Politique

Le RN se dit « prêt à gouverner » mais certaines de ses investitures montrent le contraire

POLITIQUE – L’assertion est martelée depuis l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale. Le Rassemblement national est « prêt à gouverner », répètent Marine Le Pen et Jordan Bardella. Une affirmation visant à contrer le procès en amateurisme, voire en incompétence, instruit par ses adversaires et à dissiper son image sulfureuse en revendiquant le titre honorifique de « parti de gouvernement ».

L’aboutissement, en somme, de la « normalisation » souhaitée par le RN, mais qui se heurte à une réalité bien moins reluisante pour le parti lepéniste. Car, tout performatif qu’il soit, ce discours tranche avec de nombreux profils problématiques investis par le RN aux élections législatives anticipés.

Propos racistes et antisémites

Ce lundi 17 juin, Libération a mis en évidence des publications aux relents racistes, antisémites et complotistes partagées par plusieurs candidats investis par le RN. On citera en exemple le cas de Françoise Billaud, candidate dans les Côtes-d’Armor, qui partageait en juillet 2021 une photo à la mémoire de Philippe Pétain ou, le 8 mai dernier, une publication évoquant le prêtre collaborationniste Jean-Marie Perrot, tué par un résistant communiste en 1943. Autre cas éloquent, celui de Joseph Martin. Candidat RN dans le Morbihan, l’entrepreneur de 70 ans avait tweeté ceci en 2018 : « le gaz a rendu justice aux victimes de la Shoah ».

Outre l’archéologie numérique des candidats RN, certains propos tenus en public par certains d’entre eux rappellent tout ce que le parti voudrait faire oublier. À l’image du maire, ex-UDI, de Cholet Gilles Bourdouleix. L’ancien député, qu’Éric Ciotti a apporté dans ses bagages avait fait parler de lui en 2013 pour avoir dit lors d’une altercation avec des gens du voyage que « Hitler n’en avait peut-être pas tué assez ».

Cette contradiction entre le récit médiatique et le profil des candidats s’exprime également sur l’international. C’est ainsi que le Rassemblement national a investi des personnalités ouvertement russophiles ; exemple avec l’avocat Pierre Gentillet, ancien attaché parlementaire de Thierry Mariani. Président-fondateur du Cercle Pouchkine visant au rapprochement franco-russe, cet habitué des plateaux de CNews (et des voyages en Crimée pour blanchir la propagande russe) a été parachuté dans le Cher sur proposition de Jordan Bardella. Il ne s’agit pas d’un cas isolé, puisque l’ex-député UMP Jacques Myard (également complaisant à l’égard la Russie poutinienne) se présente aussi sous la bannière RN, tout comme Rémy Berthonneau, ancien représentant de Cifal à Moscou, entreprise soupçonnée par la justice de corruption d’agent public étranger.

Un casting surprenant pour un parti qui nie (malgré les évidences) toute complaisance à l’égard du régime de Vladimir Poutine et assure que l’Ukraine bénéficiera de son soutien. Mediapart comptabilise pas moins de 15 candidats investis ayant entretenu des liens avec la Russie de Vladmir Poutine.

Un « plan Matignon » pas vraiment abouti

Même contradiction au sujet de l’Europe. Alors que Marine Le Pen et Jordan Bardella réfutent toutes velléités d’aboutir à un Frexit, le Rassemblement national a investi dans la Nièvre Charles-Henri Gallois. Soit le fondateur de… Génération Frexit (micro parti devenu récemment « Reprenons le contrôle » en référence au slogan utilisés par les brexiters en 2016). Ces candidatures qui dissonent radicalement avec le discours actuel du RN posent en réalité la question de la capacité du parti d’extrême droite à se projeter sérieusement vers le pouvoir.

Comme l’écrivait Le Monde, le RN, qui anticipait le scénario d’une dissolution, planche depuis plus d’un an sur un « Plan Matignon ». Une stratégie comprenant le casting des 577 investitures. Or, comment expliquer que, durant tout ce temps, le parti d’extrême droite ne s’est pas assuré de choisir des candidats correspondant à son objectif de normalisation ? Comment Jordan Bardella et Marine Le Pen imaginent présenter l’image d’une formation capable de gouvernement à travers cet assemblage bigarré, offrant son lot de profils sulfureux et surtout contraires à la ligne qu’il revendique ? « Nous voulons dire aux Français que nous sommes un parti sérieux, un parti de gouvernement », assurait récemment la députée sortante Edwige Diaz. Ce qui ne saute pas aux yeux quand on se penche sur les candidats.

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