Pourquoi la réélection de Marine Tondelier à la tête des Écologistes est plus compliquée qu’il n’y paraît
POLITIQUE – Une veste verte a fait irruption dans la vie des Français à l’été 2024. Combien étaient capables, avant la dissolution, de citer le nom de la secrétaire nationale des Écologistes ? La campagne accélérée des législatives, et la mise sur orbite du Nouveau Front populaire, ont permis à Marine Tondelier de gagner en visibilité… et en popularité.
Ses larmes un matin dans le studio de France Inter, son appel à l’union pour 2027 aux côtés de Lucie Castets, son rôle de trait d’union du NFP… La seule femme cheffe de parti à gauche, élue locale à Hénin-Beaumont, territoire d’adoption de Marine Le Pen, s’est imposée comme une figure incontournable de la scène politique. Jusqu’à entrer dans le Top 100 des leaders qui influencent le plus la planète selon le Time Magazine, et recevoir le prix de la révélation politique remise chaque année par le Trombinoscope.
Ses partenaires n’en disent que du bien : « fiable », « sincère », « loyale » sont parmi les mots qui reviennent le plus. « Elle a vraiment joué un rôle d’incarnation de l’écologie politique et est probablement la secrétaire la plus identifiée par les Français », confiait l’ex-secrétaire national et eurodéputé David Cormand à France Info il y a quelques semaines.
Pourtant, la popularité apparente de l’ancienne assistante parlementaire de Cécile Duflot cache mal quelques frustrations en interne. Si son siège de patronne des Verts, remis en jeu à l’occasion du congrès qui aura lieu à Pantin les 26 et 27 avril, n’est pas menacé, la méthode Tondelier est tout de même en question. Alors que les candidatures concurrentes réclamaient un débat, que proposaient d’organiser France Info ou Politis, la secrétaire nationale a refusé. Au lieu de quoi s’est tenue une discussion en ligne accessible uniquement aux adhérents. « Un débat interno-interne », moque un stratège du parti, regrettant l’absence de « vrai débat indépendant et public ».
Une gestion « verrouillée et personnelle » ?
« Marine Tondelier fuit le débat de fond. Toute différence de positionnement politique est perçue comme une attaque personnelle », attaque la députée de Paris Sandrine Rousseau dans l’Express. La candidate de son courant, Harmonie Lecerf Meunier, adjointe au maire de Bordeaux et représentante d’une ligne écoféministe, a regretté au cours du débat une gestion « verrouillée, personnelle et solitaire » du pouvoir au sein du parti. Et d’ajouter : « Je reconnais la médiatisation de Marine Tondelier, mais il nous faut aller au-delà. En termes d’incarnation on n’avance pas. Elle doit être plus collective. Ce congrès a été compliqué, les règles ne sont pas tombées du ciel, elles ont été décidées ».
Militants et cadres reprochent à la secrétaire nationale d’avoir changé de manière précipitée les règles de fonctionnement du parti. Début février, en conseil fédéral, elle est intervenue pour empêcher tout parlementaire d’exercer la fonction de porte-parole. Une manœuvre pour bloquer la sénatrice Mélanie Vogel, dont les visées n’avaient échappé à personne ? Rebelote quelques semaines plus tard, avec l’exclusion du maire de Grenoble Éric Piolle de la quasi-totalité des boucles internes. Sa faute ? Avoir lui aussi louché sur le porte-parolat, en dépit de l’interdiction de cumuler le poste avec son mandat d’édile.
« Une passivité » face au PS et à LFI
Cet enchaînement de secousses internes peut-il causer du tort à Marine Tondelier ? Le premier des trois scrutins prévus dans le cadre du congrès n’ont pas été franchement une réussite pour la patronne. En plus d’un taux de participation historiquement faible à 35 %, la native de Bois-Bernard n’a recueilli que 54 % des 90 places en jeu du conseil fédéral. Bien loin du score espéré. D’autant que la majorité est fixée, chez les écolos, à 60 %. « Nos règles internes sont tellement compliquées qu’elles ne sont pas accessibles à tous. Elles doivent être plus faciles à comprendre. On ne peut pas se réjouir d’un taux de participation aussi faible », a attaqué Clovis Daguerre, soutien de l’ex-eurodéputée Karima Delli au congrès, lors du débat.
« Tondelier paye le prix d’un manque de stratégie précise et d’une passivité face aux deux gros poissons, socialiste d’un côté, insoumis de l’autre », analyse un député écolo pour Le HuffPost. S’il reconnaît à la secrétaire nationale sortante « un talent pour faire exister nos idées », il regrette lui aussi le manque de collégialité dans la prise de décision. « La Constituante [que Marine Tondelier a proposée début février pour mettre fin aux institutions de la Ve République] était une bonne idée. Mais personne n’en a parlé, parce que c’est sorti n’importe quand et n’importe comment, à un moment où les regards étaient braqués sur notre niche », ajoute-t-il. Marine Tondelier réélue, sans doute, mais pas aussi facilement qu’elle ne l’imaginait.
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