Le Ceta appliqué malgré un rejet du Parlement ? Valérie Hayer indigne l’opposition
POLITIQUE – « Le plus simple c’est de supprimer le Parlement. Ça ira plus vite », tempête Fabien Gay, sénateur communiste de Seine-Saint-Denis. En cause : les propos ce lundi 25 mars de la tête de liste Renaissance Valérie Hayer aux élections européennes 2024. Elle a assuré que le Ceta (le traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada rejeté vendredi par le Sénat) pourra s’appliquer même en cas de vote défavorable de l’Assemblée nationale fin mai.
La France « a des process institutionnels sur ces questions-là », a expliqué la candidate sur franceinfo, se disant par ailleurs « convaincue que cet accord, il est bon pour nos agriculteurs ». « Ce sera la décision du gouvernement de voir quelle position sera prise », si l’Assemblée le rejetait, a-t-elle ajouté. Pourrait-il être appliqué même si les deux chambres votent contre ? « Il pourrait », a-t-elle répondu.
Le Ceta a été signé en 2016 et adopté en 2017 à l’échelle européenne. En France, il a été adopté (de justesse) par l’Assemblée nationale en 2019 mais n’a jamais été soumis au Sénat ensuite. Dénonçant un « déni de démocratie » du gouvernement, le groupe CRCE-K (Groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky) l’a mis à l’ordre du jour de sa niche parlementaire le 21 mars. Il a été massivement rejeté et les députés communistes ont annoncé dans la foulée le mettre à l’ordre du jour à l’Assemblée le 30 mai, où il a là aussi de grande chance de connaître le même sort : la gauche et une partie de la droite y étant opposés, sans oublier de possibles dissensions dans les rangs macronistes.
L’opposition fustige la « conception de la démocratie »
Mais, comme le souligne la tête de liste Renaissance, un double rejet du Parlement ne changerait pas forcément la donne. La législation européenne prévoit dans ce type de situation qu’en cas de non-ratification d’un traité, son application provisoire soit remise en cause dans toute l’Europe… si et seulement si le pays concerné le notifie à Bruxelles. Or, rien dans les textes n’oblige le gouvernement français à le faire. La preuve par l’exemple : en juillet 2020, le Parlement de Chypre a rejeté le Ceta mais le gouvernement chypriote n’a jamais notifié ce rejet à l’UE, ce qui permet à l’accord de continuer de s’appliquer.
Le savaient-ils, ne le savaient-ils pas ? Le rappel des lois de Valérie Hayer a en tout cas fait réagir des élus d’oppositions de tous bords. « Belle conception de la démocratie », raille ainsi le député LR de Belfort Ian Boucart quand le RN Thibaut François ironise sur sa « grande considération pour les parlements nationaux ».
Dressant un parallèle avec l’article 49.3 de la Constitution française, la tête de liste LFI Manon Aubry accuse, elle, le gouvernement de vouloir « passer en force » sur cet accord, quand sa collègue Leïla Chaïbi fustige un « déni de démocratie en Macronie ».
Le Ceta (« Comprehensive Economic and Trade Agreement ») supprime notamment les droits de douane sur 98 % des produits échangés entre l’Union européenne et le Canada. Soutenu par certaines filières (viticole par exemple), il est fortement critiqué par les éleveurs français qui épinglent des importations de viande à des coûts de revient bien inférieurs aux leurs et produite avec des méthodes moins strictes que celles auxquelles ils sont soumis.
Son inscription à l’ordre du jour par les sénateurs communistes est intervenue dans un contexte de crise agricole doublé d’une campagne pour les élections européennes – et son examen à l’Assemblée est prévu une dizaine de jours avant le rendez-vous dans les urnes. Des manœuvres de « politique politicienne », pour l’eurodéputée du camp présidentiel.
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