il n’est sans doute pas anodin de voir l’état de grâce de Gabriel Attal s’évaporer quelque peu au fil des mois. Force est de constater que la popularité insolente du Premier ministre, qui lui a permis d’être nommé par Emmanuel Macron, résiste mal à Matignon. Dans notre baromètre mensuel mesuré par YouGov, Gabriel Attal a effectivement perdu quatre points d’opinions favorables depuis qu’il a pris la suite d’Élisabeth Borne. « Sa communication est tellement poussée à l’extrême que ça risque de se voir… », souffle Émilie Zapalski. Si ce n’est déjà le cas.

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