Politique

Le Conseil constitutionnel censure un article de la loi immigration (et agace Retailleau)

POLITIQUE – Le Conseil constitutionnel mué en une « bande de gauchistes » ? C’est peu ou prou la tonalité des réactions dans les relais réactionnaires après la récente décision des Sages en matière de rétention administrative des demandeurs d’asile. Elle a été rendue publique ce vendredi 23 mai, et n’a pas beaucoup plu au ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, selon nos confrères de l’Opinion.

Après la loi immigration dite « Darmanin » adoptée fin 2023 avec les voix de la droite et du RN, plusieurs associations avaient saisi l’institution d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) contre une disposition permettant de placer en centre de rétention un demandeur d’asile présentant une menace à l’ordre public ou ayant déposé une demande d’asile auprès d’une autorité administrative autre que celle compétente avec un risque de fuite.

Ce qui gênait particulièrement les associations, c’est que la disposition était aussi applicable pour un demandeur ne faisant pas l’objet d’une procédure d’éloignement (OQTF ou expulsion). De quoi selon elles, rendre cette mesure contraire à l’article 66 de la Constitution qui protège la liberté individuelle. La Cimade, qui dénonçait déjà des placements tous azimuts pour des motifs « dérisoire » à force de circulaires, pointait dans la QPC qu’« il n’existe aucune définition de la menace pour l’ordre public qui est interprétée de manière très large ».

Les entraves à la liberté individuelle doivent être « adaptées »

Évoquant une « rigueur non nécessaire », les Sages ont donné raison aux associations en estimant que le législateur n’avait pas été assez équilibré entre « la prévention des atteintes à l’ordre public et, d’autre part, le respect des droits et libertés reconnus à toutes les personnes qui résident sur le territoire de la République ».

Concrètement le Conseil constitutionnel juge que la notion de « menace à l’ordre public » reste trouble, et que le placement en rétention – encore une fois en dehors de toute procédure d’expulsion – ne peut pas se faire uniquement sur ce fondement, sans tenir compte de « la gravité » ou de « l’actualité de cette menace ». Et de rappeler que les entraves à la liberté individuelle doivent être « adaptées, nécessaires et proportionnées aux objectifs poursuivis ». Un reproche similaire a été adressé au « risque de fuite », jugé pas « assez caractérisé » par les Sages.

Lesquels reconnaissent par ailleurs que la sauvegarde de l’ordre public et la lutte contre l’immigration irrégulière sont des objectifs à valeur constitutionnelle, et que le placement en rétention vise à « éviter notamment que des étrangers en situation irrégulière se prévalent du droit d’asile dans le seul but de faire obstacle à leur éloignement du territoire national ».

À Beauvau, indique l’Opinion, la censure a immédiatement fait toussoter, et l’on regrette « une décision qui fait primer les droits individuels sur la sécurité des Français ». Le locataire de la place Beauvau aurait décidé de s’exprimer prochainement sur cette décision. Du côté de l’extrême droite, l’élu RN Hélène Laporte, dont le parti a pourtant permis l’accession de Richard Ferrand à la présidence du Conseil constitutionnel, accuse notamment l’institution de faire passer au second plan « la sécurité des Français ». La loi immigration portée par Gérald Darmanin, désormais Garde des Sceaux, avait été assez largement censurée par le Conseil constitutionnel après son adopté à l’Assemblée, censurant 32 des 86 articles du texte.

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