Macron et le gouvernement sont-ils vraiment responsables des galères des Canadair ?
POLITIQUE – Qu’est-ce qu’on a fait des tuyaux ? Depuis plusieurs jours, des spécialistes et acteurs de la sécurité civile s’inquiètent de l’état de notre flotte d’avions bombardiers d’eau (plus communément appelés Canadair) à l’heure où la canicule s’installe sur le pays.
Selon le décompte de Benoît Quennepoix du syndicat national du personnel navigant de l’aéronautique civile (SNPNAC), seule la moitié des 12 engins stationnés actuellement en France étaient opérationnels dimanche 11 août. Un ratio pas vraiment rassurant.
Quelques jours plus tôt, ce sont les cinq Canadair positionnés à Nîmes, dans le Gard, qui ont dû être cloués au sol, incapables de combattre les feux à cause de pannes récurrentes. « En dix-neuf saisons, j’ai exercé mon droit de retrait pour la première fois », résume Benoît Quennepoix dans Le Monde, en évoquant un mois de juin où seuls deux Canadair, au maximum, étaient disponibles.
Coup de rabot malvenu ?
Dans ce contexte, plusieurs députés de la France insoumise pointent la responsabilité du gouvernement. Selon Hadrien Clouet, c’est la coupe de 53 millions d’euros dans les budgets de la Sécurité civile qui empêcherait le renouvellement et l’entretien des Canadair.
Ce coup de rabot est une réalité. Pour rattraper le dérapage du déficit, le gouvernement (démissionnaire) a décidé en février 2024 de réaliser un plan de 10 milliards d’euros d’économie, dont 50 millions d’euros pris sur les crédits qui devaient, normalement, être alloués notamment aux pompiers et à leur matériel. Mais les choses sont plus complexes.
Car si cette coupe fait tiquer les professionnels du secteur, inquiets eux aussi du manque de moyen de l’État face à des épisodes caniculaires et incendiaires de plus en plus fréquents, d’autres facteurs expliquent les difficultés actuelles.
Le premier a trait à la vétusté de la flotte française (les Canadair ont 25 ans en moyenne), et aux défaillances des chaînes de réparation ou de construction des avions bombardiers d’eau, comme le notent plusieurs médias. Selon RMC, l’entreprise chargée de la maintenance des appareils accumule les retards à cause de graves problèmes d’effectifs, sur fond de conflit social.
Deux Canadair pour la France… En 2028
Le quotidien Le Monde explique quant à lui qu’il a fallu plusieurs années de négociations entre le constructeur aéronautique canadien de Havilland et une poignée de pays européens pour relancer une chaîne de fabrication éteinte, faute de commande ces dernières années. Résultat : un contrat signé le 22 juillet dernier et des avions qui vont arriver au compte-goutte, s’ils finissent par arriver. Sur les douze Canadair commandés, deux sont destinés à la France… en 2028.
C’est d’ailleurs ce que rappelait un autre député insoumis, Florian Chauche, ces derniers mois. Battu lors des législatives anticipées, l’ancien élu avait à de nombreuses reprises alerté les pouvoirs publics sur la nécessité d’œuvrer à l’amélioration d’une « flotte d’aéronefs vieillissante et sous-dimensionnée. » « Les premiers Canadair ne seront pas livrés avant 2028, 2030 », lançait-il par exemple à l’Assemblée, en s’inquiétant au passage de voir des avions produits au Canada, rester au Canada : « ils vont se servir en premier. »
En attendant, le gouvernement continue donc de louer des moyens privés (appareils et pilotes) pour pallier ces difficultés (une dizaine d’hélicoptères et d’avions en 2024). Une chose apparaît en tout cas certaine : la promesse d’Emmanuel Macron, formulée après les mégafeux de l’été 2022, consistant à remplacer la flotte des Canadair à l’horizon 2027, et de la renforcer avec quatre nouveaux appareils, pour un coût de 250 millions d’euros, ne sera pas tenue. Restent les lances et la grande échelle.
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