Pourquoi le duel Retailleau – Wauquiez n’intéresse pas que Les Républicains
POLITIQUE – Une bombe à fragmentations. Les adhérents Les Républicains sont appelés à choisir leur nouveau chef ce samedi 17 et dimanche 18 mai, onze mois après le départ psychodramatique d’Éric Ciotti et ses soutiens en direction du Rassemblement national. Qui de Bruno Retailleau ou Laurent Wauquiez remportera la mise ?
Le premier, ministre de l’Intérieur en pleine lumière depuis l’automne, semble être favori si l’on en croît les sondages et les données de popularité. Le second, de l’avis de tous, réalise une campagne remarquable auprès des militants et espère donc coiffer son rival au poteau.
Les deux se sont opposés durement ces dernières semaines, autour de quelques arguments phares. Le député de Haute-Loire accuse le locataire de la Place Beauvau de prendre le risque d’une « dilution » de la droite dans le macronisme en s’accommodant de petits pas au gouvernement. En réponse, le Vendéen vante sa stratégie de responsabilité, source, selon lui, du retour en grâce de son camp dans l’opinion.
Quoi qu’il en soit, le résultat de ce scrutin interne risque de redessiner la partie droite de l’échiquier politique. Avec des répercussions sans doute tous azimuts.
Le gouvernement vote Retailleau
Comme le vote interne au Parti socialiste (pour départager Olivier Faure de ses opposants), la guéguerre LR est effectivement scrutée bien au-delà du parti jadis de Nicolas Sarkozy. Au gouvernement, tout d’abord, les ministres croisent plutôt les doigts pour la victoire… de Bruno Retailleau. Majoritaire chez les personnalités de droite, cette ligne semble également partagée chez les ministres macronistes ou MoDem.
Pas tant pour le profil très conservateur du Vendéen. Mais pour une question de stabilité gouvernementale, puisque Laurent Wauquiez, très critique vis-à-vis de l’action de François Bayrou, a d’ores et déjà indiqué qu’il souhaitait ouvrir un débat sur la participation du parti au gouvernement. On imagine aisément ce que pourrait donner cette discussion si l’Altiligérien prenait les rênes du parti.
Bruno Retailleau « a une bonne dynamique, j’espère qu’il va gagner », résume par exemple sans ambages une ministre macroniste, qui confesse au HuffPost « beaucoup apprécier » le premier flic de France. Un appui globalement partagé, mais aux aspects contre-nature chez Renaissance. En parallèle de ces louanges, plusieurs caciques du parti présidentiel critiquent effectivement les sorties acerbes du ministre de l’Intérieur, toujours plus offensif contre Emmanuel Macron. Certains verraient même d’un bon œil son départ du gouvernement.
C’est le sens en tout cas de messages envoyés par des élus sur leur boucle de discussion, et révélés par la presse cette semaine. « Un parti qu’on a remis au pouvoir et qui nous mange de l’intérieur sans porter aucune action d’ailleurs. À ce niveau de logique… J’avoue que je suis trop couillon pour comprendre à quoi tout cela rime », plaide par exemple la députée Prisca Thevenot, une proche de Gabriel Attal. Tant pis, alors, pour la stabilité du collectif formé autour de François Bayrou.
Au-delà de ces enjeux, l’épilogue du scrutin ce week-end promet quoi qu’il en soit de donner une couleur claire au parti de droite, et de redessiner quelque peu le paysage politique. Rien d’anodin, à deux ans de la présidentielle.
Le RN vote Wauquiez ?
Ainsi, Laurent Wauquiez a déjà annoncé qu’il ne soutiendrait aucune alliance en direction de ce qui fut la macronie pour 2027, préférant envoyer ses mots doux à la zemmouriste Sarah Knafo. Bruno Retailleau s’est montré plus flou, épargnant notamment Edouard Philippe – avec qui il s’est affiché en déplacement – avant de prendre ses distances avec le « bloc central », en fin de campagne.
De quoi faire dresser les oreilles de nombreux cadres dans l’écurie du maire du Havre, où certains se mettent à espérer un futur accord avec le ministre de l’Intérieur, une entente impossible à imaginer à l’heure actuelle avec Laurent Wauquiez. « De toute façon, on avance. Et on verra bien qui veut monnayer son soutien ou pas », élude un cadre prudemment, en citant la guirlande de prétendants pour 2027 comme autant de profils à convaincre pour son patron, seul capable d’accéder au second tour selon les sondages. Rien qu’à droite, les ambitions se bousculent effectivement, de Gérald Darmanin à Bruno Retailleau en passant par le maire de Cannes David Lisnard.
Dans ce contexte effervescent, il est un camp où l’on aimerait clairement voir le ministre de l’Intérieur perdre des plumes ce printemps : le Rassemblement national. Depuis sa nomination sous Michel Barnier, puis son éclosion aux yeux du grand public, Bruno Retailleau est vu comme un danger réel du côté du camp nationaliste pour sa capacité à occuper le terrain régalien, sécuritaire et anti-immigration.
« S’il est en capacité de rester au gouvernement jusqu’en 2027 cela deviendra un problème », nous résume en ce sens un député lepéniste, puisqu’il « sera entré dans l’esprit des gens » et pourra faire reposer « son mauvais bilan sur Bayrou et les macronistes. » D’autres estiment au contraire qu’il démontre chaque jour son impuissance à Beauvau. S’il prend le parti à sa main, la limonade sera plus corsée. Le fond de LR aussi.
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