Politique

Le palmarès impressionnant du juge Renaud Van Ruymbeke, bête noire des politiques

POLITIQUE – L’autre monsieur propre. Renaud Van Ruymbeke, ancien juge d’instruction devenu figure de la lutte anticorruption en France, est décédé à l’âge de 71 ans. « La France perd un grand magistrat et la Justice un immense serviteur », a salué le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti ce vendredi 10 mai, en adressant ses « condoléances émues à sa famille et à ses proches. »

À la retraite depuis 2019, cet homme à la silhouette longiligne, portant moustache et fines lunettes, auteur de plusieurs livres, a notamment été l’un des piliers du pôle financier du tribunal de grande instance de Paris dans les années 2000 et 2010. Il a instruit certains des dossiers politico-financiers les plus sensibles des dernières décennies, devenant tour à tour la bête noire de la gauche puis de la droite.

Son nom est notamment associé à l’affaire Cahuzac, aux turpitudes de l’affaire Karachi ou à la fameuse affaire Clearstream. Et même aux Balkany. Retour sur ce palmarès impressionnant en quelques affaires marquantes.

Robert Boulin, dossier Urba-Sages…

Renaud Van Ruymbeke se heurte au pouvoir dès ses débuts à Caen, à l’époque de la droite giscardienne. À 27 ans, il instruit une affaire marquée par le suicide en 1979 du ministre du Travail de « VGE », Robert Boulin. Cité dans une affaire d’escroquerie immobilière, ce dernier accusera le juge d’avoir voulu « faire un carton sur un ministre ». Un dossier qui l’a « vacciné pour la suite », confiait Renaud Van Ruymbeke en 2011.

Quelque temps plus tard, à la fin des années 1980 et au début des années 1990, Renaud Van Ruymbeke se frotte cette fois-ci au Parti socialiste. Il hérite du délicat dossier Urba-Sages sur le financement du PS et organise une perquisition surprise au siège des roses.

Il met ensuite en examen l’ancien trésorier du parti, alors président de l’Assemblée nationale, Henri Emmanuelli, et devient la cible de l’ère Mitterrand. « Vous nous rappelez les sections spéciales à Vichy », lui lance-t-on rue de Solférino. « Je fais simplement mon travail », répond ce fils de haut fonctionnaire. Emmanuelli sera finalement condamné à dix-huit mois de prison avec sursis et deux ans de privation des droits civiques.

… Affaire Clearstream, Karachi

La route du magistrat croise celle de Nicolas Sarkozy pour la première fois au milieu des années 2000 au moment de l’affaire Clearstream, théâtre de violents affrontements entre celui qui deviendra président de la République et Dominique de Villepin.

Renaud Van Ruymbeke reste alors sous la menace d’une procédure disciplinaire pendant six ans, engagée parce qu’il avait parlé au corbeau de l’affaire, Jean-Louis Gergorin, en dehors du cadre judiciaire. Il se défend en invoquant « le respect de la parole donnée » à un informateur, se décrivant surtout victime d’« une tentative de déstabilisation » tandis que Nicolas Sarkozy, s’estimant sali, dénonce l’action d’un « corbeau allié avec un juge ».

À partir de 2010, le magistrat instruit un autre brûlot : le volet financier du dossier Karachi sur des soupçons de financement illicite de la campagne d’Édouard Balladur, dont Nicolas Sarkozy était le porte-parole en 1995. Ce n’est pas tout.

Sans oublier Cahuzac ou Balkany

Le nom de Renaud Van Ruymbeke est inévitablement associé à celui de Jérôme Cahuzac. Avec Roger Le Loire, il est désigné en 2013 pour mener l’instruction liée à l’ancien ministre du Budget de François Hollande, accusé de blanchiment de fraude fiscale et soupçonné d’avoir détenu un compte en Suisse. Il est finalement condamné en 2018 pour fraude fiscale à quatre ans de prison, dont deux avec sursis, et cinq ans d’inéligibilité.

Enfin, la route du juge croise celle des époux Balkany, toujours au milieu des années 2010, quand il enquête sur des soupçons de blanchiment de fraude fiscale, entre autres. Quelques années plus tard, en 2018, c’est Richard Ferrand à qui Renaud Van Ruymbeke donner des sueurs froides. Doyen des juges d’instruction du pôle financier de Paris, il est alors désigné pour enquêter sur des soupçons de prise illégale d’intérêts visant celui qui préside alors le groupe des députés la majorité macroniste. L’un de ses tout derniers dossiers.

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